Il y a deux mois, le 28 mars, la proposition de loi visant à libéraliser la recherche sur l’embryon était mise en échec à l’Assemblée nationale. Je partageais plus tard dans ces colonnes ce « sursis inespéré et glorieux ». Victoire d’étape, qui n’est pas venue à bout de l’obstination délétère des partisans du texte. Après la déroute des radicaux de gauche dans l’hémicycle, le gouvernement, sa ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Mme Fioraso, en tête, est déterminé à reprendre le texte à son compte et ses moyens sont bien plus puissants : le Conseil des ministres du 7 mai annonçait déjà le programme « chargé » du Parlement d’ici l’été qui devra notamment « achever […] l’examen de la proposition de loi autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires ». La sensibilisation et la mobilisation via la campagne Vous trouvez ça normal ? ont joué sur un effet de surprise en mars sur lequel il n’est évidemment plus question de compter. La mobilisation à l’échelle européenne, au-delà d’être rassembleuse pour une communauté de citoyens qui n’entendent pas laisser les enjeux éthiques aux mains de la technoscience, est aujourd’hui un levier nécessaire pour agir à l’échelle nationale. Le député UMP Philippe Gosselin faisait cet hiver le rapport des forces parlementaires en défaveur de l’embryon, sans fatalisme, mais avec la conscience aiguë qu’une lutte parlementaire traditionnelle était peine perdue. Cette initiative européenne aboutira à l’automne, probablement à contretemps si le texte de loi passait en juin ou juillet en France, mais elle marquerait un coup d’arrêt au nerf de la guerre : les financements européens. Car soyons précis, si la question est moins scientifique qu’éthique, elle est moins idéologique que financière. Il ne s’agit pas de freiner la recherche, mais d’exiger qu’elle soit conduite avec des procédés respectant la dignité humaine de l’embryon. À ceux qui nous opposent « l’obscurantisme », répondons de façon pragmatique.
Premièrement l’animal est aujourd’hui mieux protégé que l’être humain. L’Union européenne a adopté des règles très contraignantes pour encadrer les recherches sur l’animal et les embryons animaux. Ces règles ont été transposées en France cette année. Il est aujourd’hui beaucoup plus difficile et coûteux de travailler avec des animaux, y compris sous forme fœtale, qu’avec des embryons humains. Surprenant ? Pas tellement… La suppression du clivage être humain/animal et le bien-être revendiqué pour l’animal sont des marqueurs sociétaux extrêmement inquiétants qui nous renvoient aux pages les plus sombres de notre histoire.
Or, et c’est le second point, des recherches alternatives existent, grâce notamment aux cellules souches issues de sang de cordon ou du placenta, aux cellules souches adultes ou aux cellules adultes reprogrammées (cellules iPS découvertes par le prix Nobel Yamanaka). Elles donnent des résultats plus prometteurs et rendent inutiles les recherches sur l’embryon humain.
Troisième argument, la Cour de justice de l’Union européenne a récemment interdit d’établir des brevets à partir de recherches impliquant la destruction d’embryons au nom de leur humanité (arrêt Brüstle/Greenpeace du 18 octobre 2011). Elle constate logiquement que, dès la fécondation, le processus de développement de l’être humain est déclenché.
Enfin, et ce n’est pas le moindre des arguments, une partie des États membres de l’Union européenne refuse de financer les recherches qui conduisent à détruire des embryons humains. Pourtant, ceux-ci les subventionnent malgré eux indirectement, puisqu’une partie de leur contribution financière est affectée à d’autres pays où ces recherches sont légales. Cette incohérence rend encore plus illégitime l’utilisation du budget européen pour ces actions controversées.
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Pour aller plus loin :
- Protéger l’embryon une urgence européenne
- Décryptage des arguments des partisans de la recherche sur l’embryon humain.
- L'embryon humain, l'un de nous
- BULLETIN DE L'ACIP ©
- Eléments d’anthropologie philosophique permettant de comprendre l’humanité de l’embryon - l’être en puissance, actualité et information