3097-Téléthon, à prendre ou à laisser - France Catholique
Edit Template
Padre Pio, ses photos inédites
Edit Template

3097-Téléthon, à prendre ou à laisser

Copier le lien

La polémique autour de l’édition 2006 du Téléthon s’est éteinte.
En position de force, l’AFM a choisi d’ignorer la demande de certains évêques de reconnaître aux donateurs un droit à l’objection de conscience.

Pas de bourrasque mé­­­diatique cette année, mais une tempête mé­téorologique que les organisateurs du 21e Téléthon rendent responsables de la baisse des dons : 96,2 millions d’euros de promesses contre 101 en 2006. Il n’est donc pas resté grand-chose des éclats de voix qui retentissaient avant l’édition 2006. Plusieurs évêques avaient contesté certaines pra­tiques de l’AFM contraires au respect de la vie : promotion du diagnostic préimplantatoire (tri sélectif des embryons) et re­cherche sur les embryons dont l’association était devenue pilote. Mais le record des dons avait été battu.
Les grandes institutions publiques ou privées qui soutenaient l’événement n’ont pas démissionné et certains mouvements catholiques comme les scouts et guides de France en sont même restés partenaires of­ficiels.
Un sondage Ifop commandité par l’Alliance pour les Droits de la Vie a, depuis, montré que 54% des Français étaient favorables au « fléchage » des dons. Il garantirait aux donateurs qui le dé­sirent que leur argent ne soit pas utilisé contre leur conscience. L’AFM a persisté dans une fin de non-recevoir, sa présidente rétorquant : « la mise en place d’un tel système a un coût non négligeable (…) mais surtout ce sont les malades et les familles de l’AFM qui décident de notre stratégie et de notre politique. »

L’évêque de Metz, ville organisatrice, Mgr Pierre Raffin, a donc refusé de prêter ses lieux de culte, le cardinal Vingt-Trois soutenant cette prise de position au motif que le Téléthon n’est pas confessionnel. Même s’ils savent l’opinion publique aveuglée par l’émotion, plusieurs évêques ont ainsi maintenu leurs réserves : « Nous ne pouvons que nous sentir soli­daires de la tragédie que vivent les familles et les enfants mar­qués par (…) la myopathie » déclarait Mgr Dominique Rey, de Toulon, en marge de la dernière assemblée plénière des évêques de France, tout en défendant : « le principe non négociable du respect de la vie de l’enfant à naître ». Mgr Pierre d’Ornellas, chargé du groupe de travail des évêques sur les questions bio­éthiques, appuyait cette orientation : « La recherche est (…) bonne quand elle vise une thérapie. Mais la fin ne justifie pas les moyens ». Et l’arche­vêque de Rennes de conclure que s’« ils sont libres d’exercer leur générosité là où ils veulent [les catholiques] ont aussi le devoir d’éclairer leur conscience. Il faut qu’ils donnent là où ils estiment que les moyens mis en œuvre ne violent pas le commandement : ‘Tu ne tueras pas’ ».

Certes, la proportion des dons affectés à des recherches contestées est finalement assez faible (environ 2% selon l’AFM). « Mais c’est avec de petits glissements que commencent les grandes dé­rives », avertissait Mgr Raffin sur Radio-Notre-Dame. Certes, de nombreux pa­­tients bénéficient d’aides pré­cieuses grâce à l’AFM, et les progrès des diagnostics effectués avec ses moyens ont déjà été fantastiques. Mais les résultats thérapeutiques ont été décevants et surtout le soutien à ce qu’il fait bien nommer l’eugénisme anténatal par les associations qui affirment lutter contre des maladies contribue à faire basculer notre système de santé dans une logique d’exclusion des êtres humains déjà conçus mais porteurs de handicap.
Sortant du mutisme après l’édition 2006 du Téléthon, le professeur Didier Sicard, pré­sident du Comité consultatif national d’éthique, l’a re­­connu il y a quelques mois : « la France est l’un des pays qui flirte le plus avec l’eugénisme ».

D’autres éminents spécialistes de la bioéthique ont salué la cohérence des mises-en-garde ecclésiales, à l’image du journaliste du Monde, Jean-Yves Nau, ou d’Emmanuel Hirsch, de l’espace éthique des hôpitaux de Paris, estimant que l’Église avait « libéré la parole ». La stratégie du tout thérapie génique, dans laquelle l’AFM a persisté ces dernières années est désormais critiquée. On peut compter sur les doigts d’une main les résultats dont bénéficieront les victimes de quelques-unes des 7 000 maladies rares (qui touchent chacune moins d’une personne sur 2 000). D’autres moyens thérapeutiques négligés semblent plus efficients, comme la recherche sur les cellules souches du cordon ombilical, pri­vée des financements qu’elle mérite. Pour certains, les toutes nouvelles découvertes sur la capacité de « rajeunissement » des cellules adultes rendent d’ailleurs obsolètes la recherche sur l’embryon que finance l’AFM et le clonage qu’elle réclame.
Au-delà de cette controverse sur sa stratégie scientifique, de nouvelles voix ont remis en cause notre « dérive eugéniste ». Le professeur Jacques Testard a alerté contre l’explosion du tri embryonnaire dont l’AFM est précurseur : on l’utilise désormais pour certains cancers et on en parle pour la maladie d’Alzheimer. Paradoxalement, le rêve d’un illusoire « homme parfait » pourrait bien éliminer des écrans cathodiques les enfants malades qu’on montre pour inciter à donner…

Le scé­nariste Nicolas Jour­net qui souffre du syndrome Mar­fan vient de lancer, dans son livre Génétiquement incorrect (Ed. Danger public), un cri inédit, revendiquant son droit à l’« impureté génétique ». Il affirme refuser pour ses propres enfants le diagnostic préimplan­tatoire. Et cela, sans épouser la doctrine de l’Eglise puisque, écrit-t-il : « Le Téléthon me donne autant d’urticaire que l’épiscopat catholique ».