Le Pape au Liban : un symbole fort pour raviver l’espérance - France Catholique
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Le Pape au Liban : un symbole fort pour raviver l’espérance

Pour son premier voyage apostolique, Léon XIV se rendra au Liban du 30 novembre au 2 décembre, après une étape en Turquie. Au milieu d’un Moyen-Orient instable où les chrétiens sont contraints de fuir la terre de leurs ancêtres, la venue du Pape est très attendue.
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Notre-Dame du Liban, Harissa.

Notre-Dame du Liban, Harissa.

© Pascal Deloche / Godong

Dans la douceur de ce début octobre, les réjouissances se font rares dans l’ancienne Suisse du Moyen-Orient, où l’angoisse pèse sur chacun, malgré l’effervescence habituelle de cette culture méditerranéenne. Dès lors, la confirmation officielle de la venue du Souverain pontife réjouit les cœurs. À son évocation, les visages s’éclairent. Religieux comme laïcs, retraités au visage creusé et étudiants dynamiques, tous sont enthousiastes. Aline, qui suit des études d’ingénieur, s’investit auprès des chrétiens les plus pauvres par des maraudes et des cours de soutien. « Quelle joie que le pape Léon vienne nous visiter ! s’exclame-t-elle. C’est tellement important pour nous… on se sent vite résignés devant la situation de ces dernières années. »

Les chrétiens rassemblés par le pape

Le Saint-Père s’inscrit dans le sillage des papes Jean-Paul II puis Benoît XVI, qui avaient tous deux tenu à se rendre dans ce pays levantin où un tiers de la population – près de 2 millions de personnes – demeure chrétienne. Leur passage avait marqué la population, qui se rappelle avec émotion les célébrations rassemblant des foules et les mots touchants des deux pontifes romains. « Je vous invite tous à ne pas avoir peur, à demeurer dans la vérité et à cultiver la pureté de la foi », avait lancé Benoît XVI en s’adressant plus largement à tous les chrétiens du Moyen-Orient.

Léon XIV fêtera auparavant, en Turquie, les 1700 ans du concile de Nicée (325), puis rejoindra le Liban, où toutes les communautés chrétiennes – maronites, arméniennes, melkites, etc. – l’attendent déjà impatiemment. Si ce pays constitue une mosaïque de cultures et de pratiques religieuses à la diversité chatoyante, la venue du Saint-Père touche l’ensemble de ces communautés : « Nous sommes ouverts dans notre foi », affirme Marie, jeune femme maronite, la trentaine et une piété chevillée au corps, particulièrement dévouée à sainte Rafqa. « Nous pouvons aller aux messes d’une communauté ou d’une autre, et pour la venue du Pape, tout le monde se rassemblera ! »

Dans ce contexte trouble, marqué par le souvenir de la guerre civile, de l’explosion du port de Beyrouth et des bombardements israéliens d’octobre 2024 qui se prolongent au Sud, la venue du Souverain pontife est perçue comme un puissant signe de soutien.

« Qu’il ramène la paix »

C’est une telle consolation, doublée d’un appel à la paix, que Chanez, dame âgée, au caractère bien trempé et aux origines arméniennes, attend de la visite papale : « Nous voudrions qu’il ramène la paix. Qu’il réunisse les acteurs internationaux, Trump, Poutine, pour que les guerres s’arrêtent », soupire-t-elle, avant d’ajouter : « Les musulmans ont des religieux forts, des chefs qui entraînent. C’est ce dont nous avons besoin aussi pour faire face. »

La paix est nécessaire pour préserver la présence chrétienne au Moyen-Orient, qui s’étiole d’année en année, d’où la nécessité d’une mobilisation de la communauté internationale qu’espèrent les chrétiens libanais.

Mais c’est aussi au cœur de chacun que le Pape s’adresse, apportant force et consolation, comme le rappelle Mgr Mrad, vicaire du patriarcat syriaque de Beyrouth : « En venant au Liban, il s’adresse à tous les chrétiens du Moyen-Orient, les exhortant à demeurer fermes dans la foi et fidèles à leur mission de témoins du Christ dans leurs sociétés. Il leur rappelle aussi que l’Église universelle les porte dans la prière et les considère comme un maillon vital du Corps du Christ en Orient. »

La venue du pontife romain résonne ainsi comme un appel au courage pour les fidèles de toute la région, venant rejoindre leurs souffrances pour réaffirmer l’espérance du Christ.

Soutenir le « message » libanais

Une telle parole est d’autant plus capitale pour les chrétiens du Liban que ce pays tient lieu d’exemple d’intégration des chrétiens à la vie politique et sociale, selon un héritage de diversité religieuse et de coexistence. François, séminariste français à Byblos, insiste sur ce rôle de témoignage du Liban : « La symbolique du Liban est forte dans la diplomatie vaticane, parce qu’il représente un message de cohabitation destiné à tout le Moyen-Orient. C’est ce qu’a affirmé Jean-Paul II : il est “plus qu’un pays, un message de liberté et de pluralisme pour l’Orient et pour l’Occident”. » Mais cette fraternité paraît parfois bien lointaine, quand les tensions intercommunautaires ressurgissent, toujours à la défaveur des chrétiens, souvent pris entre deux feux. Les villages chrétiens du Sud-Liban vivent ces tensions au quotidien, soumis encore ponctuellement aux bombardements israéliens qui rendent difficile le retour des réfugiés. L’aide internationale à ces familles est moindre et repose sur quelques ONG.

« Nos frères du séminaire de Nabatieh ont vécu les bombardements, ils ont dû quitter leur monastère cinq fois pour fuir, mais sont toujours revenus, retrouvant leur chapelle détruite. S’ils ne rentraient pas tout de suite, c’était comme un message pour les musulmans qui s’appropriaient les biens, volaient… », raconte un Frère maronite. Dans leur séminaire de Tamich, perché sur un mont qui surplombe la mer, la bienveillance et l’accueil chaleureux se mêlent, autour du traditionnel café à la cardamome, à l’amertume de la guerre et de l’exil des jeunes, préoccupant pour l’avenir des chrétiens. Une joie mêlée d’inquiétudes partagée par tous les Libanais, fidèles ou curieux, qui attendent de voir leur espoir rallumé malgré l’insécurité, la misère et les décombres.

La résilience de Sœur Maya

Cette religieuse dirige une école au Liban.

« Imaginez que vous êtes directeur d’une école de 1 000 élèves, 70 professeurs. Vous avez lancé des chantiers à n’en plus finir, une série de formations sur l’IA… Une demi-heure après, vous entendez des roquettes, le bruit des bombardements, panique, coups de téléphone en ce 7 octobre 2023… La guerre reprend. Qu’est-ce vous faites ? Eh bien, c’est mon histoire ! »

C’est par ces quelques phrases que Sœur Maya, tout droit venue du sud du Liban, commence son témoignage lors d’un concert caritatif organisé par l’Aide à l’Église en Détresse à Paris, pour soutenir l’école de Sœur Maya. Pour venir en France, la religieuse directrice d’école a dû échapper aux bombes sur le trajet jusqu’à l’aéroport. Avec ses Sœurs, elle ne ménage pas ses forces pour continuer à donner une éducation d’excellence : 5 des 10 des meilleures élèves du Liban viennent de son école, malgré les bombes, les coupures d’électricité…

Pourtant, après deux ans de guerre à la frontière d’Israël, les limites se font sentir, et cette femme à la résilience extraordinaire interpelle : « J’en ai un peu assez de supplier ! ». Elle cherche partout de quoi payer ses professeurs. Et avertit : « Si l’école ferme, les derniers chrétiens quitteront la région. Elle est leur ultime raison de rester. Chacun de vos dons permet de faire résonner la musique de l’espérance ».

Myriam Schléret

Pour aider les écoles des Sœurs des Saints-Cœurs de Jésus et de Marie, vous pouvez envoyer vos dons à :
AED, 29 rue du Louvre
78750 Mareil-Marly