Dans son homélie pour cette fête, le pape Jean-Paul II disait: « Si Jésus est la Vie, Marie est la Mère de la Vie. Si Jésus est l’Espérance, Marie est la Mère de l’Espérance. Si Jésus est la Paix, Marie est la Mère de la Paix, la Mère du Prince de la Paix. En cette nouvelle année, demandons à cette Sainte Mère de nous bénir. Demandons-Lui de nous donner Jésus, notre entière Bénédiction en qui le Père a béni le monde entier, en faisant ainsi l’histoire de notre salut.»
Par ces quelques mots il a précisé la relation entre Marie et le Christ telle qu’elle est, axe de notre salut. Il est « Dieu fait homme » et elle est la femme que Dieu a créée pour être la Mère de Son Fils ici-bas. Sans péché, elle seule pouvait répondre « oui » au plan de Dieu et ouvrir toutes les perspectives contenues en ce plan, alors que nous nous rebellons trop facilement.
Cette tension est merveilleusement soutenue au travers des mystères du Rosaire, plus particulièrement depuis que Jean-Paul II a ajouté les Mystères Lumineux (Baptême au Jourdain, Noces de Cana, Proclamation du Royaume, Transfiguration, Institution de l’Eucharistie). Ils s’insèrent entre les Mystères joyeux (Annonciation, Visitation, Nativité, Présentation au Temple, Jésus retrouvé au Temple) et les Mystères douloureux (Agonie à Gethsemani, Flagellation, Couronnement d’épines, Montée au Calvaire, Mort sur le Croix) parmi les événements de la vie de Jésus.
Les évènements de la vie de Jésus sont le récit de notre salut se perpétuant dans les Mystères glorieux (Résurrection, Ascension, Descente du Saint Esprit, Assomption, Couronnement de Marie). Tout au long de ces mystères nous prononçons deux prières issues des Écritures, le Notre Père que Jésus nous a enseigné, et le Je Vous salue Marie, paroles prononcées par l’ange Gabriel et lors de la visite de Marie à Élisabeth.
Tout l’objet de ce magnifique cycle de prières est de cheminer avec Jésus comme marchait Sa Mère. Pas question de suivre un héros, comme on admire une vedette de basket-ball. Suivre signifie l’adhésion à l’Esprit du Christ dans Son Église afin de devenir semblable à Lui. Vatican II rappelle: « Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. »
Marchant avec Jésus nous atteignons la plénitude de notre humanité, humanité unie à Dieu et vécue jour après jour. Marie est le modèle de cette vie d’unité.
Nous célébrons Marie Mère de Dieu le premier jour du calendrier comme pour fixer sur la carte les coordonnées chrétiennes de notre vie pour toute l’année. Cette carte n’indique pas le matérialisme (je souhaite avoir davantage cette année!), ni la souveraineté selon Thomas Hobbes (Il faut que je domine encore plus de monde cette année!), ni d’auto-indulgence (la vie me pardonnera tout!). Cette carte a été dressée par notre Créateur, il faut la suivre pour trouver ce qui peut nous élever à la plénitude de la vie.
La vie trouve sa plénitude dès l’entrée au sein de l’Église car « Les baptisés, en effet, par la régénération et l’onction du Saint-Esprit, sont consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint, de façon à offrir, par toutes les activités du chrétien, autant d’hosties spirituelles, en proclamant les merveilles de celui qui, des ténèbres, les a appelés à son admirable lumière. » (Vatican II).
La fête de Marie Mère de Dieu est, pour ainsi dire, la fondation de l’année, le moment où il s’agit encore plus de suivre Jésus-Christ au sein de la communauté, car évidemment on ne peut aller seul. C’est un exercice de vertu d’espérance, l’espérance de la grâce chrétienne. Comme le dit Benoît XVI: « Paul rappelle aux Éphésiens que, avant leur rencontre avec le Christ, ils étaient « sans espérance et sans Dieu dans le monde » » (Ep 2, 12).
Naturellement, il sait qu’ils avaient eu des dieux, qu’ils avaient eu une religion, mais leurs dieux s’étaient révélés discutables et, de leurs mythes contradictoires, n’émanait aucune espérance. Malgré les dieux, ils étaient « sans Dieu » et, par conséquent, ils se trouvaient dans un monde obscur, devant un avenir sombre. »
Alors que nous avons reçu l’Esprit de Jésus-Christ, il nous vient une année pour nous immerger dans la vie de Jésus. Ce n’est pas un « avenir sombre », c’est une année de grâce reçue comme un don.
Cette grâce n’est pas une sorte de, euh ! hem !… sentiment de bien-être. C’est l’expansion de notre cadre de vie spirituelle. S.E. le Cardinal John Henry Newman (1801 – 1890) expliquait, dans une de ses « Méditations sur Marie »:
« Ô combien est grande la sainteté de Marie, elle qui pouvait soutenir la vue d’un ange, dont l’éclat frappa le saint prophète Daniel le laissant sans connaissance, quasi-mort, et, de plus, comme sa sainteté est plus grande que celle de l’ange, et que nous sommes bien moins saints que Daniel, nous avons toutes les bonnes raisons de l’appeler Virgo Admirabilis, l’Admirable, l’immense Vierge lorsque nous pensons à son ineffable pureté! »
Nous transformer, c’est le pouvoir de la grâce. Ainsi, bonne et heureuse année!
Bevil Bramwell, Père Oblat de Marie Immaculée, enseigne la théologie à l’Université Catholique de Distance (Hamilton, Virginie)
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Illustration : Vierge en prière – Giovanni Battista Salvi (vers 1645).