Environnement : LE RETOUR DES GRANDS CAPITAINES - France Catholique
Edit Template
Pontificat de François - numéro spécial
Edit Template

Environnement : LE RETOUR DES GRANDS CAPITAINES

Copier le lien

Alors que les satellites nous donnent l’impression que tout peut être vu à distance pour être examiné ensuite en laboratoire et qu’il semble ne plus exister de terra incognita qui puisse enflammer l’imagination d’aventuriers, l’appel du large se fait entendre chez de nouveaux navigateurs qui ne veulent plus seulement prendre la mer pour le plaisir mais pour mieux comprendre notre planète et trouver des solutions pour la protéger. C’est en effet l’environnement qui motive cette nouvelle race de marins.

Le 4 mars dernier, Raphaël Dinelli achevait aux Sables d’Olonne la course du Vendée Globe, mais à la différence des autres concurrents, ce n’est pas sa place au classement général qui le motivait le plus. Pour le compte de la Fondation Océan Vital, il a expérimenté tout au long de son tour du monde de nouvelles techniques qui lui ont permis d’éviter de consommer des énergies fossiles : une éolienne et des panneaux photovoltaïques souples qu’une entreprise vendéenne tente aujourd’hui d’adapter à des autocars. Le 4 septembre, c’était au tour du voilier Tara de prendre la mer à Lorient pour un tour du monde destiné à identifier les effets et les raisons du réchauffement climatique. Pas de marins célèbres à bord de l’ancien navire de Jean-Louis Etienne et de Peter Blake, mais une équipe solide emmenée par le scientifique Eric Karsenti et Etienne Bourgeois, directeur de la société Agnès B., principal soutien financier de l’expédition.

Puis, le 21 octobre, c’est le voilier La Boudeuse qui a appareillé de Fécamp à destination de l’Amérique du Sud, mais avec une différence notable par rapport à ses devanciers. Alors que les précédents voyages relèvent d’une initiative privée, il s’agit ici rien moins qu’une expédition officielle avec lettre de mission remise au capitaine Patrice Franceschi par le ministre de l’écologie et du développement durable Jean-Louis Borloo, faisant ainsi écho, à travers les siècles, à celle reçue en son temps par Louis-Antoine de Bougainville pour lancer sa frégate, La Boudeuse justement, pour une circumnavigation qui dura de 1766 à 1769. Ce fut, de fait, le premier navigateur à s’aventurer en mer pour des raisons scientifiques et non pas simplement pour des objectifs commerciaux ou politiques. Patrice Franceschi n’est pas un écologiste. C’est d’abord un voyageur et même un explorateur (il a d’ailleurs été président de la Société des explorateurs français) qui a déjà conduit plusieurs expéditions terrestres et maritimes à travers le monde. Mais pour cette nouvelle mission intitulée Terre-Océans et qui durera deux ans, il part en ambassadeur du Grenelle de la mer avec un objectif environnementaliste affiché mais aussi la volonté de maintenir l’homme au centre des préoccupations afin de promouvoir une véritable écologie humaniste fondée sur le développement durable. Après l’Amérique du Sud, la Boudeuse entrera dans le Pacifique en décembre 2010 avec toujours au programme de l’équipage et des « savants » embarqués : biodiversité, modifications climatiques, biosphère, état des eaux mais aussi relation hommes-milieux et dialogue des cultures. Les résultats seront sans doute riches d’enseignement mais d’ores et déjà, l’aventure est passionnante et les internautes, eux aussi de drôles de voyageurs, peuvent la suivre sur le site dédié : www.laboudeuse.org. Le capitaine de La Boudeuse s’inscrit donc dans une longue et noble filiation et l’on ne peut s’empêcher de penser au Roi Louis XVI qui, alors qu’il montait sur l’échafaud, s’inquiétant moins de son sort que de celui du capitaine de L’Astrolabe, eut encore le cœur de poser la question : « A-t-on des nouvelles de Monsieur de La Pérouse ? ».

Fabrice de CHANCEUIL