« Fermer les églises, c'est mettre Dieu au placard! » - France Catholique

« Fermer les églises, c’est mettre Dieu au placard! »

« Fermer les églises, c’est mettre Dieu au placard! »

60 millions d’Italiens sont placés en quarantaine par le « Décret je reste chez moi » depuis mardi 10 mars, avec une limitation des déplacements au strict nécessaire. Leonardo et Blandine Rubattu vivent à Milan où toutes les activités et les messes sont suspendues jusqu’au 3 avril au moins. Ils sont mariés et parents de 5 enfants. Ils témoignent des changements importants que cela entraîne dans la vie spirituelle en particulier.
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De quelle manière vivez-vous en ce moment : quelles sont les restrictions concrètes ?

Le nouveau décret d’urgence émis par le gouvernement italien est entré en vigueur, déclarant toute l’Italie en zone rouge et limitant tout déplacement en dehors de sa commune et au sein même de celle-ci, sauf pour raisons à justifier (professionnelles, médicales, etc.) et tout regroupement de quelque type que ce soit privé ou public. Des sanctions pénales et financières sont prévues en cas de désobéissance.

Nous sommes donc en quarantaine chez nous, comme tous les Italiens : de nombreuses sociétés ont fermé leurs bureaux et de nombreuses personnes travaillent depuis leur domicile. Les écoles, les lycées et les universités sont fermés jusqu’au 3 avril et nos enfants suivent tous leurs cours en ligne. Les bars et autres lieux de rassemblements publiques, les églises, les musées sont ouverts jusqu’à 18 heures, avec comme obligation de respecter dans chacun de ces lieux une distance d’un mètre entre chaque personne. Les supermarchés restreignent l’accès afin de ne pas avoir trop de clients à l’intérieur de leur magasin.

Le gouvernement italien a créé dés le début une communication dispersive et permettant des interprétations de tout genre. Les médias ont rajouté leur part de commentaires divers, donnant lieu à des réactions opposées au sein de la population : soit la panique soit l’incrédulité.

L’expérience de vraie quarantaine commence, et l’effort demandé aux populations des zones sous restrictions doit se faire en solidarité avec la tranche de population la plus faible et qui est donc celle à risque. Ces restrictions ont aussi pour but de restreindre le débordement du service sanitaire italien…

Quelles sont les propositions spirituelles qui vous sont faites par le diocèse, la paroisse…?

Les églises sont ouvertes mais aucun office ni messe ne peut être célébré, les services funèbres ou les mariages sont suspendus, les confessions autorisées en dehors du confessionnal. Les patronages sont fermés.

En solidarité avec tous les catholique privés de messe, le Saint Père a permis la retransmission sur Vatican News (et sur d’autres chaînes) de la messe qu’il célèbre tous les matins à 7 heures à Sainte-Marthe, au Vatican.

L’archevêque de Milan Monseigneur Delpini, depuis le début, a envoyé aux paroisses et aux catholiques du diocèse de Lombardie (le plus grand d’Europe) des messages de soutien par la prière et de demande de prière commune depuis nos domiciles. Il a également insisté sur la possibilité d’assister à la messe télévisée et sur la communion spirituelle, évoquant la force du jeûne eucharistique en union avec beaucoup de chrétiens du monde. Je crois que certaines paroisses offrent encore l’adoration eucharistique.

Que pensez-vous du fait de ne pouvoir aller à la messe ?

Depuis le début, je dois avouer que nous nous sommes un peu révoltés des messages reçus de notre archevêque annonçant donc les églises ouvertes mais l’impossibilité de suivre la messe et de communier. Pour nous, la nourriture spirituelle donnée dans l’eucharistie nous semblait nécessaire, et il nous paraissait également presque vital de nous rassembler entre fidèles pour prier ensemble contre le fléau !

D’autant que cette restriction se vivait avec des supermarchés grands ouverts et donc nous comprenions encore moins cette décision extrême de nous priver de faire Église physiquement. Laisser au moins le choix à chacun d’aller à l’église, en respectant bien entendu les consignes sanitaires et les distances demandées, nous semblait le minimum indispensable. Je pensais en particulier à tous les fidèles persécutés du monde entier qui prennent des risques pour assister à l’office divin ! Fermer les églises revenait pour moi à mettre Dieu au placard et à perdre la belle opportunité de le remettre comme la priorité absolue pour chacun de nous surtout en ces temps particuliers.

Les prêtres doivent obéissance à leur archevêque et il n’est plus possible de trouver de messe même privée à Milan. Nous devons donc découvrir les grâces données dans la communion spirituelle et nous habituer doucement à la prière à domicile en union avec le monde entier. Cela nous aide à comprendre ce que beaucoup de chrétiens dans le monde vivent tous les jours avec le jeûne eucharistique forcé et à nous mettre, en ce temps de carême, en union avec eux. Cela nous permet également de réaliser que la communion n’est pas un dû mais un don et de vivre ce désir profond de communier en pensant à toutes les fois où nous avons pris le corps du Christ dans un état qui ne le méritait pas. Maintenant la difficulté va être de demander le même effort à nos jeunes, beaucoup moins concernés par le virus et peu enclin à suivre la messe à la télévision chez eux avec leurs parents ! Il nous faudra des grâces supplémentaires !

Comment s’organisent les catholiques pour vivre leur vie spirituelle ?

Jusqu’à maintenant nous pouvions sortir de Milan et trouver une messe pas trop loin. Aujourd’hui nous ne pouvons plus nous déplacer et devons vivre ce temps de pénitence différemment. Nous pourrons donc suivre la messe à la télévision. Beaucoup de catholiques se retrouvent sur des groupes WhatsApp en se donnant des rdv de prières en même temps, les groupes du rosaire des mamans le font par exemple. Nous devrions saisir ces moments de « clôture » pour prier en famille (ce qui nous aidera certainement à supporter ce temps ensemble en vase clos !!!), soutenir nos proches et ceux autour de nous en leur téléphonant, lire et approfondir notre foi et privilégier notre prière intérieure. Un beau challenge pour ce Carême 2020 !