Lors des célébrations du 20e anniversaire de la chute du mur de Berlin, on a remarqué que les États-Unis étaient représentés par le secrétaire d’État, Hillary Clinton, et non pas, comme pour les autres nations, par le chef de l’exécutif. Bien qu’on puisse avancer des considérations de calendrier, de politique intérieure ou d’opportunité, il semble que la raison principale de l’absence présidentielle résidait tout simplement dans le manque d’attention de Barack Obama à l’Europe.
Ce n’est en effet pas lui faire injure que d’affirmer qu’il a d’autres sujets d’intérêt sinon de préoccupation. Pour l’Américain moyen, déjà, l’Europe constitue une bizarrerie à la limite de la survivance préhistorique, une espèce de conglomérat dont la gloire passée ne relève guère que du domaine culturel et qu’il a néanmoins fallu aller secourir à deux reprises au cours du XXe siècle. Ce continent qui n’arrive pas à parler d’une seule voix et qui s’obstine à ne pas suivre systématiquement les conseils des Usa en matière militaire ou diplomatique tout en osant décréter qu’existent d’autres priorités ne peut qu’être regardé avec méfiance. Ainsi, L’Express du Pacifique, journal francophone de Colombie britannique, exprimait, le dimanche 15, une opinion qui ne doit pas être que celle des Canadiens : « La meilleure façon pour l’Europe de jouer un rôle international est de s’opposer à la politique américaine ou de l’influencer. C’est ainsi que l’Union européenne a repris à la volée l’invention du problème du climat, ce qui lui permet d’avoir un sujet sur lequel elle peut faire figure de meneuse et d’inspiratrice du monde. » Barack Obama doit donc faire face à suffisamment de problèmes intérieurs et extérieurs pour ne pas trop perdre son temps avec elle.
L’équation personnelle du président américain ne peut que le centrer hors d’Europe. Bien plus que marqué par ses origines africaines, il apparaît comme un homme du Pacifique : né en 1961 à Hawaii, il a vécu en Indonésie de 1967 à 1971 puis de nouveau à Hawaii jusqu’en 1979, date à laquelle il a étudié à Los Angeles jusqu’en 1981 ; cela signifie qu’il a passé ses vingt premières années à l’intérieur ou sur les bords de l’océan Pacifique. Il n’est pas non plus complètement anecdotique de relever que, parmi sa nombreuses parentèle, son demi-frère Mark Okoth Obama Ndesandjo, né d’une autre épouse américaine blanche de leur père kenyan, vit aujourd’hui en Chine, ayant épousé une femme de ce pays.
Barack Obama place naturellement le Pacifique au cœur du monde : ses partenaires vont de la Russie et du Japon à la Nouvelle-Zélande et au Chili en passant par la Chine, l’Indonésie et la Nouvelle-Calédonie. Il est forcément sensibilisé à leurs propos, par exemple lorsqu’ils l’incitent à ne pas céder aux exigences européennes concernant la situation climatique — tout en lui demandant une politique monétaire plus stricte et une politique commerciale plus ouverte. Vont-ils se contenter des belles paroles qu’il a prononcées un peu partout ? Et qu’obtiendra l’Europe à Copenhague ?
