Jean-Marie Vianney et la Croix - France Catholique

Jean-Marie Vianney et la Croix

Jean-Marie Vianney et la Croix

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Dans sa biographie de St. Jean-Marie Vianney l’Abbé Alfred Monnin, contemporain du saint homme, remarquait qu’il était non seulement agressé par des démons, mais aussi par des humains bons par ailleurs, collègues du clergé. À Monnin lui demandant s’il en était troublé, il répondait: « c’est la Croix qui donne la paix au monde, c’est la Croix qui devrait apaiser nos cœurs. Toutes nos misères sont dues à un manque d’amour pour la Croix. C’est la peur du fardeau de la Croix qui l’alourdit.»

La spiritualité du Saint était toute centrée sur le commandement du Christ : « portez votrd croix.» Son allié spirituel Saint Augustin avait développé cette spiritualité bien avant dans un sermon : « Son commandement n’est en réalité ni difficile, ni douloureux, puisque Lui-même nous aide à suivre ses commandements.» St. Augustin reliait cet engagement au Psaume 17 – 4 « à la façon des hommes, la parole de tes lèvres, moi, je l’ai gardée.»

Jean-Marie Vianney concluait en lui-même « qu’une croix portée en toute simplicité, sans réactions d’amour-propre qui accentue la souffrance, n’est plus une croix.» En portant sa croix, on est confronté à différentes tensions spirituelles. l’obstacle majeur est ce qu’il appelle l’amour-propre. Toute trace d’égoïsme dans son rapport à Dieu par la souffrance endurée accentue cette souffrance et fait obstacle à notre participation aux douleurs du Christ endurées pour les autres. Cet égoïsme empêche notre totale adhésion à Jésus Christ car il pèse dessus. Revenons à St. Augustin : « ils ne doivent pas présumer de leurs propres forces.»

Celui qui tente de lutter contre les malheurs par le simple pouvoir de sa volonté passe de nos jours pour un admirable exemple. Pourtant il y a bien davantage dans l’enseignement à tirer de ce genre de combat contre l’adversité à l’exemple de Vianney ou d’Augustin et, bien sûr, de Jésus au cours de leurs vies. Cette lutte est l’aboutissement de notre dépendance envers Dieu. On ne peut écarter Dieu de manière à combattre seul l’adversité et faire ainsi preuve de sa propre force dans le monde. Ceci signifie donc que nous sommes en permanence immergés dans cette réalité que Jésus est un personnage historiquement réel, à qui les Écritures portent témoignage, que nous montre l’enseignemenr catholique, illuminant par Sa présence la vie propre de l’Église.

C’est tout notre rapport avec le Christ. Vianney déclarait tout net : « Rien ne nous rapproche tant de notre Seigneur que de porter une part de Sa Croix.» Ce « Rien » ne laisse pas beaucoup de place au reste. C’est un peu comme les paroles de Job dans l’Ancien Testament : « Si nous accueillons le bonheur comme un don de Dieu, comment ne pas accepter de même le malheur?» (Jb 2-10). C’est là que Vianney reconnaissait l’étendue de nos rapports avec Dieu. Ainsi, le Catholicisme n’est pas une simple religion de rite et de morale. Il implique à la fois le bien et le mal, et la solution — signe de la qualité dans la relation — réside dans notre réaction au bien comme au mal.

Vianney poursuivait : « Je ne comprends pas comment un chrétien peut prendre peur et fuir devant la Croix. N’est-ce pas en même temps fuir devant Celui qui nous sauvait en se faisant clouer sur elle et en y mourant par amour pour nous?» C’est le nœud de la question. De plus, ceux qui vivent la vie de la Croix, tels Saint François d’Assise, par exemple, ont parfois été en fait — physiquement — marqués de l’empreinte de la Croix, les stigmates.
Abordant différemment la question de la souffrance, Vianney disait un jour : « si nous pouvions passer une semaine au Paradis nous mesurerions ce que vaut cette période de souffrance.» L’ultime et authentique but de toute l’existence est le Paradis. Un bien est une miette de Paradis, Un mal est un bout de chemin en plus vers le Paradis.

Revenant sur les gens qui faisaient souffrir Vianney, Monnin ajoute : « Il prenait ces humiliations pour une autre raison. Elles le soulageaient de la perpétuelle crainte de vanité qui le harcelait en raison des compliments qu’on lui adressait généralement.» Ce n’est pas pour rien que vanité et hypocrisie sont citées fréquemment dans les Évangiles.

Prendre l’apparence d’un dévot,, ou même se dire dévot, et mener une existence contraire à l’Évangile, tel était le piège identifié par Vianney lui-même, ce qui lui faisait accepter les critiques. « Au moins, je ne trompe pas tout le monde. Certains m’estiment à ma juste valeur, ô combien je devrais leur en être reconnaissant! Ils m’aideront à me connaître moi-même.»

Homme plein d’humilité, il pouvait au moins voir que certaines calomnies et certains dénigrements avaient une raison d’être.Les véritables saints ont parfois une lueur sur leur véritable position devant Dieu, et ces éclairages peuvent provenir de leur entourage plutôt que d’une vision surnaturelle.
Alors, un xonseil de St. Augustin : « debout, soyez solide, supportez, tolérez les retards, vous aurez ainsi porté votre Croix.»

11 janvier 2015.

Source : http://www.thecatholicthing.org/2015/01/11/john-vianney-and-the-cross/

Photo : Saint Jean-Marie Vianney, statue sculptée par Émilien Cabuchet (1867).

N.D.T. : citations bibliques, texte français de la Bible de Jérusalem.