Est-il raisonnable d’être aussi à contre-courant que je le suis ? (Il m’arrive de douter de moi plus encore que de mes contemporains.)
« Antimoderne », assurément, et j’assume d’un coup toutes mes stupidités : c’est ainsi que je me refuse à « la mort de Dieu », qui est comme le sceau du moderne que je vise. Également, je suis tout autant ‘désenvouté’ de ce Monde tel qu’il s’impose à nous, même si je constate qu’il est incapable de se débarrasser de la beauté, de l’enthousiasme, de l’ardent amour dont font preuve nombre de jeunes investis en lui afin de lui redonner vie. Je les admire et voudrais courir aussi vite qu’eux, ce qui ne m’est plus possible.
J’ai commencé par une parenthèse… je voulais en effet écrire d’abord sur la « renommée », qui porte aujourd’hui un ‘r’ majuscule : ce qui me semble osé, tant je vois de nullités proclamées par les trompettes enrouées du ‘chaubise’ bien plus qu’elle ne met en exergue d’authentiques splendeurs ; plus de fausses grandeurs que de mérites assurés ; bien plus de mauvais livres qu’il ne s’en produit de justes, de véridiques, de superbes, de grands, de porteurs de joie … et pourquoi pas de bonheur ?
Tout le talent du monde (abondant cependant) ne saurait compenser la misère ontologique répandue à larges déversements d’ordures sur chacun de nous, du berceau à la tombe. L’étrange, c’est que ce sont les « élites » de notre pays qui se chargent de cette mission culturelle capitale, est-il affirmé, dite, je ne sais pourquoi, de premier ordre, abandonnant sans complexe le meilleur de la Création aux amateurs de marges et de cachettes.
La nécessité ne dépend pas du hasard, même si tant et tant de jeunes se trouvent livrés à lui, qui pourtant n’existe pas : cet abandon au néant est, à mon sens, une infamie. Je le crie depuis toujours mais ma voix ne porte pas plus loin que moi.
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