Quelle que soit la sentence de la Cour suprême ce 28 juin à propos de la loi sur le système de santé d’Obama, des questions sérieuses sur la liberté religieuse demeureront en suspens. Une grande partie de la discussion pendant cette « quinzaine pour la liberté » concerne les hommes politiques. À juste titre. Le droit constitutionnel des catholiques à exercer leur religion est sous la menace de ce gouvernement élu précisément pour le défendre. Les politiciens ont défié l’Église et, pour résister à la tempête sans compromettre des principes moraux fondamentaux, l’Eglise doit se battre — et gagner — sur le front politique.
La « Déclaration sur la liberté religieuse » des évêques au lancement de la campagne de quinze jours — déjà citée sur ce site — est une salve parmi d’autres en écho à cette bataille politique. Son objectif est de capter le Centre en proposant un argument convaincant sur l’importance de la liberté religieuse pour les Américains et pour la Nation. Comme telle, cette Déclaration ne s’appuie nullement sur une révélation ou sur une argumentation théologique.
Mais puisque cette quinzaine est consacrée à l’étude, en plus de la prière et des témoignages, cela vaut la peine, pour les catholiques, de considérer la finalité de la liberté religieuse et pourquoi elle mérite qu’on se batte pour elle. Disons simplement que notre salut dépend de la manière (plus ou moins bonne) dont nous pratiquons librement notre foi.
Le Catéchisme définit la liberté comme : « le pouvoir, enraciné dans la raison et la volonté, d’agir ou de ne pas agir, de faire ceci ou cela, et ainsi d’exécuter de son propre chef des actions réfléchies sous sa propre responsabilité. » (n°1731 de l’édition U.S.) Cette conception de la liberté, redite par Jean-Paul II et Benoît XVI, n’est pas, comme on le pense généralement, le droit d’échapper à toutes les contraintes extérieures. Bien comprise, la liberté permet d’agir en vue du bien choisi. La liberté n’est pas un but en soi mais un moyen d’atteindre le but visé.
La liberté de religion, par extension, est aussi un moyen d’atteindre un objectif, bien qu’un débat, parmi les évêques et au sein de Vatican II, dans Dignitatis Humanae, pousse à la considérer comme une fin en soi.
« Une liberté de ce genre signifie que tous les hommes devraient être protégés d’une coercition venant d’individus, de groupes sociaux, et de tout pouvoir humain de telle manière que, dans de justes limites, nul ne soit forcé d’agir contre ses convictions en matière religieuse, privée, publique, individuellement ou en association.»
Ce n’est qu’au paragraphe suivant qu’est brièvement mentionné le but de la liberté religieuse : « La pratique de la religion, dans sa nature propre, consiste tout d’abord, en ces actes intérieurs volontaires et libres par lesquels un homme se tourne de lui-même vers Dieu. »
La vie éternelle avec Dieu, commencée Hic et nunc (ici et maintenant) et accomplie dans la vie à venir, est le but même de l’existence, et la foi Catholique a été révélée par Dieu, comme un don libre, pour nous aider à L’atteindre. Si la liberté, en général, est le pouvoir d’agir ou de ne pas agir, alors, la liberté religieuse est le pouvoir de choisir Dieu ou de Le rejeter.
Des contraintes à la liberté religieuse menacent notre capacité « à travailler à [notre] salut avec crainte et tremblement » — de là, l’accent sur la liberté contre une contrainte extérieure à nos croyances, dans Dignitatis Humanae et dans la quinzaine actuelle de campagne. Mais il s’agit de bien davantage. La liberté religieuse est plus qu’une affaire de vie ou de mort : c’est une affaire de vie éternelle ou de mort éternelle.
Ceci n’est pas une exagération rhétorique. En raison des doutes sur la connaissance de la religion et les fausses définitions de la tolérance, nous avons effacé le rôle de la religion dans le salut. « Qu’importe que quelqu’un croie » disons-nous, tant qu’il ou elle est « une bonne personne » ? Cela s’accorde avec la stratégie de l’Administration Obama, consistant à réduire le « libre exercice de la religion » à « la liberté d’adorer ». En d’autres termes : « Croyez ce que vous voulez. Ça n’a pas d’importance — tant que vous faites ce que nous, le gouvernement, disons. »
Pour nous Catholiques, ce que nous croyons ne peut être distingué de notre manière d’agir. La croyance façonne la manière d’être. Le Christ a promis le salut à ceux qui croient en Lui, et croire en Lui implique de suivre Ses commandements et d’aimer les autres de tout cœur, ce qui n’est rendu possible que par les enseignements et la grâce sacramentelle avec la médiation de l’Eglise.
Des actions du gouvernement, de la société ou autres facteurs externes, forçant les catholiques à aller contre l’ordre créé par Dieu, peu importe combien ces actions peuvent sembler mineures, ne peuvent être qu’inacceptables, car elles contredisent et bloquent notre raison même de vivre : la recherche de l’union avec Dieu.
À Washington, dans les Assemblées des États, dans les tribunaux, la défense de la liberté de religion devrait suivre le chemin montré par nos évêques: rappeler l’obligation de liberté de religion pour la santé de nos concitoyens et de notre Nation.
Mais rappelons-nous que, au sein de nos églises, cette bataille est beaucoup plus que politique. C’est un combat pour protéger notre chemin vers Dieu, « qui désire que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tim, 2 :4). C’est le but de la liberté religieuse, une cause pour laquelle nous pouvons même mourir afin de vivre éternellement.
David G. Bonagura Jr, professeur adjoint de théologie au Séminaire de l’Immaculée Conception à Huntington, N.Y.
Illustration : dollar américain (détail), In God we trust : Notre foi est en Dieu
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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/religious-freedom-the-bigger-picture.html
Pour aller plus loin :
- Affaire Ulrich KOCH contre Allemagne : la Cour franchit une nouvelle étape dans la création d’un droit individuel au suicide assisté.
- CEDH : Une régression de la liberté de conscience et de religion en Europe.
- Le jour où mourut la liberté de religion.
- Manifestations et menaces pour la liberté de réunion, la liberté des médias et la liberté d'expression
- Objections de conscience et liberté religieuse