
Qu’espérez-vous pour le Liban à l’occasion de la venue de Léon XIV ?
S. E. Fadi Assaf : « Heureux les Artisans de Paix. » Sa Sainteté le pape Léon XIV a placé sa visite au Liban sous le signe de la paix. Le verset de l’Évangile retenu pour la visite explique parfaitement l’essence de la politique du Saint-Siège pour le Moyen-Orient et donc pour le Liban : les cycles récurrents de violences ne peuvent être inversés qu’en empruntant la voie de la paix. Et pour les Libanais, la paix commence chez soi : elle commence par le strict respect des équilibres interconfessionnels, par le renforcement d’un État qui dispose du monopole de la puissance publique, qui respecte le modèle pluraliste et qui traite ses diverses composantes sur un pied d’égalité. Cette « paix intérieure » est le gage de stabilité que les Libanais espèrent : c’est aussi le passage obligé vers d’autres ambitions de paix.
Dans quelle mesure la venue du Pape est-elle attendue par les Libanais ?
Pour les Libanais, tous les Libanais, la venue du Pape est un événement majeur, attendu avec espérance. La région vit des bouleversements géopolitiques majeurs, qui impactent le Liban : un Liban délaissé, ou pire oublié, serait bien plus fragilisé en ces moments délicats qu’un Liban remis, grâce à une telle visite, sous les feux des projecteurs. Pour les chrétiens libanais en particulier, naturellement inquiets devant le prix qu’ont payé leurs coreligionnaires palestiniens, irakiens et syriens, sous les pressions des évolutions dramatiques subies ces dernières années, cette visite est perçue comme un encouragement à résister, à préserver leur présence, et à préparer leur avenir dans la région, au Liban et sur la terre de leurs ancêtres. D’ailleurs, la croix qui figure sur le logo de la visite papale est aussi une ancre, ce qui s’interprète comme un soutien à l’enracinement des chrétiens dans notre pays et notre région.
Quelle place la foi maronite a-t-elle dans l’identité libanaise ?
Historiquement, la contribution des maronites à l’édification de l’État du Liban est centrale. Leur apport, en tant que groupe religieux et sociétal, au développement social et à la prospérité économique du pays, et au rayonnement culturel du pays, l’est autant.
Saint Charbel est un pilier du Liban. Il l’est aux yeux de tous les Libanais, toutes confessions confondues : les Libanais du Liban et ceux de la diaspora. Le choix du Saint-Père de se rendre au monastère Saint-Maroun à Annaya pour visiter le tombeau de saint Charbel est avant tout un pèlerinage : un pèlerinage effectué par Léon XIV dans un des lieux saints chrétiens du Liban les plus visités, comme un rappel à l’intention des millions de Libanais de la diaspora et des peuples du monde entier de l’importance de ce pays pour la préservation de la présence chrétienne au Moyen-Orient.
Après la visite à saint Charbel, le programme du Saint-Père prévoit une visite aussi au sanctuaire de Notre-Dame-du-Liban à Harissa, autre lieu fédérateur pour les Libanais. Un autre rappel de la puissance fédératrice de la foi au Liban, qui devrait être perçue comme un élément de cohésion nationale et non de divergences, avant les rencontres œcuméniques et interreligieuses programmées dans l’après-midi du 1er décembre à la place des Martyrs à Beyrouth…
La halte prévue le lendemain sur le lieu de l’explosion dramatique du port de Beyrouth s’inscrit, elle aussi, dans cette optique : montrer ce qui rassemble les Libanais, dans la joie mais aussi dans la douleur, pour encourager à une plus grande cohésion nationale.





