C’est le serpent de mer aux Etats-Unis : la réforme du système d’assurance en matière de santé. Hillary Clinton en avait fait son cheval de bataille, sans grand succès, quand son mari était président, puis un des points forts de sa campagne lors des élections primaires. Obama avait été plus prudent et plus modéré, mais le voici désormais au pied du mur ; il avance, mais lentement, car le dossier est piégé.
En réalité, le problème ne se pose vraiment que pour 15% des Américains, qui, volontairement ou faute de moyens, n’ont pas d’assurance santé. En effet, les plus âgés et les plus pauvres ont un système public (Medicare et Medicaid) ; la grande majorité a un système d’assurance privé, en général largement financé par leur employeur. L’ensemble couvre donc 85% des Américains ; mais cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de problèmes : le système public, comme notre sécu, est ruineux ; le système privé coûte cher, même si la concurrence pousse les prix vers le bas, parce que les Américains veulent mieux se soigner et les entreprises qui financent tout ou partie trouvent la facture un peu lourde.
Mais évidemment ce sont les 15% qui restent qui posent le plus de problèmes. Non pas ceux qui auraient les moyens, mais qui estiment que leur âge ou leur santé apparente les met à l’abri de la maladie, mais ceux qui sont trop pauvres (ou leur entreprise) pour s’assurer et trop riches pour bénéficier du système public. Dans un premier temps, prudemment, Obama s’est attaqué à la question des coûts en matière de santé. Il vient donc de négocier avec six importantes organisations médicales, de façon à diminuer la croissance des dépenses de santé de 1,5% par an au cours des dix prochaines années. Il espère ainsi économiser 2000 milliards de dollars. Il a présenté cet accord entouré de tous les représentants de ces organisations médicales, très puissantes aux USA.
Pour l’instant, ce n’est pas encore le grand soir. Mais le président a rappelé qu’il « ne prendrait pas de repos avant que le système de santé ne soit réformé ». Et d’ajouter que la moitié des faillites personnelles aux USA sont dues à des factures médicales trop élevées et que 15% des Américains, cela fait 45 millions de personnes. Mais la réduction des coûts n’est que la première étape.
Notre confrère Les Echos précise qu’Obama a alors rappelé les trois principes qu’il juge essentiels : « Réduction des coûts, libre choix des individus à conserver leurs assurances ou à en prendre d’autres, soins abordables et de qualité ». Mettre au centre le libre choix de son assurance santé, voilà qui nous éloigne du monopole à la française.
Il est vrai qu’il y a, aux Etats-Unis comme ailleurs,, un vrai problème de financement de la santé. Elle devient prioritaire dans les choix des individus. Le budget santé est aux USA de 2 400 milliards et augmente de plus de 6% par an. En 2018, on en sera à plus de 20% du PIB. La question est donc d’abord de réduire cette croissance, même si le problème de fond est de savoir s’il s’agit d’un vrai choix libre des Américains, qui privilégient leur santé au détriment d’autres postes.
Les organisations médicales veulent aussi jouer sur l’éducation à la santé, par exemple en luttant conter l’obésité, grâce à une responsabilisation de chacun. Il semble bien en tous cas qu’elles aient moins peur de la réforme Obama que des projets d’Hillary Clinton, puisque à l’époque ils avaient financé la campagne contre son plan, alors qu’aujourd’hui ils signent un accord avec la Maison blanche. Mais chacun retient son souffle dans l’attente du vrai plan, dans lequel le Congrès préparera, en accord avec le Président, une réforme plus globale, dont on ne sait pas grand-chose aujourd’hui. A écouter Obama, on peut douter qu’il se lance dans une socialisation du système de santé. Mais les professionnels de santé restent prudents, car dans certains domaines liés à la santé (à commencer par l’avortement, par la fin des subventions aux programmes pour jeunes dits de « fidélité » ou encore pour l’utilisation des cellules souches embryonnaires), Obama a montré qu’il pouvait aussi prendre des positions radicales. Ce sera en tous cas un des grands chantiers de son mandat.
Jean-Yves Naudet
Pour aller plus loin :
- Mgr Marc Aillet : « La réforme de l'Église passe par notre réforme intérieure. »
- OBAMA FACE AU PROBLEME DE L’ASSURANCE-MALADIE
- Le Liban après les élections législatives du 7 juin 2009
- La valse à trois temps - Ou la manipulation des élections présidentielles de 2017
- USA : la Cour suprême déclare la guerre au Vatican