Heisenberg (1901-1976) La rupture du cadre positiviste - France Catholique
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Heisenberg (1901-1976) La rupture du cadre positiviste

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(Extrait de « Physique et philosophie », Page 263)

Le 19ème siècle mit au point un cadre extrêmement rigide pour les sciences de la nature, cadre qui forma non seulement la science, mais aussi le point de vue général des grandes masses populaires. Ce cadre prenait appui sur les concepts fondamentaux de la physique classique, l’espace, le temps, la matière et la causalité ; le concept de réalité s’appliquait aux choses et aux phénomènes que nous pouvons percevoir par nos sens ou qui peuvent être observés au moyen des instruments perfectionnés que la technique avait fournis. La matière était la réalité primordiale et le progrès scientifique était dépeint comme une croisade de conquête du monde matériel. L’utilité était le mot d’ordre de l’époque.

D’autre part, ce cadre était si rigide et si étroit qu’il était difficile d’y découvrir une place pour les nombreux concepts de notre langage qui avaient toujours appartenu à sa substance même, par exemple le concept d’esprit, d’âme humaine ou de vie. L’esprit ne pouvait être introduit dans le schéma général que comme une sorte de miroir du monde matériel ; et quand on étudiait les propriétés de ce miroir à l’aide de la psychologie, les scientifiques étaient toujours tentés – si j’ose pousser la comparaison jusque là – d’accorder davantage d’attention à ses propriétés mécaniques qu’à ses propriétés optiques. Mais même là, on essayait d’appliquer les concepts de physique classique et en premier lieu celui de causalité. De la même manière, la vie devait s’expliquer comme processus physico-chimique gouverné par les lois naturelles et complètement déterminé par la causalité. Le concept darwinien d’évolution fournissait d’amples preuves étayant cette interprétation. Il était particulièrement difficile de trouver dans ce cadre de la place pour les secteurs de la réalité qui avaient été l’objet de la religion traditionnelle et qui semblaient maintenant plus ou moins imaginaires ; dans les pays européens, où l’on avait l’habitude de pousser les idées jusqu’à leurs extrêmes, il se développa donc une hostilité ouverte de la science envers la religion ; et même dans les autres pays, il y eut tendance croissante à l’indifférence envers de telles questions ; seules les valeurs morales de la religion chrétienne firent exception à cette tendance, tout au moins temporairement. La confiance dans la méthode scientifique et la pensée rationnelle remplaça toutes les autres sauvegardes de l’esprit humain.

On peut dire que le changement le plus important dû aux résultats de la physique moderne, c’est d’avoir brisé ce cadre rigide de concepts du 19ème siècle.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Werner_Heisenberg

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Extrait de

D’un chanoine à l’autre – De Copernic à Lemaître Des « Somnambules » parlent aux veilleurs

Par André Girard

238 pages, 18,50 euros (11,10 au format PDF)

http://www.edilivre.com/d-un-chanoine-a-l-autre-de-copernic-a-lemaitre-20cf04801d.html#.VUHrNdrtlBc

ISBN : 9782332851994