Freud au bac philo : le corrigé de Gérard Leclerc - France Catholique
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Freud au bac philo : le corrigé de Gérard Leclerc

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© École polytechnique - J.Barande

Hier matin, nos candidats de terminale au baccalauréat étaient donc conviés à disserter sur des sujets de philosophie. Heureuse exception française, ai-je envie de dire une nouvelle fois, que cet intérêt pour la pensée désintéressée qui se traduit par une discipline universitaire et une classe Terminale qui s’identifie à la seule philosophie. Chaque année, on constate aussi que les médias se jettent sur les sujets de dissertation pour en informer leurs lecteurs ou leurs auditeurs au plus vite. Et certains journaux vont jusqu’à en proposer un corrigé par écrit ou par vidéo. La réforme du baccalauréat, conçue par Jean-Michel Blanquer, qui ne sera effective que dans deux ans, ne modifiera pas cette classe privilégiée, même s’il y a controverse sur les programmes.

Pour ma part, des sujets proposés cette année, c’est le texte de Freud, tiré de son essai sur L’avenir d’une illusion qui a retenu mon attention, parce qu’il me pose problème. Non par son contenu assez classique et qui peut susciter un consensus assez général que par l’intention polémique qui est quand même à l’origine du livre. Car l’illusion dénoncée est bien celle de la religion. Une religion, si l’on ose la formule, qui serait remise à sa place par l’avènement de la science. Ce qui laisse perplexe au premier abord, c’est l’opposition frontale de la religion et de la science, comme s’il y avait forcément incompatibilité entre elles. C’est un sacré présupposé, et le cas Galilée qui se trouve allégué dans un corrigé afin de démontrer cette incompatibilité, est tout à fait spécieux. Car Galilée lui-même n’aurait pas accepté d’être mis du côté des contempteurs de la foi. C’était un excellent chrétien, tout comme Copernic qui développa le premier la théorie de l’héliocentrisme.

De plus, Freud défend la crédibilité de la science avec des arguments que l’on dirait de bon sens. Mais qui aujourd’hui songerait à opposer une science faillible aux certitudes de la foi ? Cela n’a pas de sens pour un théologien, qui, par ailleurs, recherche pour sa propre discipline le renfort d’un certain nombre de sciences auxiliaires, notamment en exégèse, pour mieux reconnaître et baliser son terrain de recherche. Faut-il en conclure que la polémique de Freud a mal vieilli et qu’elle est imprégnée de scientisme ? Mais il faudrait reprendre d’une façon plus générale la question posée par ceux que Paul Ricœur appelait « les maîtres du soupçon ». Ceux-ci ont pu diffuser un certain doute dans les esprits, mais ont-ils réussi à imposer leur athéisme, comme une pensée vraiment rationnelle ?

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 18 juin 2019.

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