Les JMJ vues de Mars - France Catholique

Les JMJ vues de Mars

Les JMJ vues de Mars

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La couverture médiatique – ou plutôt l’absence de couverture – des JMJ de Madrid au cours du week-end pourrait aisément susciter la colère. Plusieurs commentateurs, catholiques et non-catholiques, ont relevé l’évident préjugé qui a consisté à simplement ignorer un phénomène contemporain remarquable : 1,5 million de jeunes du monde entier sont venus prier et partager avec le pape et les uns avec les autres, au cœur de l’Europe sécularisée. Mais, après tout, cette ignorance a peut-être été préférable à d’autres alternatives.

En effet, quand on a parlé de l’événement, ce fut pour le situer par rapport aux divisions politiques internes à l’Espagne et pour mettre en regard quelques milliers de manifestants protestataires avec un nombre deux cents fois plus élevé de participants. Une première analyse erronée avait mélangé le coût des JMJ – estimé à 70 millions de dollars, couvert en grande partie par les participants et des donateurs privés – et la cure d’austérité subie par l’Espagne pour faire face à la situation économique.

Les Catholiques dépendant comme tout un chacun des chaînes d’information généralistes, quelques prêtres furent induits à regretter le tort prétendument causé aux pauvres en Espagne. Des organisateurs des JMJ furent contraints de justifier l’événement par les retombées financières nettes pour l’Espagne, ce que firent aussi les représentants du gouvernement.

En réalité, toutes ces informations tiraient leur origine d’une seule et même dépêche de l’agence Associated Press (AP), reproduite en tout ou partie. Les agences d’information rencontrent certes des contraintes budgétaires mais l’affectation des ressources en dit long sur leurs priorités. En dehors de la dépêche d’AP, il y eut très peu de choses en anglais.

Ceci reflète la vieille habitude de ne pas affecter aux questions religieuses des journalistes compétents ou bien informés. Un compte rendu mensonger de femmes qui ayant avorté auraient reçu l’absolution lors des JMJ, au lieu d’être excommuniées, a fait boule de neige. L’histoire semblait accréditer l’idée que ces femmes avaient été excommuniées en confession et non automatiquement du fait de leur acte – une faute élémentaire qui aurait dû valoir au journaliste d’être licencié ou transféré à un autre département.
Une autre « perle » entendue sur NYC (New York Channel) fut que le pape célébrerait en Espagne « le signe de la Croix ». Il s’agissait bien sûr du « chemin de Croix » -qui n’est pas pour les catholiques une « célébration». On aurait pu supposer que, dans notre nation éteinte qui autrefois fut chrétienne, il était resté un ou deux Catholiques demeurés cachés quelque part dans un recoin des studios du média new-yorkais pour corriger cette légère erreur.

Nous sommes au creux de l’été. Le président et le Congrès sont en vacances jusqu’au début septembre. Les rédacteurs, qui sont à la recherche de sujets pour boucher les trous, auraient pu trouver dans les JMJ matière à papiers humainement intéressants et inhabituels. Or, en se baladant à travers les média, on s’aperçoit que les sujets retenus viennent des origines les plus inattendues.

Nous savons tous que les élites les plus évoluées, les plus intelligentes, croient que le christianisme est rétrograde et à bout de souffle. Les mêmes fins analystes de tendances font leur beurre de ce qu’ils croient être les premiers – quoiqu’ils ne le soient pas tout à fait – à identifier les croisades progressistes à venir.

Même en sachant cela, on ne peut pas ne pas trouver un peu étrange que, par exemple, le « Washington Post » n’ait manifesté aucun intérêt pour les JMJ mais publiait un éditorial dans sa page mode sous le titre : « les homosexuels égyptiens dopés par le soulèvement.» Sans rire. Chacun déplore la façon dont les homosexuels sont traités dans le monde musulman, mais le printemps arabe s’étendra-t-il aux homosexuels ? On peut parier qu’il n’en sera rien ni maintenant ni à vue humaine.

Le naguère si prestigieux « New York Times », dont le triste déclin a été décrit par William McGowan dans « La chute de la dame en gris » (« Gray Lady Down »), n’a pas hésité, dimanche, jour de clôture des JMJ, à consacrer une pleine page aux difficultés et aux frais que les transsexuels ont à supporter pour obtenir des formes. Dans le supplément dominical, une autre pleine page regrette que « les bordels d’Istanbul ne sont plus ce qu’ils étaient. »

A la décharge du NY Times, quoiqu’il n’y eût rien sur les JMJ dans mon exemplaire, il y avait bien un compte rendu sur son site internet. Il y avait aussi dans les pages du journal un reportage sur la disparition des religieuses comme directrices dans les hôpitaux catholiques, les religieuses étant une espèce menacée d’extinction – au moins dans les congrégations anciennes.

Laissons notre imagination divaguer : un Martien, qui aurait atterri sur notre planète ce week-end, pourrait penser, à la lecture de ces informations, que notre culture a déraillé à tel point que nous sommes ou pétrifiés ou résignés. Nous ne prêtons pas attention à la principale religion occidentale qui est probablement destinée à survivre et à influencer les gens dans l’avenir prévisible, et nous nous escrimons à rechercher des histoires politiquement correctes qui sont déjà dépassées avant d’être publiées.

Indépendamment des JMJ, il y a bien d‘autres événements dans l’Europe sécularisée dignes d’attirer l’attention d’un public blasé par les histoires d’homosexuels égyptiens et d’ennuis financiers des transsexuels.
Par exemple, au cours des dix dernières années, 1,5 million de pèlerins se sont rendus à Compostelle à partir de nombreux pays. Chaque année, plusieurs milliers de personnes célèbrent la fête de Cyrille et Méthode dans la petite ville slovaque de Levoca, pour ne rien dire des foules de Fatima, Lourdes, Knock ou Czestochowa.

Il y a là matière pour un scoop. Tous ces gens font partie d’une minorité marginalisée et socialement méprisée que des journalistes intelligents et possédant une vision générale ne devraient pas ignorer.