« La France a toujours eu des rapports très étroits avec le Saint-Siège  » - France Catholique
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La France à Rome
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« La France a toujours eu des rapports très étroits avec le Saint-Siège  »

À l’occasion de la solennité des saints Pierre et Paul, fêtés le 29 juin, France Catholique met en lumière les liens qui unissent la France à Rome. Entretien avec S.E. Madame Florence Mangin, ambassadrice de France près le Saint-Siège.
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© Kelly Yelenaodintsova / pexels

© ADFADSS Alessia Calzecchi

Quelle est l’importance de la présence française auprès du Saint-Siège, et quels en sont les enjeux ?

Florence Mangin : Cette ambassade est l’une des plus anciennes représentations diplomatiques françaises : un ambassadeur français permanent est présent à Rome, auprès du Pape, depuis 1470 – outre les ambassades ponctuelles, auparavant. La France a donc toujours eu des rapports très étroits avec le Saint-Siège, en particulier lorsque les ambassadeurs étaient cardinaux. L’histoire de nos relations est très riche, avec des moments de proximité, et parfois de fortes tensions : souvenons-nous de la rupture des relations diplomatiques entre 1905 et 1921… Je m’inscris donc dans un héritage très important. Aujourd’hui, il y a moins de Français ayant de grandes responsabilités à la Curie que dans le passé, mais beaucoup y travaillent à des niveaux intermédiaires, ce qui permet de préparer l’avenir.

Quels sont les liens de l’ambassade avec le personnel français de la Curie ?

Je les reçois plusieurs fois par an, pour la cérémonie des vœux en début d’année, le 14 juillet, et pour tous les événements culturels que nous organisons à la villa Bonaparte. Et ils sont bien sûr invités également aux deux messes que nous organisons – fait caractéristique pour un État laïc – chaque année pour la France [fin mai, pour la Sainte-Pétronille, à la basilique Saint-Pierre, dans la chapelle qui porte son nom, et le 13 décembre, « pour la prospérité de la France », à la basilique Saint-Jean-du-Latran, NDLR]. C’est une manière de valoriser et de s’ancrer dans une histoire qui nous précède, en ayant un moment de partage et de prière en commun. Les deux messes sont très appréciées, également par d’autres membres du corps diplomatique d’autres pays. C’est un très beau moment, qui a beaucoup de sens aujourd’hui.

De quelle manière vivez-vous la laïcité dans vos relations avec le Vatican ?

Le Saint-Père est un chef d’État et un chef religieux. Il est le seul à être ainsi les deux à la fois. Notre ambassade a un rôle à jouer auprès de ces deux aspects de la vie du Saint-Siège. Nous partageons avec la Secrétairerie d’État et le Saint-Père de nombreux sujets internationaux, d’autant plus qu’en raison de l’histoire, la France et le Saint-Siège ont des intérêts communs en de nombreux pays : la Terre sainte, le Liban, l’Afrique… Après trois ans à ce poste, je vis la laïcité comme un élément de liberté : représenter un État laïc me permet de recevoir tout le monde, croyants ou non, avec le même intérêt. Le fait que la France soit un État laïc ne gêne aucunement nos relations avec la Curie. C’est une notion très sensible en France, mais qui ne pose ici aucun problème.

Quelle place la culture tient-elle dans la diplomatie, notamment à l’occasion de cette année jubilaire ?

La culture et les arts font vraiment partie de notre diplomatie. Avec le Centre culturel français Saint-Louis et la fondation des Pieux Établissements à Rome et à Lorette, nous avons monté un programme très important pour cette année jubilaire, afin d’offrir le maximum de manifestations artistiques et culturelles. Nous organisons notamment une série de prestigieux concerts dans les églises françaises, qui sont ensuite donnés, le lendemain, dans un lieu éloigné de la culture : hôpital, prison, centre pour personnes âgées…

Jacques Maritain, l’un de vos prédécesseurs, a fondé le Centre Saint-Louis pour développer la culture française à Rome. Comment cette mission se poursuit-elle ?

Jacques Maritain a créé le Centre Saint-Louis en 1945, afin qu’il soit un centre d’étude et de recherche, en lien avec les universités pontificales, mais cela s’était perdu avec le temps. Depuis un an, nous avons donc relancé une série de grandes conférences, sur des figures de premier plan qui permettent de lier la pensée catholique française et universelle à Rome. Nous avons organisé des colloques sur Maritain, saint Thomas d’Aquin et saint Bonaventure… Ce centre a donc deux jambes : le centre d’études, qui fait le lien entre la pensée catholique française, les universités pontificales et la Curie. Et le centre culturel français classique qui organise, par exemple le festival du cinéma francophone, pour un public plus large.