« Le christianisme, bon génie de la France » - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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« Le christianisme, bon génie de la France »

Face à la religion des droits de l’homme, il est urgent de rappeler l’apport du christianisme à la civilisation, soutient Jean-Louis Harouel, historien du droit et auteur du Vrai génie du christianisme (éd. Jean-Cyrille Godefroy).
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« Le christianisme est historiquement l’inventeur de deux grands services publics : celui de la charité et celui de l’enseignement » explique Jean-Louis Harouel

« Le christianisme est historiquement l’inventeur de deux grands services publics : celui de la charité et celui de l’enseignement » explique Jean-Louis Harouel

© Pascal Deloche / Godong

Tout ce qui constitue notre démocratie est-il le fruit d’un génie du christianisme ?

Jean-Louis Harouel : Ce génie résulte fondamentalement de la scission évangélique entre le politique et le religieux, qui a permis la sécularisation du politique, la distinction du pouvoir spirituel et du pouvoir temporel, l’avènement de l’État moderne tel que l’a forgé l’Europe occidentale. Jésus a marqué la séparation de César et de Dieu, qui ont chacun leurs droits respectifs. C’est de là que découle l’idée profondément novatrice de la coexistence de deux pouvoirs distincts ayant chacun sa légitimité, l’un en charge du salut des âmes, l’autre des affaires politiques et administratives.

Avec le « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », sont posées les bases d’une doctrine « laïque » dont saint Thomas a donné au XIIIe siècle un exposé lumineux, développant une conception profane du pouvoir et fondant la légitimité d’un ordre temporel autonome. Car, tout comme l’Église, communauté de tous les fidèles, est dans le registre spirituel une société parfaite – communitas perfecta –, l’État est lui aussi une société parfaite dans le domaine des affaires temporelles. En consacrant le principe de l’autonomie du politique dans sa sphère, saint Thomas a confirmé que la logique du christianisme conduisait à une théorie profane de la souveraineté étatique et du droit.

Comment le génie du christianisme en découle-t-il ?

Parmi les valeurs portées par le christianisme, celles dont la concrétisation dans l’histoire a eu le rôle social le plus positif sont certainement le refus de l’utopie et la morale du don. Il y a dans le christianisme une très longue tradition de rejet de l’utopie, d’acceptation des réalités du monde tel qu’il est. Du fait de la dualité des royaumes, le christianisme a toujours refusé la tentation de chercher à instaurer sur la terre un monde voulu parfait. Il a refusé le projet d’un bouleversement de la société pour en faire un paradis égalitaire, dont l’histoire a montré que cela aboutit à chaque fois à un enfer.

Mais, tout en acceptant le caractère imparfait de l’ordre des choses, le christianisme a cherché à l’améliorer par des actions fondées sur l’idée de don. C’est ainsi que le christianisme est historiquement l’inventeur de deux grands services publics : celui de la charité et celui de l’enseignement. D’un côté, on donne des secours et des soins. De l’autre, on donne du savoir. Le christianisme a inventé les hôpitaux et autres établissements charitables, les universités, puis les collèges et l’enseignement primaire.

Tout cela fut organisé par l’Église, qui encourageait efficacement la générosité des fidèles afin de financer aussi bien l’assistance que l’enseignement. Tandis que la solution égalitariste consiste à prendre et à contraindre pour changer la société, la manière chrétienne est fondée sur la générosité qui donne par amour de Dieu.

Cette laïcité bien comprise est-elle aujourd’hui dévoyée ?

Complètement, puisque le pouvoir temporel se trouve aujourd’hui soumis à la domination d’un nouveau pouvoir spirituel, fondé sur la foi dans les droits de l’homme qui sont devenus pour les pays d’Europe occidentale une religion séculière. Ce terme a été forgé par le grand sociologue Raymond Aron pour mettre en évidence la dimension religieuse de l’idéologie communiste, laquelle prétendait offrir à l’humanité, à l’horizon, le paradis sur la terre.

Retrouvez l’intégralité de l’entretien dans le magazine.