Paul prêchant l’évangile à Athènes
Pourquoi un nouvel appel du Saint-Père pour l’évangélisation ? Jean-Paul II n’a-t-il pas déjà lancé un tel appel ? En 1990, dans Redemptoris missio il écrivait : « Je vois se lever l’aube d’une nouvelle ère missionnaire qui deviendra un jour radieux et riche de fruits si tous les chrétiens, et en particulier les missionnaires et les jeunes Églises, répondent avec générosité et sainteté aux appels et aux défis de notre temps. »
D’évidence, cela ne s’est pas produit. Et Benoît XVI a annoncé un Concile en vue d’une Nouvelle Évangélisation car « la mission d’évangélisation, poursuivant l’œuvre lancée par le Seigneur Jésus, est nécessaire à l’Église: il ne faut pas la négliger, c’est un de ses fondements.»
Que s’est-il passé depuis cette annonce ? Espérons qu’il s’est passé quelque chose quelque part. Aux États-Unis tous les indicateurs sont orientés fermement dans le mauvais sens. Le nombre de baptêmes et de mariages Catholiques diminue. Donc, naturellement, le nombre de Catholiques pour qui divorce et avortement ne posent pas problème, plus de 50%, est en augmentation. Les abandons de la religion Catholique vont croissant — constituant la population religieuse la plus importante dans le pays après l’Église Catholique proprement dite.
C’est fort embarrassant. Parmi les missions essentielles de l’Église Catholique: enseigner la foi, encourager ceux dont la foi chancelle, corriger les erreurs de ceux qui sont mal informés. Un simple rappel: « Allez, enseignez toutes les nations !». On dirait qu’une fracture tectonique s’est produite dans la conscience Catholique Américaine au cours des cinquante dernières années. Une majorité récuse l’enseignement de l’Église et pense sans doute que l’Église n’a nullement à évangéliser qui que ce soit. Les deux exhortations pontificales à évangéliser n’ont eu aucun effet sur les statistiques. Est-ce de l’apathie, ou bien penserait-on que l’Église est bien assez grande pour survivre sans que nous agissions ?
Les évêques, le clergé, laisseraient-ils simplement la tâche à leurs successeurs ? Ou bien s’agit-il d’une sorte de protestantisme latent causé par la contagion d’un mode de vie dominé par la culture protestante ? N’est-ce pas plus simplement un péché ? Thomas d’Aquin* remarque que « la connaissance de la vérité peut devenir détestable dès lors qu’elle interdit d’agir selon ses propres pulsions.»
En toute logique, un prêtre devrait consacrer environ un tiers de son temps à l’enseignement, et les deux autres tiers à la sanctification et à la direction de la paroisse. Il n’est pas question qu’il se décharge sur une tierce personne, c’est le devoir de tout prêtre. Non seulement il a été ordonné pour cela, mais encore il est certainement le mieux à même d’exercer ces fonctions.
Mais d’évidence certains n’ont pas reçu une formation appropriée. De nombreux séminaires ont succombé à la tentation d’un enseignement consacré aux disciplines laïques, réduisant ainsi la formation propre de prêtres à une fraction du cursus. On a probablement considéré que la structure séculière de l’enseignement était idéale, ce qui peut être valable pour certaines disciplines. Mais elle ne convient pas nécessairement à la formation ecclésiale, dont le but final est la connaissance d’une vérité : Jésus Christ.
En vérité, la sécularisation de l’organisation des séminaires s’est poursuivie. Au lieu de matières constituant une acquisition continue de la vérité, certains séminaires ont adopté un cloisonnement des disciplines, les matières étant enseignées selon le gré de l’enseignant, comme cela se pratique dans les universités laïques. Aucun effort n’est accompli pour vérifier que chaque cours s’emboîte avec les autres dans le programme de formation. Les professeurs de séminaires qui enseignent aussi en Université laïque succombent à ce grave défaut.
Bien sûr, on ne peut donner que ce que l’on a. Nombre de professeurs actuels n’ont vraisemblablement pas appris eux-mêmes comment les matières enseignées sont influencées par diverses philosophies, ni comment elles s’intègrent aux autres branches de la théologie. Ainsi, un étudiant (unique raison d’être du système) devrait être un vrai génie disposant de beaucoup de temps libre pendant ses études (devinez comment) pour assembler tous les éléments disparates qui lui sont dispensés — sans compter les champs de mines semés par les doctrines philosophiques tordues qui marquent l’enseignement reçu.
L’étude de l’Écriture Sainte a été particulièrement garnie de difficultés. Les « érudits » se sont empêtrés dans le courant sola scriptura (l’Écriture, rien que l’Écriture) d’où ils ont tiré les connaissances sur les Écritures comme si elles étaient indépendantes, sans lien avec la tradition de l’Église. À l’inverse de cette approche essentiellement protestante (Merci, Martin Luther !), Benoît XVI déclare: « en définitive, c’est la Tradition vivante de l’Église qui nous fait convenablement saisir l’Écriture sacrée comme parole de Dieu.» Vatican II l’a exprimé en termes analogues.
Alors, quand le gouffre entre l’enseignement de l’Église et la position de la majorité des catholiques sera-t-il comblé par le gigantesque effort nécessaire à une solution au problème de la formation ? Ou bien continuerons-nous à baguenauder sur notre chemin ?
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/another-call-for-evangelization.html
* Sur saint Thomas :
Il faudra absolument lire et faire lire : Philippe-Marie Margelidon, o.p. et Yves Floucat, Dictionnaire de philosophie et de théologie thomistes, « Bibliothèque de la Revue thomiste », Paris, Parole et Silence, juin 2011…
http://www.thomas-d-aquin.com/
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Version française de Redemptoris missio.