Nous n’en avons sans doute pas fini avec l’étrange demande de pardon de Ségolène Royal. S’exprimant à Dakar, la présidente du conseil régional de Poitou-Charentes avait, on se le rappelle, demandé « pardon » pour le discours « humiliant » de Nicolas Sarkozy du 26 juillet dans lequel le chef de l’Etat, alors nouvellement élu, aurait évoqué l’Homme africain qui n’était « pas encore entré dans l’Histoire ». L’ex-candidate avait rajouté que de telles paroles n’engageaient la France ni les Français ».
On notera d’abord que Ségolène Royal ne cite pas exactement les propos de Nicolas Sarkozy, lequel avait affirmé que l’Homme africain n’était pas « assez entré dans l’histoire », ce qui introduit une nuance de taille. Surtout, on peut légitimement se demander au nom de quoi, ladite Ségolène Royal pouvait prétendre parler au nom de la France. Après tout, Madame Royal n’est pas président de la République et elle ne détient aucun mandat parlementaire (pas plus que sa rivale Martine Aubry, d’ailleurs). On ne voit pas ce qui lui permet de parler au nom de la France ou du peuple français.
Il y a de meilleures façons de revendiquer un destin national. En critiquant ainsi Nicolas Sarkozy à l’étranger, Ségolène Royal a fait preuve d’une dangereuse désinvolture à l’égard des usages républicains. Elle a également montré que ce qui l’animait était moins le souci de l’intérêt national qu’une rancune incoercible à l’égard de son vainqueur de 2007. Une telle attitude serait inconcevable dans toute autre démocratie. Imagine-t-on John Mc Cain venir chez nous critiquer Obama ?
Cet épisode est inquiétant, d’autant plus inquiétant que l’ancienne candidate à l’élection présidentielle a reçu, une fois n’est pas coutume, l’appui du Parti socialiste, malgré les réserves de Pierre Moscovici. Un tel soutien donne de fâcheux indice sur le niveau du débat politique dans l’opposition. Manuel Valls, député-maire d’Evry (et ancien soutien de Ségolène Royal), a raison lorsqu’il critique un « antisarkozysme forcené » qui masque, selon lui, un « déficit idéologique ». En suivant Ségolène Royal dans sa dérive, les socialistes montrent à l’évidence qu’ils ne constituent pas encore une force d’opposition crédible, ou même plus simplement adulte.
Notre démocratie française a besoin aujourd’hui plus que jamais d’une véritable opposition. Aux socialistes de savoir prendre leurs responsabilités. Le temps leur est compté.
Serge PLENIER © Acip