De bande en gang - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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De bande en gang

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Les policiers des Yvelines enquêtent sur une agression commise le 18 avril par une dizaine de jeunes gens avec viol collectif et vol de la victime : une lycéenne de 18 ans. Les faits se sont produits au petit matin, dans un train de banlieue, entre Poissy et les Mureaux. Le 14 avril, à Paris, un garçon de 17 ans originaire d’Aulnay-sous-Bois a succombé à des blessures au couteau à la suite d’une bagarre avec un groupe adverse à proximité de la gare de Lyon. À l’origine du meurtre, un échange de moqueries entre une trentaine de jeunes gens qui revenaient de l’Essonne et quatre autres qui s’amusaient avec un Velib’. La chute du cycliste a provoqué la bagarre.
Le 4 avril, la France avait assisté à un incendie délibéré dans un quartier défavorisé de Strasbourg, en marge d’un sommet de l’Otan puis aux brutalités de manifestants corses, protestant contre la condamnation d’Yvan Colonna, faisant une dizaine de blessés chez les policiers.
Du côté de l’Éducation nationale, on reste traumatisé par l’expédition punitive qu’une vingtaine d’agresseurs encagoulés ont conduite le 10 mars dans un lycée de Gagny (Seine-Saint-Denis) à l’aide de bâtons, de barres de fer et de couteaux.

Sans toujours prendre de proportions aussi spectaculaires, les incidents se multiplient. Dans l’inconscient collectif, les groupes de jeunes sont assimilés à une menace toujours prête à surgir. Et les jeunes gens eux-mêmes ont de bonnes raisons de se craindre dès qu’ils n’appartiennent pas au groupe qu’ils croisent. Ainsi, des scouts sont parfois molestés dans les transports en commun voire à proximité de leurs lieux de campement. Leurs uniformes les font-ils assimiler aux forces de l’ordre honnies ?
Au ministère de l’Intérieur, on reconnaît que les statistiques des affrontements explosent, dont les trois quarts opposent désormais des protagonistes armés. L’Île-de-France est en pointe, mais la Province suit comme l’atteste la rixe qui vient d’opposer des jeunes de quartiers « concurrents » de Montbrison et Andrézieux-Bouthéon (Loire) aboutissant à une dizaine d’interpellations. Rivalité amoureuse, conflit sportif, différend ethnique, ou simple antagonisme de territoire, les occasions d’en découdre se multiplient au point qu’on parle de violence gratuite.

Le Président de la Ré­publique s’est emparé du sujet, proposant le 21 avril un nouvel arsenal répressif. Nicolas Sarkozy veut notamment sanctionner l’appartenance à une bande violente, chargeant le député-maire de Nice Christian Estrosi de rédiger en ce sens une proposition de loi. Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur, a quant à elle rédigé un décret pour sanctionner le fait de manifester le visage masqué. Par ailleurs, l’intrusion dans les établissements scolaires sera punie d’un an de prison et 7500 euros d’amende.

Auteur du livre Les bandes, de l’ « entre-soi adolescent » à l’ « autre ennemi » Michel Fize reconnaît un « rajeunissement des comportements violents en bande » (dès 12-13 ans), leur « féminisation », et leur « radicalisation » en violence « disproportionnée ». Autre évolution, la participation aux bandes semble plus pérenne. Pour autant, le sociologue refuse d’amalgamer la notion de bande, inhérente à l’adolescence, à celle de violence, qui traduirait davantage un mal-être profond. Il préconise un « Grenelle des vio­­lences urbaines », estimant que c’est « le dialogue avec les jeunes » qui fait le plus défaut. Insistant sur les « causes scolaires et économiques du mal », il pointe le déficit d’expression orale et écrite dont souffrent ceux qui ont une « image dégradée » d’eux-mêmes.

Manque sans doute au constat l’essentiel : l’effacement des repères éducatifs dans un hexagone où plus de la moitié des enfants naissent hors mariage. Avec la déresponsabilisation et l’errance des pères se profile une culture matriarcale qui peine à endiguer la violence adolescente.