Mgr Marc Aillet : « Nous avons perdu le sens du péché » - France Catholique
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L'incroyable histoire des chrétiens du Japon
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Mgr Marc Aillet : « Nous avons perdu le sens du péché »

Alors que s’est ouvert à Rome le synode sur l’Église, Mgr Marc Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron, rappelle que seule une profonde réforme intérieure, avec pour cap la sainteté, peut venir à bout des crises qui secouent l’institution.
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© Diocèse 64

Ordinations d’hommes mariés, place des femmes dans l’Église… Quel constat tirez-vous des discussions qui s’engagent à Rome pendant ce synode ?

Mgr Marc Aillet : La crise de l’Église s’inscrit dans une crise du sacerdoce qui découle d’une crise de la foi. Comme nous ne savons plus ce qu’est l’Église, elle devient une ONG, elle ne suscite donc plus de vocations et ses membres sont tentés de s’adapter aux évolutions du monde. Le synode est placé sous le signe de l’Esprit Saint et le pape François a dit que le moment le plus attendu était la prière. Je suis donc confiant quant à son déroulement, mais je suis plus circonspect sur ce qui relève de la préparation de ce rendez-vous ecclésial. Les synthèses remontées de tous les continents ne sont pas représentatives du peuple chrétien. En France, ceux qui veulent une réforme et portent un certain nombre de revendications plus ou moins contestables et qui sont les mêmes depuis plus de quarante ans, représentent à peine 10 % des catholiques de notre pays et sont plutôt âgés. À mon sens, les forces vives de l’Église d’aujourd’hui, en particulier les jeunes, ne se sont pas vraiment senties concernées par la préparation de ce synode. Rappelons tout de même que son thème est : « Pour une Église synodale : communion, participation et mission. » Qui dit mission dit annonce de l’Évangile au monde et depuis le concile tous les papes rappellent cette ambition. Pour Jean-Paul II, l’Église était « un mystère de communion missionnaire ». Or les thèmes mis sur la table lors de ce synode évoquent beaucoup de questions structurelles ou organisationnelles. À force de ressasser les revendications sur la question du célibat des prêtres qui serait intenable, sur la morale sexuelle qui serait rétrograde, sur la place des femmes qui seraient méprisées, on finirait par remettre en cause les fondements même de la foi. La nouvelle évangélisation lancée depuis le concile n’apparaît pas. Ce synode ne serait-il qu’un instrument de travail pour montrer que l’Église doit s’adapter au monde de notre temps ? Je ne l’espère pas.

Que pensez-vous de la déclaration du pape François sur la bénédiction d’unions homosexuelles, perçues comme une autorisation par la presse ?

Dans sa réponse aux dubia de quelques cardinaux, le pape François est très clair pour rappeler que le mariage est exclusivement l’union stable d’un homme et d’une femme ouverts à la vie et que toute bénédiction d’un couple homosexuel devra être évitée pour ne pas entretenir de confusion avec le mariage proprement dit. Il ajoute toutefois, en étendant son propos de manière plus générale à toutes sortes de situations, que la charité pastorale peut, moyennant un discernement face à des cas concrets qui ne peuvent être compris dans une norme absolue, permettre de bénir une ou plusieurs personnes, même si leur comportement contrevient objectivement à la morale, en considération de circonstances atténuantes. Sa réponse ne porte pas sur les actes homosexuels en eux-mêmes, dont on sait que le Magistère les considère comme « intrinsèquement désordonnés » (Catéchisme de l’Église catholique n. 2357). On peut donc se demander si la bénédiction de couples homosexuels, même dans certains cas, au nom de la charité pastorale, ne risque pas de prêter à confusion sur la moralité des actes homosexuels ? Sinon qu’en est-il des « actes intrinsèquement mauvais » qui appartiennent à l’enseignement constant de l’Église, rappelé solennellement par Jean-Paul II dans l’encyclique Veritatis splendor ?

Comment en sommes-nous arrivés là ?

Nous avons perdu le sens du péché en perdant le sens de la révélation que Dieu fait de lui-même à travers l’incarnation du Christ. L’homme de nos jours pense qu’il n’a plus besoin de Salut. Or, Jésus est venu dans le monde car l’homme s’est détourné de Dieu par le péché. Il est venu sauver l’homme blessé dans sa relation avec Dieu et avec les autres hommes. On ne peut pas parler de Jésus, de Dieu, de l’Église sans parler du Salut ! De nos jours, nous avons du mal à parler du péché et même de la Croix, sous prétexte que cela traumatise les gens ! Il est de bon ton de parler d’une façon consensuelle de la beauté de la création. Elle est belle bien sûr mais ce n’est pas pour autant que le monde est bon. Il est blessé par le péché. Dieu veut sauver tous les hommes mais il les appelle à la conversion car il ne les sauve pas sans eux.

Retrouvez l’entretien complet dans le magazine.