Mémoire et Paix - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Mémoire et Paix

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« Le Paraclet, le Saint Esprit

Vous enseignera tout

Et vous rappellera tout ce que je vous ai dit.

Je vous laisse ma Paix, je vous donne ma Paix. »

Nous avons tous besoin d’aide pour nous souvenir. Oublier un rendez-vous, une date limite ou un anniversaire nous embarrassent, quand ce n’est pas un désastre professionnel ou personnel. Alors, nous inventons toutes sortes de techniques et de stratagèmes pour nous aider à nous souvenir. Les ficelles au doigt d’oncle Billy, les notes collées partout, la dernière app pour vous sonner au bon moment – tous nous parlent de notre besoin de rappels.
Si la perte de la mémoire est néfaste dans la vie ordinaire, elle est mortelle dans la vie spirituelle. Les Israélites nous apprennent à quel point elle est mortelle. Ils oubliaient tout le temps ce que le Seigneur avait fait pour eux. – comment Il les avait délivrés de l’esclavage, nourris miraculeusement, comment Il avait déraciné des nations devant eux, et comment Il leur avait donné la Terre Promise. Les psaumes se désolent de leur manque de mémoire et les prophètes les réprimandent à ce sujet. Ruine et exil furent le salaire de ce manque de mémoire.

Mais ce défaut spirituel vient de plus loin que les Israëlites. Nous pouvons comprendre le péché de nos premiers parents à travers ce prisme de l’oubli. Leur rébellion a commencé non pas par un acte déformé de la volonté ou même par un orgueil intellectuel, mais par un oubli de Dieu. Ils ont oublié les commandements et les promesses de Dieu. Par-dessus tout, ils ont oublié sa bonté. C’est ce qui a permis au serpent d’introduire le doute et la défiance  : « Dieu a-t-Il vraiment dit : ‘Tu ne mangeras d’aucun fruit du jardin ?’ » (Gen. 3 :1).

Notre nature humaine déchue souffre de cette blessure de l’oubli ; nos péchés suivent le même schéma. En général, ce n’est pas que nous gardons Dieu fermement à l’esprit mais que nous choisissons de nous opposer à Lui malgré tout. C’est plutôt que nous ne parvenons pas à Le garder à l’esprit du tout. Nous vivons comme s’Il n’existait pas –nous prions à certains moments (peut-être), mais nous L’oublions le reste du temps. Ou, plus probablement, nous oublions qu’Il est bon.

Nous n’avons plus confiance dans ses bontés passées (parce que nous avons oublié de L’en remercier) et notre capacité à Lui faire confiance s’en va aussi. Ce manque de mémoire nous rend fragiles devant les tentations du monde, de la chair et du diable. C’est pourquoi ce trio impie veut tellement que nous continuions à oublier.

Naturellement, une telle perte de mémoire mène aussi à l’anxiété. Dans l’ordre naturel, nous devenons anxieux quand nous oublions quelque chose. D’autant plus dans l’ordre surnaturel, quand nous oublions notre origine et notre fin divines. En effet, rien ne nous prive de paix comme d’oublier Dieu, étant voués à nous regarder nous-mêmes et notre monde sans Lui.
Sans le Créateur, la créature disparaît. (CCC 49). Nous sentons que c’est la vérité. Si nous ne nous souvenons pas de Lui, nous devenons anxieux à notre propre sujet. D’où le commandement des Ecritures souvent répété : Souviens-toi.

« Le Paraclet, le Saint Esprit, que le Père enverra en mon nom, vous enseignera tout et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. » (Jean 14 :26) Jésus nous donne le Saint Esprit précisément pour nous aider à nous souvenir. L’Esprit nous rappellera (ou fera revenir à notre mémoire) ce que le Christ nous a enseigné.

Maintenant, il semble, peut-être, que la simple tâche de nous rappeler les choses, d’être le Divin Rappel, soit trop insignifiante pour le Saint Esprit. Mais son rôle convient parfaitement à notre faiblesse. Vivre selon l’Esprit signifie avoir toujours à la mémoire, se rappeler toujours les paroles de Dieu, ses actes et sa bonté.

La mémoire essaie toujours de rendre présent un fait passé. Nous accrochons des photos, racontons des histoires, chantons des chansons et érigeons des monuments, dans le but de rendre l’événement ou la personne en quelque sorte présent pour nous ici et maintenant. Et ce faisant, de nous apporter à nous-mêmes une certaine mesure de paix. Le Seigneur nous accorde le Saint Esprit justement pour accomplir ce souvenir – mais des choses extraordinaires, pas ordinaires (cela ne vous aidera pas à trouver les clefs de votre voiture). Le Saint Esprit rend le Christ Lui-même présent et efficace. Il rappelle en nous les paroles de notre seigneur et nous permet de penser, parler et agir en accord avec elles dans tous les cas.

C’est cela qui donne la paix : l’Esprit qui rappelle le Seigneur à notre souvenir. C’est pourquoi notre Seigneur parle immédiatement de paix : « Je vous laisse la paix ; je vous donne ma paix. » (Jean 14 :27) Le souvenir du Christ nous apporte l’assurance de Sa présence et de son pouvoir pour nous sauver. Ses paroles de paix sont présentes et efficaces : Je vous ai appelés amis… Dans le monde vous avez des tribulations; mais prenez courage, j’ai vaincu le monde…Je suis avec vous pour toujours…

La plus grande tâche du Saint Esprit – Son plus grand « rappel » – est la Messe, le sacrifice commémoratif. A ce moment plus puissant qu’aucun autre Il apporte quelque chose à nos souvenirs –Il rend présent le passé. Car la Messe n’est pas une simple réminiscence, elle rend présents le Corps, le Sang, l’Ame et la Divinité du Christ sous la forme du pain et du vin. Le Saint Esprit nous rend le sacrifice du Christ présent et réel. Ce que la mémoire humaine essaie faiblement d’accomplir – rendre présent le passé – le Saint Esprit le fait magistralement à chaque Messe.

Et cela est source de paix. C’est pourquoi notre Mère l’Eglise place les paroles de paix du Seigneur après la Consécration, après la Prière Eucharistique, quand la Victime vivante est sur l’autel.C’est le sacrifice commémoratif – rendant présent cet événement passé, salvateur – qui seul est source de paix.
Image : La Première Eucharistie par Juan de Juanes, c.1562 (Musée du Prado, Madrid).


Source : https://www.thecatholicthing.org/2016/05/01/remembrance-and-peace/

Tableau : La Première Eucharistie par Juan de Juanes, c. 1562 [Museo del Prado, Madrid]

Le père Paul Scalia est un prêtre du Diocèse d’Arlington, Virginie. Il est délégué de l’évêque pour le Clergé.