La tempête Xynthia, en provenance d’Espagne, vient de toucher durement l’Ouest de la France avant de s’éloigner vers l’Allemagne. Elle laisse derrière elle un cortège de désolation, avec 53 morts dénombrés à ce jour dont 29 pour le seul département de la Vendée dont la Côte des Fleurs a été totalement submergée par les eaux.
Cette épisode intervient un an après la tempête Klaus qui avait ravagé une partie de la forêt landaise et dix ans après les terribles tempêtes (en fait des ouragans) Lothar et Martin qui avaient balayé une partie de la France, faisant une centaine de mort. En fait, les tempêtes sont fréquentes en hiver dans les zones tempérées (on en dénombre en France une quinzaine par an, pour la plupart aux conséquences négligeables) en raison des fortes dépressions atmosphériques intervenant à cette saison. Les météorologues savent de mieux en mieux prédirent ces manifestations (pour la tempête qui vient de se produire, Météo France avait en effet lancé depuis plusieurs jours un bulletin d’alerte) et en expliquer les raisons immédiates.
Dans le cas présent, la tempête s’est formée lorsque des vents froids d’altitude très puissants, appelés jets steams, sont entrés en contact avec une masse d’air chaud située en basse couche au milieu de l’Atlantique, la différence de température entre les deux masses d’air ayant ainsi généré un énorme tourbillon ou dépression. La brutalité de Xynthia vient de la conjonction de l’événement avec de forts coefficients de marée.
Mais, au-delà de cette explication, beaucoup s’interrogent, pour ce qui leur semble constituer une multiplication doublée d’une aggravation de ce type de phénomènes, s’il n’existe pas des causes plus profondes qui pourraient être recherchées du côté du réchauffement climatique. Interrogé à ce sujet il y a quelques années, Jean Jouzel, actuel co-président du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC), faisait remarquer que les statistiques ne confirment pas une fréquence plus grande des tempêtes depuis ces dernières années. Il ne reconnaissait pas davantage de lien direct entre tempête et réchauffement climatique car, même si l’augmentation du climat entraîne un accroissement de la vapeur d’eau dans l’atmosphère de nature à engendrer un temps plus instable, cet accroissement est contrecarré par le fait que la différence de température entre les tropiques et les régions tempérées, qui gouverne également les tempêtes, est en diminution par le fait même que le réchauffement climatique affecte davantage les hautes latitudes.
L’activité humaine, souvent montrée du doigt comme cause du réchauffement climatique, pourrait ainsi être relaxée du chef d’accusation d’être à l’origine des tempêtes. En revanche, il n’est pas sûr qu’elle puisse être ainsi dédouanée s’agissant de leur conséquence. L’importance du nombre des victimes comme de celui des dégâts enregistrés dans ce genre d’événements vient du fait que la population vit en plus grand nombre et de plus en plus près du bord de la mer. S’il n’est pas anormal que les zones inondables soient, à un moment ou un autre, inondées, il n’est pas normal, a contrario, que ces zones puissent être déclarées constructibles et qu’elles soient habitées ou bien encore, qu’elles fassent l’objet d’une occupation humaine sans autorisation mais aussi sans contrôle.
S’il n’est pas certain que les conséquences dramatiques de la tempête Xynthia soient à rechercher de ce côté-là, on sait ce qu’il en a été de la terrible inondation qui a affecté la Louisiane en 2005 et on se souvient des polémiques qui ont fait suite à la crue de l’Ouvèze en 1992. Il en est donc avec la nature comme dans les relations sociales : quelles que soient nos attirances et nos préférences, il faut savoir garder ses distances.
Fabrice de CHANCEUIL