Dans Quel homme et quel Dieu, Maurice Zundel (1897-1975) développe une théologie de l’incarnation s’inspirant de la pensée des Pères de l’église : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme, c’est la vue de Dieu » (saint Irénée). Née d’une relation vivante avec Dieu et d’une communion fraternelle avec l’art, la science et la société, la pensée théologique de Zundel exprime, à travers une métaphysique de la relation et de l’amour, la vocation de l’homme. L’homme peut exister, s’il ne reste pas enfermé dans son donné préfabriqué et s’il consent à s’accomplir dans la ligne de la liberté intérieure que rend possible sa relation à Dieu au cœur de son activité humaine. Le cours qui sera présenté cherchera à donner une définition mystique de l’homme.
La théologie du Père Zundel ici présentée, traditionnelle dans la foi pure, mais pensée, ressentie et livrée dans un mode existentialiste et contemplatif, dans une expérience et un témoignage où il se révèle tout entier sans jamais parler de lui, est appelé à éclairer les chemins futurs de la spiritualité chrétienne. Cette pensée rejoint l’exigence missionnaire de l’église qui, depuis le Concile œcuménique de Vatican II, cherche à rejoindre l’homme moderne pour l’inviter à renouer avec le Christ, le Verbe de Dieu. Zundel sait que la sécularisation ne permet plus de comprendre l’existence de Dieu à partir des vérités dogmatiques. Il s’agit pour l’église de tenir compte de l’apport des sciences humaines, notamment de l’anthropologie et de la psychologie mais aussi de la métaphysique qui a été trop longtemps écartée du domaine théologique. Autrement dit, il est nécessaire de présenter Dieu en partant de l’homme intégral. La métaphysique nous invite à concevoir l’agir de l’homme ouvert sur l’Absolu. Il s’agit de considérer l’homme, tout l’homme, l’homme intégral afin de pouvoir rétablir ce contact avec ce qui lui est transcendant.
Dans cette optique, en 1967 le pape Paul VI avait explicitement fait référence à Maurice Zundel dans l’encyclique Populorum progressio lorsqu’il affirmait que le développement authentique de l’homme devait considérer la totalité de la personne dans chacune de ses dimensions. L’une de ces dimensions concernait la vie spirituelle ouverte aux défis du monde moderne. Sans la perspective d’une vie éternelle, le progrès humain demeure en ce monde privé de souffle. Il s’agit pour l’église de discerner les nouvelles exigences de l’évangélisation. Dans cette encyclique Paul VI en appelait à un humanisme plénier, à un développement intégral de tout l’homme et de tous les hommes selon l’approche qu’en faisait à l’époque Zundel dans plusieurs de ses ouvrages. Paul VI faisait explicitement référence à la pensée de Zundel lorsqu’il disait qu’il n’est d’humanisme vrai qu’ouvert à l’Absolu, dans la reconnaissance d’une vocation, qui donne l’idée vraie de la vie humaine. Loin d’être la norme dernière des valeurs, l’homme ne se réalise lui-même qu’en se dépassant. Selon le mot si juste de Pascal : l’homme passe infiniment l’homme. Plusieurs années après, en janvier 1972, le pape demande à Maurice Zundel de venir prêcher les Exercices spirituels au Vatican. Il lui demande d’exposer sa vision de l’homme dans le monde moderne. Zundel s’exécute avec joie et enthousiasme. Il voit dans l’invitation qui lui est faite la reconnaissance de l’église pour ses recherches sur l’homme et sur Dieu. Quel homme et quel Dieu reprendra l’intégralité des méditations présentées au Saint-Père lors de la Retraite au Vatican. Zundel eut soin de présenter Dieu uniquement dans la relation interpersonnelle avec l’humanité en marche. Tout ce que la théologie dogmatique enseigne admirablement devait pouvoir être assimilé et vécu dans la vérité de l’amour avec le Dieu intime et personnel qui siège dans le cœur de tout homme.
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Au Collège des Bernardins, 20, rue de Poissy, 75005 Paris, tél. : 01.53.10.74.44, le Père Patrice Sonnier (missionnaire Idente) donnera des cours à partir du 15 octobre (chaque vendredi [10h-11h30]), « Maurice Zundel : Quel homme et quel Dieu ? ». Et à partir du 4 mars 2011, « L’Eucharistie : don, mystère et source de vie ».