Le Coeur de Bergoglio - France Catholique
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L'Église dans l'attente
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Le Coeur de Bergoglio

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Le quotidien italien La Repubblica a publié hier une nouvelle entrevue avec le pape François, probablement planifiée pour coïncider avec sa rencontre de trois jours cette semaine avec les huit cardinaux ( « G- 8 ») qu’il a choisi pour le conseiller sur la réforme de la Curie et la gouvernance de l’Église. Comme par le passé, le Saint-Père utilise des expressions qui peuvent vous surprendre — mais également faire réfléchir. Et, malheureusement, il semble de plus en plus qu’il continuera à le faire durant son pontificat. Mais ce qui ressort surtout de cette interview est sa sagesse du cœur, sapientia cordis, qui, semble-t-il, peut atteindre même les sceptiques les plus endurcis.

Prenons deux de ces phrases troublantes. La première pourrait être juste une argutie. Dans une conversation avec Eugenio Scalfari, un journaliste italien célèbre qui est aussi un non-croyant bien connu (mais qui a adressé plusieurs questions au πape dans un éditorial), François nie au début qu’il essaie de le convertir parce que « Le prosélytisme est un non-sens solennel.» C’est une façon périlleuse pour exprimer une vérité réelle.

La plupart des gens ordinaires ne seront pas en mesure de faire la distinction entre ce dont François parle — un prosélytisme envahissant — et un effort propre à convertir. Les prophètes, Jean-Baptiste, Jésus, les Apôtres, et les grandes figures spirituelles innombrables à travers l’histoire semblent tous avoir entrepris ce dernier — « Repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. » La plupart des gens vont comprendre cela comme si le Pape disait qu’il est bon de croire quoi qu’ils aiment .

En fait, il dit plus ou moins ceci : « Chacun a sa propre idée du bien et du mal et doit choisir de suivre le bien et combattre le mal comme il les conçoit. Cela serait suffisant pour rendre le monde un meilleur endroit. »

Ceci, bien sûr, n’est pas vrai. Nazis, racistes, avorteurs, eugénistes, promoteurs de l’euthanasie, djihadistes et terroristes de toutes sortes, et divers autres humains malheureux croient tous qu’ils ont raison. Ils ont tort . Et aucune personne de bon sens, et encore moins le Pape, ne veut qu’ils suivent leur propre conception du bien et du mal. Cela ne fera pas du monde un meilleur endroit.

Ces propositions sont mal formulées. Le pape François voulait dire — et il l’illustre magnifiquement le point dans l’interview — que, au moins dans certaines situations, il n’est pas bon de commencer par argumenter avec les gens. Il est nécessaire d’établir un contact humain, de comprendre l’autre, pour qu’émerge une certaine confiance humaine, surtout avec des gens qui pensent qu’ils savent déjà tout ce qu’il faut à propos du christianisme.

Et la seconde assertion signifie, pour le dire plus précisément, que les gens ont besoin d’être encouragés à approfondir et à agir davantage sur ce qu’ils croient être la Vérité. Vraisemblablement, François pense à des personnes de bonne volonté ordinaire, et espère aussi que ceux qui ont des vues erronées, mais de façon non irrémédiable en viendront à un plus grand sens de la justice et de la vérité .

Soit dit en passant, il n’a pas été tout à fait précis — comme cela a souvent été le cas quand il réfléchit tout haut, en admettant qu’il n’est pas à l’aise dans cet exercice. Encore que ce qu’il a fait est peut-être beaucoup plus important.

La plupart de ce qu’il a dit à propos de l’Eglise, la pauvreté, la mission, les femmes, etc., a déjà été dit et va sans aucun doute occuper la plupart des commentaires à venir. Mais ça devient intéressant quand il se tourne vers Scalfari lui-même, un ancien croyant, et demande:

« Vous, un non-croyant laïque, en quoi croyez-vous ? Vous êtes un écrivain et un homme de réflexion. Vous croyez en quelque chose, vous devez avoir une valeur dominante. Ne me répondez pas avec des mots , comme l’honnêteté , la recherche, la vision du bien commun, tous les principes et les valeurs importantes, mais ce n’est pas ce que je demande. Je vous demande ce que vous pensez être l’essence du monde, voire de l’univers. Vous devez vous demander, bien sûr, comme tout le monde, qui nous sommes, d’où nous venons, où nous allons. Même les enfants se posent ces questions. Et vous ? »

Cela semble une éruption du vrai feu au cœur de Jorge Bergoglio , en comparaison desquelles les errements verbaux se dissolvent comme une brume matinale . Et elle est parvenue au cœur de Scalfari , qui avait dit plus tôt que quand il a lu Descartes « Je pense donc je suis », sa foi s’était éteinte lentement.

Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/the-heart-of-bergoglio.html