Jean Li Sen Lie - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Jean Li Sen Lie

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Un grand homme est mort. Discrètement. Humblement. Comme il a vécu. Pas de gros titres dans les quotidiens. Pas d’annonce à la radio. Jean Li Sen Lie s’est éteint, à 93 ans, le 23 mars dernier à Sannois en banlieue parisienne où il a passé presque toute sa vie.

Pas de tristesse dans nos cœurs. Mais seulement l’espérance. Grande. à sa mesure. Jean Li Sen Lie était en effet un homme d’espérance. Une espérance qu’il avait placée d’abord en Dieu. Jean Li Sen Lie était un chrétien. Mais aussi en l‘homme, en l’homme en devenir, à savoir l’enfant. Jean Li Sen Lie était un humaniste.

J’ai eu la grande chance de le connaître. Il fut mon patron aux éditions Fleurus. Mais il était plus qu’un patron. Il était un homme donné. À son entreprise, certes. Et Dieu sait si cela ne fut pas facile. La jalousie de certains, l’incompréhension des autres et l’idéologie de tous, ont tué l’entreprise. Ils ont préféré la voir disparaître que de se reconnaître incompétents à la gérer.

Jean Li Sen Lie en a souffert. Pas pour lui. Mais précisément pour ces enfants lecteurs qui avaient été toute sa vie depuis sa jeunesse quand, en 1938, il se lance dans la grande aventure des patronages aux côtés de l’abbé Rollet, vicaire à Sannois. C’est lui qui lui fera découvrir la supériorité de l’esprit communautaire sur le communisme qui entrait déjà à pas feutrés dans l’Église. Et c’est à cette époque aussi qu’il découvre Emmanuel Mounier qui restera pour lui un phare.

C’est cet esprit qui lui permettra de tenir pendant la guerre. Recruté pour le STO il s’évade par deux fois. Il sera alors envoyé en Allemagne près de Dortmund où, clin d’œil de la Providence, en tant qu’infirmier il se verra accoucheur de prisonnières russes.

Mais Jean Li Sen lie était un homme donné tout court. à sa famille, à ses amis.
Je l’ai connu à un moment crucial de sa vie. Au moment où touché, blessé, l’homme ne s’est pas effondré.

À la mort de son fils, le 28 mai 1985, lors d’un appontage sur le porte-avions Clemenceau, il s’est senti anéanti : « Cela m’a détruit », confiait-il jusqu’aux derniers jours. Mais il a su vivre.

Car Jean Li Sen Lie n’avait qu’un but : aimer. Lors du dernier entretien que j’avais eu avec lui (FC n° 3306, 11 mai 2012) il avait voulu terminer sur ce programme pour le jeune homme de 90 ans qu’il était alors : « Il faut aimer l’amour. »

Que dire aussi de ce qui faisait son charme, lui le Sino-Périgourdin comme il aimait se qualifier. Lui qui n’a jamais mis les pieds en Chine, la portait pourtant dans son cœur. Il portait surtout son grand-père, le mandarin Li Sen Lie, qui une fois envoyé en France par l’Empereur n’a jamais pu retourner dans son pays. Il lui a fallu s’adapter sans rien perdre de ce qui faisait son être profond. Son petit-fils l’a suivi sur ses traces.

« Le Chinois ressent combien il est lié aux grands éléments de la nature. Tout cela est une harmonie. En tant que Chinois je me contente d’être bien, en tant que chrétien je ne me contente pas d’être heureux ici et maintenant. Je suis pétri des deux cultures. Je suis lié aux hommes qui ont eu une grande foi et le petit-fils d’un homme qui n’avait pas la connaissance de Dieu. Une des phrases de mon grand-père qui m’a peut-être le plus marqué a été celle qu’il a prononcée sur son lit de mort après qu’il se fut converti au christianisme : « Cela a été la plus grande erreur de ma vie. Mes ancêtres ne me pardonnent pas. » »

Aujourd’hui, Jean Li Sen Lie a unifié tout cela. Il a rejoint Yvonne, son épouse et Marc, son fils, officier pilote. Il est entré dans l’éternelle jeunesse de Dieu.
Merci Jean, pour tout ce que vous avez fait et surtout pour tout ce que vous avez été.


La cérémonie religieuse aura lieu le vendredi 27 mars à 15 heures en l’église Saint-Pierre Saint-Paul de Sannois.

Ni fleurs ni couronnes. Dons à la Ligue nationale contre le Cancer et Les Apprentis d’Auteuil.