La personnalité internationale du Saint-Siège - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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La personnalité internationale
du Saint-Siège

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Une commission des Nations Unies sur la mise en œuvre de la convention internationale sur les droits de l’enfant a rendu le 31 janvier 2014 ses conclusions sur le rapport soumis par le Saint-Siège en date du 16 janvier 2013 en tant qu’Etat partie à la convention. Le dernier rapport datait de 1995.

Rendu public lors d’une conférence de presse à Genève le 5 février, le rapport de la Commission « recommande » au Saint-Siège plusieurs réformes de son code de droit canonique, ce qui a suscité une vive réaction de la part du porte-parole du Vatican qui a parlé d’ingérence dans les affaires de l’Eglise. Nous sommes ici au cœur du malentendu fondamental sur le caractère de l’Eglise et la personnalité internationale du Saint-Siège.

Certes la Commission dit reconnaître la spécificité de « l’Etat-partie » du fait de sa « nature dualiste » : « gouvernement de l’Etat de la Cité du Vatican et sujet souverain de droit international jouissant d’une personnalité légale originale et non déléguée, indépendante de toute autorité ou juridiction territoriale ». Elle reconnaît que les évêques et les supérieurs d’ordres religieux bénéficient d’une autonomie par rapport au Pape, mais elle s’en tient au fait que comme Etat signataire, le Saint-Siège « s’est engagé en tant que pouvoir suprême de l’Eglise catholique au travers des individus et des institutions placés sous son autorité ».

Il n’est certes pas facile à un non-catholique – et même à un catholique non versé dans le droit canon et le droit international public – de qualifier très exactement la personnalité internationale du Saint-Siège. Celle-ci ne se résume pas à la souveraineté sur le micro-Etat du Vatican qui est depuis 1929 reconnu comme le support de l’autorité spirituelle du Chef de l’Eglise catholique, garant de son indépendance par rapport à tout pouvoir temporel. Ce support territorial unique en son genre marque la différence avec tous les autres pouvoirs religieux. L’Eglise catholique n’est pas non plus une simple organisation internationale voire une ONG. Mais cela n’en fait pas pour autant un « empire » : on retrouve dans les formulations de la Commission des NU l’image caricaturale de l’Eglise catholique héritée de la culture protestante. C’est celle du « papisme » qui avait longtemps prévalu en Grande-Bretagne puis aux Etats-Unis (par exemple ceux qui s’imaginaient jusqu’à Kennedy qu’un politicien catholique devait d’abord obéir au Pape). L’expression de « pouvoir suprême » s’agissant du Saint-Siège fait sourire.

Tout devrait se passer comme si les conférences épiscopales et les congrégations religieuses – et l’ensemble des écoles catholiques – étaient aux ordres. Mais aussi comme si l’Eglise catholique bénéficiait encore de droit dans le monde entier de privilèges d’extraterritorialité comme au temps des « Capitulations » dans l’Empire ottoman puis en Chine ! Les relations entre Eglise et Etats sont variables d’un pays à l’autre, régime de concordat, de séparation, et tant d’autres accords souverains, du fait même que le Saint-Siège bénéficie du pouvoir diplomatique – et de lui seul.

La Commission fait la même confusion au regard du droit canon qu’elle regarde comme le droit pénal de n’importe quel Etat souverain. Elle pousse le ridicule jusqu’à demander que l’abus sexuel sur un mineur soit qualifié par le droit canon non plus de « délit moral » mais de « crime » ! En ignorant totalement que le Saint-Siège n’a aucun pouvoir d’exécution que le Vatican n’a pas de prison. Ce sont les Etats nationaux qui arrêtent, instruisent et jugent.

Il y a certes des réformes à opérer mais plutôt dans les processus internes à l’Eglise. Plusieurs conférences épiscopales et le Saint Père en personne y sont résolument engagés. Il était inutile de la part de ces commissaires de l’ONU de brouiller les pistes et de se livrer à des amalgames contre-productifs en mêlant des éléments indiscutables comme la répression des abus sexuels sur des mineurs avec tous les poncifs à la mode comme la reconnaissance des « diverses formes de famille », la contraception pour les mineurs ou l’enseignement du genre.