La bd grand public
Le Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, qui vient de fermer ses portes, a poursuivi dans sa voie malencontreuse en primant essentiellement des auteurs sinon compliqués tout au moins assez éloignés du grand public. C’est ainsi que Grand Prix de la Ville d’Angoulême est allé à Blutch — pseudonyme de Christian Hincker — qui appartient à l’école de Fluide glacial et dont on nous dit qu’il « enrichit ses récits d’une couleur poétique ou d’échappées oniriques » et dont on constate qu’il n’est publié que par ce que l’on appelle joliment « l’édition indépendante ». Il en est de même pour le Prix du Meilleur Album, qui a récompensé le Pinocchio de Winshluss, édité par les Requins Marteaux et qui constituerait « un sommet d’inventions graphiques qui parvient à faire rire et réfléchir ».
Nous nous attacherons donc aujourd’hui aux grandes séries qui, depuis des dizaines d’années, conservent dans des genres différents les faveurs des lecteurs récents ou anciens. Il importe en effet de rappeler le caractère avant tout populaire de la bd : si la recherche et l’originalité ne doivent jamais être méprisées, il ne faut pas perdre de vue qu’un bon album demeure avant tout celui qui capte l’attention par la richesse du scénario et l’habileté du dessin. C’est pourquoi nous recommanderons les grandes séries qui se poursuivent ou qui sont rééditées :
– chez Dupuis, la 50e aventure de Spirou et Fantasio se déroule, grâce à Morvan, Yann et Munuera, dans le passé en allant Aux sources du Z, tandis que le volume 6 de la réédition des épisodes signés Franquin nous plonge dans des Inventions maléfiques, et que le 14e titre du Petit Spirou permet à Tome et Janry de lancer : Bien fait pour toi !
– grâce à Peyo et à son studio, revoici en intégrale les deux premiers tomes de Johan et Pirlouit, Page du Roy et Sortilèges et enchantements (Dupuis), en même temps qu’on retrouve les petits lutins bleus dans Les schtroumpfs et le livre qui dit tout, 120 blagues et autres surprises et Les schroumpfeurs de flûte (Le Lombard) ;
– aux deux premiers volumes de l’intégrale Lucky Luke (Dupuis) — malheureusement sans plus de compléments que dans la première version — s’ajoute la belle réussite d’Achdé et Laurent Gerra avec L’homme de Washington (Lucky Comics) ; l’Amérique de la même époque revit aussi dans le 17e épisode de la Jeunesse de Blueberry, Le sentier des larmes (Dargaud), dû à Corteggiani et Blanc-Dumont, et dans le 52e des Tuniques bleues, Des bleus dans le brouillard (Dupuis), toujours réalisé par Lambil et Cauvin ;
– du côté d’Hugo Pratt, admirons la poursuite en petits volumes colorisés de petits épisodes de Corto Maltese, Concert en o mineur pour harpe et nitroglycérine, Songe d’un matin d’hiver, Côtes de nuits et roses de Picardie, Burlesque entre Zuydcoote et Bray-Dunes, Au nom d’Allah le miséricordieux, Le coup de grâce, Et d’autres Roméos et d’autres Juliettes et Les hommes-léopards du Rufiji ; toujours chez Casterman, la reprise des Scorpions du désert par Camuncoli et Casali nous vaut Quatre cailloux dans le feu.
Gihé © acip