Le Goulag de l’île de Goli Otok en Croatie est à vendre : fermé en 1989 après avoir servi de bagne pendant quarante ans au régime communiste fondé par le maréchal Tito en ex-Yougoslavie, il aurait servi à enfermer et à condamner à des travaux forcés particulièrement durs plusieurs catégories d’opposants, depuis des Russes et des partisans de Staline rejeté par le dictateur de Belgrade dès 1947, jusqu’à des dissidents chrétiens ou patriotes réfractaires au marxisme officiel. On y travaillait notamment dans des carrières à l’extraction de pierres servant de matériau de construction pour les demeures luxueuses de la nomenklatura locale, en portant des charges d’un poids écrasant. Ce camp de concentration aura vu défiler des milliers de détenus politiques, puis des condamnés de droit commun, en attendant de voir arriver… des centaines de touristes souvent occidentaux, déambulant entre les anciennes baraques, les ateliers abandonnés, les bennes roulantes et les slogans quelque peu surréalistes de la propagande titiste…
Devenu indépendant de Belgrade depuis l’éclatement de la Yougoslavie postcommuniste, l’Etat croate a besoin de devises : il veut donc vendre cette île de moins de 5 kilomètres carrés… Mais les ONG de défense des droits de l’homme et des anciens détenus voulant sauvegarder la mémoire de ces lieux de douleur et de sacrifice veulent préserver la possibilité de créer un mémorial sur place. Qui l’emportera ? Le profit étatique ou la fidélité nationale au souvenir des martyrs ?
