Le Purgatoire - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Le Purgatoire

Atteindre la sainteté de Dieu- ce qui pourrait bien être le but de l’univers – demande que l’on parcoure un long et dur chemin.
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Il y a quelques années, j’ai suggéré qu’il existait une forte ressemblance entre l’idée catholique du purgatoire et l’idée hindoue de la réincarnation plus le karma. En un sens, ce sont deux variétés de la même idée de base: le voyage de cette vie à l’union avec le divin est long, pour presque tous d’entre nous, même après la mort.

En réponse à ma suggestion, un savant dominicain a soutenu que j’avais tout à fait tort; qu’il y a peu ou pas de similitude entre l’idée catholique et l’idée hindoue. Par respect pour mes supérieurs théologiques (je considère les Dominicains comme mes supérieurs en théologie depuis que j’ai été formé par eux à l’Université de la Providence il y a bien longtemps), j’ai abandonné la comparaison et n’y ai plus pensé.

Apparemment, cependant, j’y ai pensé, au moins dans les régions subconscientes de mon esprit; car cette idée a récemment refait son apparition et m’a semblé mériter d’être poursuivie, puisque de nombreux Occidentaux sont disposés à entretenir des idées venant de l’Est, tout en écartant presque automatiquement les enseignements de leurs propres traditions religieuses. Combien de nos contemporains, même catholiques, pensent au Purgatoire de nos jours ?

La différence la plus évidente entre les deux idées est que les hindous croient que nous vivons notre prochaine vie ici même sur la planète Terre, alors que les catholiques pensent que notre prochaine vie sera menée ailleurs – même s’il n’est pas du tout clair où se trouve cet «ailleurs». Le purgatoire n’est ni ce monde présent ni la plénitude et la transcendance du ciel. Ce que c’est et où il se trouve – en supposant que de telles catégories s’appliquent à un tel royaume intermédiaire – est discuté, et le sera probablement toujours, parmi des théologiens tout à fait respectables.

Les Hindous croient en outre que l’âme individuelle existait avant la vie actuelle, c’est-à-dire que nous vivions dans un autre corps avant de vivre dans notre corps actuel. Et nous vivions dans un autre corps avant celui-là. Ainsi de suite. Les catholiques ne croient pas en la préexistence. Nous croyons que notre âme a été créée individuellement et miraculeusement par Dieu au moment où notre corps a commencé à la suite d’une reproduction naturelle. (Certains catholiques « intelligents » – plus intelligents que moi – soutiennent que notre vie actuelle fait partie du Purgatoire.)

L’objection évidente à la notion que nous avons vécu avant cette vie est que nous n’avons aucun souvenir d’une vie antérieure. Mais les croyants en la réincarnation répondent que même si nous n’avons probablement pas de souvenirs conscients d’une vie antérieure, nous pouvons avoir des souvenirs inconscients qui contribuent à façonner nos attitudes actuelles. De plus, n’est-il pas possible que certains talents innés – le type de talents qui sont les plus évidents chez des génies tels que Shakespeare, Newton et Mozart – aient été acquis dans une vie antérieure?

La réfutation de ce point de vue dépasse le cadre du présent article, mais ce sur quoi les hindous et les catholiques s’accordent – chose souvent négligée dans les discussions sur les différentes religions – est que, bien qu’il puisse y avoir un petit nombre d’exceptions, l’être humain ordinaire n’est pas prêt, n’est pas digne, au moment de la mort, de passer immédiatement à un état de béatitude ultime, à un état d’union avec la Divinité. Une longue période de purification sera nécessaire avant que cela ne soit accompli.

Dans le passé, les catholiques ont souvent considéré le Purgatoire comme un lieu de simple punition, un lieu où nous souffrons pour les péchés que nous avons commis. Mais le Catéchisme de l’Église catholique en parle, non pas comme d’un lieu de simple punition, mais comme d’un lieu de purification. (CCC, 1030-32)

La douleur et la souffrance peuvent certes être un élément essentiel de la purification, mais il en va de même de la croissance – croissance en bonté, croissance en sainteté. Nous devrions penser alors au Purgatoire comme à un lieu d’amélioration, un lieu de croissance spirituelle. Quand, après cent ans, ou mille ans ou un million d’années, nous sommes devenus suffisamment bons et saints, nous pouvons alors, mais pas avant, rejoindre la vision béatifique.

Les protestants présentent généralement deux objections à l’idée catholique du Purgatoire. Premièrement, ils disent qu’elle n’est pas scripturaire. Bien qu’elle semble clairement impliquée dans 2 Maccabées 12:46, où il est recommandé de prier pour les morts «afin qu’ils soient libérés de leurs péchés». Les protestants regardent généralement les livres des Maccabées comme apocryphes, non bibliques. Mais si nous considérons ces deux livres comme bibliques, comme le fait l’Église catholique, le purgatoire repose alors sur une solide base scripturaire.

Deuxièmement, les protestants ne voient pas le besoin d’expier nos péchés post mortem puisque Jésus les a expiés pleinement par sa souffrance et sa mort. On n’a pas besoin de prier pour les morts, car au moment de la mort, nous allons immédiatement soit au paradis, où nous n’avons pas besoin de prières, soit en enfer, où elles ne nous feront aucun bien.

D’où un phénomène qui semble étrange aux catholiques: quand la mort a lieu, le bon protestant prie, non pas pour le défunt, mais pour ses amis et sa famille, personnes vivantes qui souffrent de cette mort.

Si nous regardons le purgatoire non pas comme un lieu de simple punition (un pénitencier), mais comme un lieu de croissance spirituelle (de réformation), cette objection protestante est satisfaite. Mais la question de savoir si l’âme est prête à entrer au Ciel demeure.

Il existe, bien sûr, de profondes différences entre les idées hindoues et catholiques, et pas seulement au sujet de la vie après la mort. Mais je pense que le karma et le purgatoire sont des concepts connexes d’anciennes traditions spirituelles qui s’éclairent mutuellement. Je pense en particulier que les catholiques en ce moment de notre histoire peuvent mieux comprendre le purgatoire en considérant que, comme dans d’autres traditions, il offre une vision beaucoup plus riche de notre vie spirituelle, même après la mort, que les suppositions superficielles que nous trouvons dans notre monde post-moderne.

Atteindre à la bonté et à la sainteté divines – ce qui pourrait bien être le but de l’univers (cela pourrait être l’« événement divin lointain vers lequel se dirige toute la création») – nécessite que nous parcourions un long et pénible chemin. Pas de raccourcis protestants.

Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/05/17/purgatory/


Image : Le purgatoire, Canto 29 de William Blake, c. 1825 [The Tate, Londres]. Béatrice s’adressant à Dante depuis la « voiture » est l’une des 100 aquarelles que Blake a peintes au lit durant une maladie. » C’est Béatrice qui s’est arrangée pour que Virgile guide Dante à travers les enfers et le purgatoire et elle le salue quand il arrive au paradis.