Les apparitions et la direction des actes humains - France Catholique
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Les apparitions et la direction des actes humains

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© Fred De Noyelle / Godong

Alors que l’Église commémore aujourd’hui les apparitions de sainte Bernadette à Lourdes, voici quelques réflexions sur de tels phénomènes. Certains chrétiens non catholiques expriment leur inquiétude quant à l’implication catholique dans des visions ou des apparitions. Alors que l’Église est en fait extrêmement circonspecte pour accepter la validité de toute nouvelle vision ou apparition, elle croit aussi que « rien n’est impossible à Dieu » (Lc 1, 37) et ne rejette donc pas catégoriquement la possibilité d’événements spirituels spéciaux, comme le font certains chrétiens. Si Dieu pouvait se révéler ou envoyer des intermédiaires dans l’Ancien et le Nouveau Testament (même après la Résurrection du Seigneur), pourquoi cela serait-il hors de question aujourd’hui ?

Toutes les apparitions approuvées par l’Église (qu’elles soient de Notre-Seigneur à sainte Marguerite-Marie ou de la Sainte Vierge à Lourdes ou à Fatima) ont une similitude de thème remarquable : il n’y a pas de nouvelle révélation mais une réaffirmation du cœur du message évangélique : « Réformez vos vies et croyez en l’Évangile ! » (Mc 1, 15) Ce n’est ni plus ni moins que le message de la plupart des prédicateurs « croyants en la Bible ».

Quel est le but de telles apparitions ?  On pourrait dire qu’elles doivent servir d’« appels au réveil » du Ciel. La parabole du vigneron (voir Mt 21, 33-41) me vient à l’esprit à cet égard. Jésus dit que le propriétaire de la vigne envoie constamment des messagers qui sont ignorés et même maltraités. La logique divine conclut alors qu’ils tiendront compte de l’alter ego du propriétaire – son propre fils.

Comme Dieu appelle le monde à la conversion puis à l’entretien dans la sainteté, il offre une myriade d’aides : l’Église ; les Saintes Écritures; les sacrements; l’exemple des personnes saintes, vivantes et mortes. Mais le témoignage de l’histoire est que trop souvent le monde est sourd à ces ouvertures divines. Et donc, dans l’équivalent d’une dernière tentative (humainement parlant), Dieu fait des interventions directes de manière extraordinaire, approchant l’humanité personnellement ou par des intermédiaires célestes (anges, Notre-Dame, autres saints) et choisissant des individus pour recevoir Ses avertissements (ou consolations).

Ces personnes, à leur tour, sont obligées de partager le message qu’elles ont reçu avec le reste de l’Église ou même avec le monde entier. Dans la Somme théologique, saint Thomas d’Aquin le résume bien :

En ce qui concerne la direction des actes humains, la révélation prophétique variait non pas selon le cours du temps, mais selon les circonstances, car comme il est écrit (Proverbes 29:18), « Quand la prophétie échouera, le peuple sera dispersé à l’étranger ». C’est pourquoi, à tout moment, les hommes ont été divinement instruits sur ce qu’ils devaient faire, selon qu’il était opportun pour le bien-être spirituel des élus. Non pas pour la déclaration d’une nouvelle doctrine de la foi, mais pour la direction des actes humains. ( II, II, Q. 174, art. 6)

Alors que l’Église a une attitude prudente envers les miracles et les apparitions, il est bon de réaliser que chaque pape moderne a ressenti le besoin de se faire lui-même un « pèlerin marial ».  Le premier voyage de saint Jean XXIII en dehors du Vatican, après son élection, a été au sanctuaire de Notre-Dame de Lorette.  Saint Jean-Paul II n’a jamais manqué une occasion de visiter un sanctuaire marial et de s’y recommander aux soins maternels de Notre-Dame.

Ce que ces papes semblent dire par leurs actions, c’est que, dans leur rôle de Successeur de Pierre et de Vicaire du Christ sur la terre, ils veulent amener toute l’Église à Marie, Mère de l’Église, en particulier dans les lieux qu’elle a honorés de sa présence d’une manière particulière. Ainsi, alors que la crédulité aveugle et irréfléchie des visions et des apparitions doit être évitée à tout prix, un scepticisme grossier né d’un rationalisme excessif doit également être évité. Ici, nous nous rappelons la sagesse de cette phrase que nous trouvons dans le film préféré de tous les temps, Le Cantique de Bernadette : « Pour ceux qui croient en Dieu, aucune explication n’est nécessaire. Pour ceux qui ne croient pas en Dieu, aucune explication n’est possible. »

À la suite de l’apparition de la Sainte Mère à Guadalupe, le sacrifice humain a cessé au Mexique et tout un peuple est entré dans la communion de l’Église. Lourdes est le site le plus connu de guérisons miraculeuses de l’histoire. La Vierge à Fatima a lancé un appel clair à la repentance et à la réparation, qui fourniraient les conditions nécessaires à la paix dans le monde. Dans chaque cas, Notre-Dame a assumé le manteau prophétique en tant que porte-parole de Dieu et a simplement répété sa directive aux intendants du vin à Cana: « Faites tout ce qu’il vous dit. » (Jn 2, 5)

Le cardinal Newman, comme beaucoup de convertis, a eu une longue rangée à biner avant d’en venir à une appréciation de la doctrine et de la dévotion mariales, mais une fois qu’il l’a fait, il en est venu à des idées profondes, poignantes et même touchantes.  En voici trois :

Je me souviens d’une phrase parmi d’autres de mon confesseur, un père jésuite, l’un des hommes les plus saints et les plus prudents que j’ai jamais connus. Il a dit que nous ne pourrions pas trop aimer la Sainte Vierge, si nous aimions notre Seigneur beaucoup plus. (Diff. I, 21)

Au fur et à mesure que ces idées de sa sainteté et de sa dignité [marie] pénétraient progressivement l’esprit de la chrétienté, de même celle de son pouvoir d’intercession les suivait de près et avec elles. (Diff. II, 73)

Ceci est simplement le point sur lequel j’insisterai – discutable en effet par des étrangers de l’Église, mais le plus clair pour ses enfants – que les gloires de Marie sont pour l’amour de Jésus ; et que nous la louions et la bénissions comme la première des créatures, afin que nous puissions le confesser comme notre seul Créateur. (« Sur les gloires de Marie » (Discours XVII), Mix., 344)

Puissions-nous toujours aimer Jésus « beaucoup plus ».