Marie-Madeleine de Kergolay-Soubrier, Tu n’es pas seul – Accompagner l’enfant en deuil -, préface de Patrick Poivre d’Arvor, éd. du Jubilé, 290 p., 16 €.
« Le génie, c’est l’enfance retrouvée à volonté » soutenait Baudelaire. Mais ce génie ne s’applique pas seulement dans le domaine de la création, de la découverte, artistique ou scientifique. Elle est souvent d’ordre moral ; nous dirions même : transcendantal. Tel le Petit Prince de Saint-Exupéry ou l’Alice aux pays des merveilles, l’enfant ne sépare pas le regard du cœur et le regard de la raison. Il est doué de la prescience des choses cachées, cachées aux yeux des adultes s’entend, doué de la vision de ces choses dont nous savons qu’elles sont révélées prioritairement aux petits et aux faibles.
Ecoutons cette anecdote que nous pourrions bien retrouver dans ce livre. Les élèves d’une classe de grande section de maternelle sont réunis par leur maîtresse pour leur annoncer le décès du père d’un de leurs camarades. Louis, cinq ans, spontanément lance : mon papa, lui, il a eu un cancer de l’estomac, mais il est pas mort. Deux ans plus tard, l’enfant raconte au matin à son papa le rêve qu’il vient de faire : dans un jardin, je voyais une longue vipère (j’ai reconnu la vipère parce qu’elle avait une tête triangulaire) s’approcher de toi et te mordre à la cheville. Tu ne la voyais pas venir car tu regardais en l’air. Je t’accompagnais à l’hôpital mais tu mourrais pas. A l’époque, la personne symbolisée par le serpent avait été identifiée. Quatre ans plus tard, cette personne expédiait bien dans le coma et à l’hôpital ce papa qui ne mourra pas.
L’enfant est proche des choses de l’Invisible ; il possède tous les atouts pour les comprendre : sa sensibilité, ses souvenirs inconscients d’un autre temps, son aptitude naturelle à entrer en bonne intelligence avec le profond de la vie. Le célèbre pédiatre, Aldo Naouri disait récemment : «L’enfant est un métaphysicien.» Un métaphysicien sensible et trop souvent totalement incompris par des adultes vivant dans l’ignorance de ses connaissances et dans le mépris de sa sensibilité.
Marie-Madeleine de Kergorlay-Soubrier, avec tout autant son expérience personnelle que professionnelle, avec la lecture adjointe des livres d’Elisabeth Kubler-Ross, vous aidera vous tous, parents, grands-parents, cousins, professeurs et éducateurs en tous genres, à le comprendre et à les comprendre, faisant alors de vous tous, des gens enfin dignes d’eux, qui ne séparent point les enseignements à retirer de la mort et du deuil de la pédagogie du deuil.