Le « symbole » de Nicée - France Catholique
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Le « symbole » de Nicée

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Icône montrant les évêques du concile de Nicée aux côtés de l'empereur Constantin, tenant anachroniquement le texte du « Symbole de Nicée-Constantinople ».

Une chose de la plus haute importance a pris place le 19 juin. Ce jour-là, en 325, dans la ville de Nicée (actuellement Iznik en Turquie), le premier concile mondial (ou œcuménique) a adopté un « symbole » qui exprime avec autorité l’antique foi chrétienne. C’était le premier symbole formulé par l’Église après le Symbole des Apôtres. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique explique brillamment cette terminologie peut-être peu familière :

Le mot grec symbolon désigne la moitié d’un objet brisé, par exemple un sceau présenté comme gage de reconnaissance. Les deux moitiés étaient présentées l’une en face de l’autre pour vérifier l’identité du porteur. Le symbole de la foi, alors, est un signe de reconnaissance et de communion entre les croyants. Symbolon signifie également un rassemblement, une collection ou un résumé. Un symbole de la foi est un résumé des principales vérités de la foi et de ce fait sert de premier et fondamental point de référence pour la catéchèse (n. 188).

Aujourd’hui est donc le 1700 ème anniversaire du Credo de Nicée. Pour mémoire voici l’original :

Nous croyons en un seul Dieu le Père Tout-puissant, créateur de toutes les choses visibles et invisibles.

Et en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, engendré par le Père, le fils unique, c’est à dire de la substance du Père (ek tês ousias tou Patro), Dieu né de Dieu, Lumière né de la Lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré, non pas créé, consubstantiel (homoousion) au Père, par qui tout a été créé au ciel et sur la terre, qui, pour nous les hommes et pour notre salut est descendu du ciel, a pris chair et a été fait homme, il a souffert et est ressuscité le troisième jour, est monté au ciel et reviendra pour juger les vivants et les morts.

Et dans le Saint Esprit.

Mais ceux qui disent : « il y a eu un temps où il n’existait pas », et « il n’existait pas avant d’avoir été créé » ou « il a été créé à partir de rien » ou «  il est d’une autre substance ou essence » ou « Le Fils de Dieu est une créature » ou « changeant » ou « modifiable » – ceux-là sont condamnés par la sainte Église Catholique et Apostolique.

Le Concile de Chalcédoine, en 451, a conservé une version plus étendue de ce Credo comme composée par les Pères du Concile de Constantinople en 381, laquelle affirmait de plus la divinité du Saint-Esprit. Cette version plus complète est celle utilisée à la messe le dimanche et est parfois appelée le Credo de Nicée-Constantinople.

L’anathème à la fin de la version originale, et également la clause qui apparemment a été retirée à Constantinople (« engendré… de la substance du Père ») rend parfaitement clair que ce Credo a été créé dans l’intention de rejeter l’enseignement d’Arius, qui devait finalement être forcé de l’énoncer clairement, à savoir que le Christ était simplement la plus haute créature mais n’était pas Dieu.

J’ai entendu dire que « les catholiques ne sont pas bons pour la célébration des anniversaires » et que de ce fait nous devrions faire tout un foin pour la commémoration du 1700 ème anniversaire du Concile de Nicée. Mais quel est le sens de tout ça ? S’il nous étions « bons pour la célébration des anniversaires », nous devrions célébrer Nicée en 2025, Éphèse en 2031, Constantinople en 2051, Trente en 2063, Vatican II en 2065 et Vatican I en 2070 – pour commencer. C’est idiot.

Cela semble également franchement anti-catholique. En 1925, le pape Pie XI était occupé à encourager la dévotion à Saint Jean-Marie Vianney et Sainte Thérèse de Lisieux, tous deux canonisés cette année-là. Nous sommes une Église vivante après tout. À l’inverse, les anglicans, ou plus précisément l’aile anglo-catholique de l’Église d’Angleterre (contre les préférences de l’aile évangélique) ont organisé à Westminster un grand rassemblement des clercs anglicans avec les patriarches des Églises d’Orient pour commémorer le 1600e anniversaire du Credo de Nicée.

Pour les anglo-catholiques, le rassemblement avait deux buts : amener ces patriarches à reconnaître la validité des ordres anglicans et préparer, ils l’espéraient, la réunion de la communion anglicane avec les Églises d’Orient, en vue de réaliser au moins la fusion de la Via Media que Newman avait abandonnée comme une simple rêverie pour une Église chrétienne. Les deux buts ont spectaculairement échoué. Sans surprise, aucune réunion similaire n’a été planifiée pour le 1700e anniversaire vu qu’entretemps la communion anglicane, amputée de son prestige dû à l’association avec l’Empire Britannique, s’est effondrée.

L’Église Catholique n’a pas besoin de retourner au temps du Concile de Nicée pour découvrir ses propres sources d’unité ou pour confectionner les bases d’une unité qui n’existe pas encore. Dans le cadre de relations œcuméniques, c’est vrai, le Credo de Nicée est pratique pour les catholiques comme affirmation de base de la foi chrétienne. Même ainsi, pour une étude et une réflexion commune, le Credo du Peuple de Dieu, de Paul VI, serait probablement un instrument plus fécond.

On pourrait aussi recommander fermement aux catholiques une étude approfondie de l’Arianisme et des réponses de Saint Athanase et du Concile. Une telle étude a formé Newman et tous ses enseignements caractéristiques.

Pour Newman, le Credo de Nicée était déjà un développement de la doctrine et un rempart contre l’opinion privée. Il fait remarquer dans son Histoire du Concile que Constantin et les ariens plaçaient la concorde au-dessus de la vérité – ils étaient « libéraux » – alors que Saint Athanase, qui voyait que l’unité de l’Église devait être basée sur la vérité, était tourné en dérision et mis au ban comme traditionaliste rigide.

Newman note que l’Arianisme a vraiment grandi en influence après le Concile. Pourquoi ? Parce que les ariens ont rapidement souscrit au Credo du Concile, si bien que Constantin a été convaincu qu’il avait raison dans son évaluation première, les ariens étaient le parti pacifique alors que les orthodoxes étaient inflexibles pour des futilités. Au final, les laïcs se sont portés volontaires pour sauver l’Église.

Et il se trouve une leçon pour nous dans l’œuvre de Newman sur les Ariens : « La maladie qui avait convoqué le Concile, au lieu d’être extirpée, a été rejetée sur l’Église et l’a affligée pour un temps ; elle n’aurait pas été chassée sans le jeûne et la prière constants, les travaux et les souffrances des croyants opprimés. »

Michael Pakaluk, traduit par Bernadette Cosyn

Source : https://www.thecatholicthing.org/2025/06/19/the-nicene-symbol-creed/