Revisiter l'enseignement social catholique - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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Revisiter l’enseignement social catholique

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Cette dernière semaine nous a apporté un de ces rares et splendides événements – une conférence universitaire de paillettes et de substance: « l’écologie humaine – Intégrer de 150 ans d’enseignement social catholique », à l’Université Catholique Américaine. La conférence avait été organisée et en scène par l’école de commerce, sous la direction de deux de ses leaders, Andrew Abela et Andreas Widmer.

Les préoccupations de la réunion étaient complètes, passant de la nouvelle religion de la libération sexuelle à l’état de la famille. Mais il y avait une préoccupation particulière pour l’économie politique et l’enseignement de l’Église depuis Léon XIII et Rerum Novarum (1891). Les «choses nouvelles» indiquées dans le titre comprennent l’avènement d’une économie industrielle, la sortie de la pauvreté de quantité de gens ordinaires, mais en générant de nouvelles tensions. Cela reposerait de façon aigue de très vieilles questions à propos de la «justice» distributive.

Le fils prodigue revient après avoir dilapidé son patrimoine, et son père, ravi, commande une fête pour célébrer son retour. Le fils aîné, revenant des champs, découvre la fête en cours. Il avait rempli sa tâche, et pourtant il n’a pas apprécié l’abattage du veau gras et la fête coûteuse. Où était la justice ou le mérite dans cette distribution de bonnes choses ?

Mais la génération de richesse peut aiguiser la conscience des «inégalités de revenus », et nous découvrons, parmi d’autres choses, que des gens, jeunes et vieux, succombent ces jours-ci à l’appel des sirènes du «socialisme» d’un Bernie Sanders. Peut-être jeunes et vieux ont-ils perdu le sens de ce que le socialisme signifie vraiment avec l’absence de propriété privée, et le contrôle par le gouvernement de tous les modes de subsistance.

Léon XIII a vu dès le début, et avec un regard remarquablement débarrassé des slogans romantiques, que le socialisme n‘offrait aucune réponse moralement acceptable au problème de la distribution. Les socialistes transféreraient des biens particuliers à un collectif ou de la communauté, et ce mouvement serait « contraire aux intérêts de chaque salarié, car il le priverait de la liberté de disposer de son salaire, et ainsi de tout espoir et la possibilité d’améliorer son état de vie ».

Léon XIII a observé que «quand un homme se livre à une activité rémunérée, l’impulsion et le motif de son travail est d’obtenir la propriété d’un bien, et par la suite de la conserver. »

Il est difficile de trouver une recension plus émouvante de la signification de ce simple état des choses que celle établie par Frederick Douglass quand il fut délivré de l’esclavage. De fait, il a été délivré du statut où quelqu’un d’autre s’appropriait les fruits du travail de ses propres mains, parce que quelqu’un d’autre avait un droit de propriété sur ses mains : « Pour comprendre l’émotion qui gonflait mon cœur alors que je serrai cet argent, réalisant que je n’avais pas de maître qui pourrait s’en emparer – qu’il était le mien – que mes mains étaient à moi, et pourraient gagner plus de cette précieuse monnaie. . . J’étais non seulement un homme libre, mais un travailleur indépendant, et il n’y avait pas de maître à la fin de la semaine pour saisir mes gains durement gagnés.

Jean-Paul II a abordé ce sujet sous un angle critique dans son propre commentaire sur Rerum Novarum cent ans plus tard: « Le socialisme (…) maintient que le bien de l’individu peut être réalisé sans référence à son libre choix (…) Une Personne qui est privée d’une chose qu’il peut appeler «sienne » (…) en vient à dépendre de la machine sociale et ceux qui la contrôlent. »

Mais le même vice était présent quand même les dirigeants de l’Église ont commencé à considérer le bien-être des personnes grâce à des formules de « justice sociale », portant sur la répartition des revenus et des biens dans l’ensemble – et tout cela confirme la nécessité pour le gouvernement de continuer à intervenir pour corriger les déséquilibres des revenus.

La pression s’est accrue dans les années 1980 quand l’aile pro-vie des évêques a commencé à menacer les démocrates libéraux qui étaient considérés comme des alliés des évêques dans les programmes sociaux par le biais du gouvernement. Les évêques voulurent alors empêcher que ces autres «préoccupations morales» puissent rendre «moralement acceptable» le fait de soutenir un politicien qui défend le «mal intrinsèque» de l’avortement.

Mark Gallagher était à l’époque le principal lobbyiste pro-vie sur la colline du Capitole pour le compte des évêques. Il ne se considérait pas comme un théologien ou philosophe moral, mais il posa son propre jugement que « si l’on pouvait éliminer toute pauvreté en Amérique au prix de la mise à mort d’une personne innocente, ce coût était trop élevé et moralement répréhensible. »
Quelle est la doctrine de l’Église sur l’économie et la « question sociale » ?

Jean-Paul II a dit qu’elle se réduit à ceci: « le seul but de l’Église a été la prise en charge et la responsabilité de l’homme (…) La seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même (…) L’Eglise ne peut pas abandonner l’homme, et [citant Redemptor hominis (1979)] (…) « cet homme est la première route que l’Eglise doit parcourir en accomplissant sa mission. » C’est « le chemin qui mène invariablement au mystère de l’Incarnation et de la Rédemption ».

« Ceci, et cela seul, » dit-il, « est le principe qui inspire la doctrine sociale de l’Eglise. » Et cela explique, avec une profondeur et une portée suffisantes, tout ce que l’Eglise doit dire au sujet de «l’économie» – ou de toute autre chose.

Mardi 22 mars 2016

Tableau : « Le retour du fils prodigue », par James Tissot.

Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/03/22/revisiting-catholic-social-teaching/