Le déficit du budget de l’Etat représente la différence entre les dépenses publiques et les recettes fiscales. A ce déficit s’ajoute celui de la sécurité sociale. Pour 2009, le déficit du budget devrait atteindre 76 milliards d’euros, le plan de relance ayant accru de plus de dix milliards le déficit prévu dans le projet de loi de finances, tandis que le déficit de la sécurité sociale, initialement prévu à 10,5 milliards, augmentera fortement en raison de la chute des recettes : 5 à 10 milliards de plus selon les experts. Le déficit public total serait donc supérieur à 90 milliards, soit entre 4 et 5% du PIB. Nous serons largement en dehors des limites autorisées par les traités européens (Maastricht en particulier), soit 3% du PIB.
Là n’est pas l’essentiel. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’un déficit signifie qu’une partie des dépenses publiques est financée par des emprunts émis par l’Etat. L’argent ne tombe pas du ciel, et il y a toujours quelqu’un qui paie ; dans le cas d’un déficit, c’est un paiement à crédit, rendu possible par des emprunts. Comme l’épargne n’est pas extensible à l’infini, ces emprunts viennent diminuer l’épargne disponible pour financer les entreprises : on dit que les dépenses publiques ainsi financées viennent évincer des investissements privés qui n’auront pas lieu faute de financement suffisant (« Effet d’éviction »). Comme l’épargne nationale ne suffit pas, une grande partie de la dette publique est financée par l’étranger (62% !), nous mettant en situation de dépendance.
Le problème, c’est que ce n’est pas la première année que nous sommes en déficit et que nous empruntons. Le dernier budget de l’Etat équilibré remonte en France à 1974 : cela fait donc 35 ans que l’Etat vit à crédit. Résultat : la dette publique explose à son tour, dépassant largement les 1 200 milliards d’euros, soit 20 000 euros à rembourser par Français : c’est le cadeau que chacun trouve dans son berceau en arrivant. En effet, il faudra bien un jour rembourser cette dette et il faut en attendant payer les intérêts.
Les seuls intérêts annuels représentent le second poste du budget de l’Etat, derrière l‘éducation et devant la défense, soit l’équivalent de la totalité de l’impôt sur le revenu. Quant au capital lui-même, pour l’instant on le rembourse quand il arrive à l’échéance en effectuant de nouveaux emprunts, ce qui s’appelle dans le privé de la cavalerie et conduit en général un dirigeant d‘entreprise en prison. Mais il faudra bien un jour finir par rembourser vraiment, ce qui se traduira par des hausses d’impôts. Autrement dit, accepter un déficit, surtout durable comme le nôtre, c’est demander à la génération future de payer nos dépenses actuelles.
Il y a peu, Nicolas Sarkozy avait déclaré « Transmettre à nos enfants la facture de nos dépenses de santé et de retraite, c’est profondément immoral ». En effet, car ce sont les dépenses de fonctionnement qui sont ainsi financés. La génération suivante nous reprochera un jour d’avoir ainsi sacrifié l’avenir. En 1774, Turgot conseillait déjà à Louis XVI de « réduire la dépense au niveau de la recette » faute de quoi on courrait à la banqueroute, ce qui s’est produit quelques années plus tard. Nous n’en avons tiré aucune leçon. « La France est en faillite » avait déclaré François Fillon il y a un an. Cela n’a pas empêché la fuite en avant de se poursuivre.
Jean-Yves Naudet