« Mourir martyr, c’est porter du fruit » - France Catholique
Edit Template
Van Eyxk, l'art de la dévotion
Edit Template

« Mourir martyr, c’est porter du fruit »

Quelle est la spécificité du martyre chrétien ? Pourquoi peut-on parler de sa fécondité ? L’éclairage du Père Maroun Badr, prêtre libanais, vicaire à la cathédrale de Fréjus (Var), délégué diocésain à l’Œuvre d’Orient et auteur de L’Acte du martyre.

Fête de la Croix glorieuse

Copier le lien
Cette icône, peinte par l’artiste égypto-américain Antoun Rezk, représente les 21 Coptes assassinés le 15 février 2015, sur une plage en Libye par l’État islamique.

Cette icône, peinte par l’artiste égypto-américain Antoun Rezk, représente les 21 Coptes assassinés le 15 février 2015, sur une plage en Libye par l’État islamique.

MARTYRS MODERNES.

L’utilisation du mot « martyr » n’est-elle pas galvaudée de nos jours ? Père Maroun Badr : Tout d’abord, le mot « martyr » d’origine grecque signifie « témoin de Dieu » et plus largement il désigne une personne mise à mort violemment pour avoir refusé d’abjurer sa foi ou sa religion. Une précision s’avère importante pour distinguer le martyre chrétien des autres martyres, notamment musulmans. On qualifie ainsi de martyr le kamikaze qui meurt en faisant mourir les autres, afin d’imposer une idéologie. Le chrétien subit lui la mort parce qu’il est témoin, au sens propre du terme « martyr », et est persécuté pour sa foi : il accepte de mourir pour l’amour de Dieu. Je considère que tous les chrétiens persécutés à cause de la foi et morts par amour de Dieu et du prochain sont des martyrs, que l’Église les proclame d’une façon officielle ou pas ! C’est terriblement d’actualité pour bien des chrétiens dans le monde. Notamment les chrétiens d’Orient. Vous dites dans votre ouvrage que la joie, le pardon et la paix sont les fruits de la charité dans le martyre. Comment la joie est-elle possible malgré la cruauté des bourreaux ? Qui peut trouver la joie dans la mort ? Ce n’est pas humain. Seul celui qui a la grâce sanctifiante reçue lors de notre baptême peut le faire. La grâce est le don de Dieu qui élève notre nature humaine à un ordre surnaturel pour accueillir la vie même de Dieu. C’est la grâce qui nous confère les vertus, qu’elles soient morales ou théologales. En ce qui concerne le martyre, on peut ainsi parler principalement des vertus de force, de foi et de charité, comme le fait saint Thomas d’Aquin, sur lequel je m’appuie dans mon livre. La charité a pour objet Dieu Lui-même, à travers la vie surnaturelle qu’Il nous communique par sa grâce. Tout tourne donc autour de la charité. On peut dire que l’acte du martyre est l’achèvement d’une relation amoureuse entre Dieu et l’homme. Sinon, la mort de ces martyrs n’aurait aucun sens : elle serait inutile et dévastatrice… Le martyr donne parfois le sentiment d’être résigné en allant au supplice. Comment comprendre cette attitude ? Le martyr est charitable, mais il ne se tait pas. Il n’est pas résigné ! Un chrétien ne peut pas ne pas réagir. Il doit se défendre. Le Christ lui-même a réagi à plusieurs reprises face à ses persécuteurs : à celui qui l’a frappé chez Caïphe (Jn 18, 22), Il a demandé : « Pourquoi me frappes-tu ? » Le chrétien est appelé à défendre sa vie, mais jamais en attaquant les autres. Et quand il ne peut plus, il s’appuie sur la force que Dieu lui donne, sur le secours même de Dieu afin de supporter le supplice en ne renonçant pas à sa foi. Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le magazine.
—  maroun_badr_martyrs.jpgPère Maroun Badr, L’Acte du martyre. Cause, motif et moralité selon saint Thomas d’Aquin. Docteur angélique, 237 pages, 18 €.