Impossible d'échapper à l'histoire - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Impossible d’échapper à l’histoire

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Comment échapper à l’histoire ? C’est proprement impossible. Nous sommes des êtres façonnés par elle. Et ce n’est sûrement pas notre christianisme qui nous persuadera de nous passer d’elle. Toute notre foi est liée à l’existence d’une personne historique appelée Jésus. Et Jésus lui-même s’inscrit dans l’histoire du peuple juif, sans lequel son message est littéralement incompréhensible. Le père de Lubac, au début de son grand livre sur Origène, appelé précisément Histoire et Esprit, se réfère à un unique verset de l’Épître aux Hébreux, qui résume tout : « Le Christ s’est montré une seule fois dans le cours des âges, pour abolir le péché par son sacrifice. » La Semaine sainte que nous vivons peut se résumer en ce seul verset qui nous renvoie à l’historicité de la Rédemption. La fondation de l’eucharistie, rappelée le Jeudi saint, la condamnation à mort et la mort sur la Croix rappelées le Vendredi saint, la Résurrection du Seigneur fêtée dans la nuit de Pâques sont des événements temporels, dont la véracité détermine notre adhésion au Credo.

On me pardonnera de passer brutalement de cette histoire sainte à l’histoire telle qu’elle est invoquée par nos politiques, singulièrement par nos candidats à l’élection présidentielle. C’est que la politique elle-même est entièrement structurée par la mémoire du passé. Et l’invocation de ce passé ne donne pas seulement sa couleur à une orientation intellectuelle, elle lui donne sa substance. Certains s’en émeuvent et crient à l’instrumentalisation. Il est vrai aussi que ce peut être la cause de déchirements infinis. On le voit bien avec la querelle autour de la responsabilité française dans la tragédie du Vel d’Hiv. Mais ce genre de querelle est inévitable. N’en déplaise à ceux qui, par progressisme forcené, voudraient nous rendre amnésiques. Comme si les progressismes n’étaient pas eux-mêmes tributaires d’une philosophie de l’histoire.

Et ce n’est pas régresser que se référer à ce qui a tissé la substance de notre être collectif. Hannah Arendt affirmait que le passé, loin de nous tirer vers l’arrière, nous pousse en avant, il est une force d’inspiration, loin d’être un étouffoir. Ce sont les Talibans qui font exploser les traces de notre patrimoine, et c’est bien pourquoi ils sont les plus régressifs des régressifs.

Chronique diffusée sur radio Notre-Dame le 12 avril 2017.