Charles Carroll by Thomas Sully (1834)
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Petite leçon d’histoire pour un 4 juillet. A la suite de la signature de la Déclaration d’Indépendance (ndt : le 4 juillet 1776), la grande majorité des Catholiques avait pris le parti des révolutionnaires, parce qu’ils se considéraient plus Américains que Britanniques. Selon l’éminent historien catholique Theodore Maynard, « ils avaient compris le génie de l’Amérique. Sans une hésitation, ils s’étaient mis du côté du Congrès. »
Les Catholiques américains se sont distingués pendant la guerre d’indépendance : John Barry est connu comme « le père de la Marine américaine » ; le général Stephen Moylan, à léEtat-major de George Washington, était l’officier catholique de plus haut rang.
Pour marquer son respect pour les catholiques servant dans l’armée, George Washington a aboli la fête fériée anti-romaine appelée « journée du Pape. » Dans son ordre du jour, il écrivait : « Le Commandant-en-Chef ayant été informé d’un projet de célébration de cette coutume ridicule et infantile consistant à brûler le Pape en effigie, il ne peut qu’exprimer sa surprise à l’idée qu’il existe dans cette armée des officiers et des soldats aussi dépourvus de bon sens pour ne pas voir le caractère déplacé d’un tel geste à ce moment précis où nous avons demandé et obtenu l’amitié et l’alliance du peuple canadien, que nous devons considérer comme notre frère dans la même cause – la défense de la liberté américaine. En cet instant, et dans ces circonstances, toute insulte à sa religion serait si monstrueuse qu’elle ne saurait être tolérée ni excusée ; au lieu d’insultes aussi déplacées, il est de notre devoir d’exprimer à nos frères des remerciements officiels et leur dire combien nous leur sommes redevables de leurs succès contre notre ennemi commun au Canada. »
Tout au long de la Révolution, ce furent les Tories américains (ndt loyalistes des Anglais) qui poursuivirent une stratégie « anti-papiste » afin de diviser les alliés et les patriotes catholiques d’une part, et les révolutionnaires protestants d’autre part. Mais, comme souvent au cours des guerres, les soldats américains développèrent un sentiment de tolérance à l’égard des hommes qui combattaient et mouraient à leurs côtés.
L’évêque John Carroll (cousin de Charles Carroll, qui fut l’un des signataires de la Déclaration d’Indépendance) fut stupéfait, lors d’un voyage à Boston, de la transformation des mentalités : «Il est merveilleux de rapporter les témoignages de courtoisie qui me furent prodigués dans cette cité où, il y a quelques années, un prêtre papiste était le plus grand monstre qu’ait jamais connu la création. Plusieurs personnes, y compris des responsables, m’ont avoué qu’il y a peu, elles auraient changé de trottoir plutôt que de croiser un catholique romain. L’horreur associée à l’idée papiste est inimaginable ; et elle augmentait chaque dimanche à la faveur des déformations véhiculées par leurs pasteurs. »
Lors de l’ultime combat de la guerre, la bataille de Yorktown, on estime que les catholiques représentaient 70% du total des forces américaines et françaises réunies. Selon l’historien jésuite Charles Metzger, « Personne ne peut nier que les catholiques américains ont contribué à la cause commune en proportion nettement supérieure à leur pourcentage dans la population totale. »
Avec la liberté étaient venues les responsabilités du pouvoir. Les catholiques eurent un impact sur la structure constitutionnelle de la jeune nation. Deux catholiques, Daniel Carroll (cousin de Charles) et Thomas FitzSimons de Pennsylvanie, ont figuré parmi les rédacteurs de la Constitution qui a promu la croyance que le pouvoir vient de Dieu et du peuple. John Adams en était d’accord : « Notre constitution, écrit-il, fut faite pour un peuple religieux et moral. Elle est totalement inadéquate pour tout autre. »
Les catholiques qui avaient pris le parti de la révolution dans l’espoir de réaliser leur objectif de liberté religieuse ne furent pas déçus du résultat final de l’Assemblée constituante. L’article Six permet aux catholiques d’avoir accès à l’administration : « Aucun critère religieux ne sera requis dans le recrutement à un emploi public dans les Etats-Unis. » Enfin, le premier amendement, ratifié en 1791, reprend la formulation de l’Acte de Tolérance du Maryland datant de 1649 qui garantissait aux catholiques l’égalité de traitement au sein d’une administration impartiale : « le Congrès ne fera aucune loi qui favorise l’établissement d’une religion, ou qui interdise son libre exercice. »
Sachant que les catholiques pourraient désormais professer leur foi librement et publiquement, Charles Carroll reconnaissait avec bonheur qu’il « était entré avec zèle dans la Révolution pour gagner la liberté à la fois religieuse et politique. »
Les chefs de l’Eglise catholique des Etats-Unis adressèrent à George Washington une lettre de félicitations pour son élection comme premier président américain : « Tant que notre pays gardera sa liberté et son indépendance, nous aurons un titre légitime à exiger de sa justice le respect de l’égalité des droits de citoyen au nom du sang versé sous vos yeux. »
Washington, dans sa réponse, protestait de sa foi dans l’égalité de tous et concluait par cet espoir « que tous nos concitoyens n’oublieront pas la participation patriotique que vous avez prise dans le succès de leur Révolution et l’établissement de leur gouvernement, non plus que l’aide substantielle reçue d’une nation qui professe le Catholicisme romain. »
C’était un bon début et un précédent qui méritait d’être rappelé dans ces temps troublés pour le catholicisme américain.
Bonne fête de l’Indépendance !
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/catholics-and-americas-founding.html