Jean-Paul II : La vie morale - France Catholique
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Pontificat de François - numéro spécial
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Jean-Paul II : La vie morale

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Il y a maintenant presque vingt ans, le Pape Jean Paul II publiait une encyclique, Veritatis Splendor, sur la façon dont les catholiques appréhendent la vie morale. Sans doute est-ce un moment propice pour se pencher à nouveau sur certains passages de cette encyclique.

Il commençait par une superbe phrase qui résume bien son propos :

« La splendeur de la vérite se reflète dans toutes les œuvres du Créateur et, d’une manière particulière, dans l’homme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu (cf. Gn 1, 26). La vérité éclaire l’intelligence et donne sa forme à la liberté de l’homme, qui, de cette façon, est amené à connaître et à aimer le Seigneur. C’est dans ce sens que prie le psalmiste : « Fais lever sur nous la lumière de ta face » (Ps 4, 7) ». 1

De deux choses l’une, soit notre existence au milieu des créatures de Dieu s’épanouit en vérité, soit elle s’appauvrit et s’étiole.

Cependant, dans la vie présente, les hommes et les femmes sont dans un dangereux pétrin. D’un côté, nous nous sanctifions par « l’obéissance à la vérité » (1 P 1, 22). « Et plutôt que d’y faire entrave comme le font souvent d’autres institutions, l’Église est la seule institution qui : « propose à tous la réponse qui vient de la vérité de Jésus Christ et de son Evangile ». Et d’un autre côté :


A la suite du mystérieux péché originel, commis à l’instigation de Satan, «menteur et père du mensonge » (Jn 8, 44), l’homme est tenté en permanence de détourner son regard du Dieu vivant et vrai pour le porter vers les idoles (cf. Th 1, 9), échangeant « la vérité de Dieu contre le mensonge » (Rm 1, 25)

La capacité qu’a l’homme à connaître la vérité est également obscurcie, et la volonté que nous avons de nous y soumettre est de plus affaiblie. Il n’en demeure pas moins que nos vies ne peuvent s’épanouir que dans la vérité (une vérité clairement exprimée par l’Église), et dans le combat pour l’appliquer quel que soit le danger.

De manière spécifique, le pape méditait sur la rencontre entre le jeune homme riche et Jésus (Matthieu, 19). Nous-mêmes, évidemment, nous rencontrons Jésus dans l’Église.

Le jeune homme appelait Jésus « bon ». Connaître le bien et le faire, c’est le coeur de l’action morale, mais qui est la norme de ce bien ? Il est évident que ce ne sont pas les élites de la société de quelque époque que ce soit ! Et donc Jésus dit à l’homme, « personne n’est bon sinon Dieu seul. »

Jean Paul II explique que cela signifie (et ici nous allons bien au-delà de la notion de moralité des Lumières vue simplement comme une question de règles à appliquer) que


« si Dieu seul est le Bien, aucun effort humain, pas même l’observance la plus rigoureuse des commandements, ne réussit à « accomplir » la Loi, c’est-à-dire à reconnaître le Seigneur comme Dieu et à lui rendre l’adoration qui n’est due qu’à lui (cf. Mt 4, 10). « L’accomplissement » ne peut venir que d’un don de Dieu : il est l’offrande d’une participation à la bonté divine qui se révèle et qui se communique en Jésus, celui que le jeune homme riche appelle « bon Maître » (Mc 10, 17 ; Lc 18, 18). »

Le don que Dieu fait de sa vie dans le Christ est le fondement qui permet de se mettre fidèlement à la suite du Christ pour entrer dans la vie éternelle. Ceci n’est pas la façon dont nous, nous concevons une vie bonne ; c’est la façon dont Dieu conçoit une vie bonne.

« Mais comment décrire une vie bonne ? Eh bien la façon dont Dieu conçoit une vie bonne se trouve dans ses commandements; en effet :

« Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements » (Mt 19, 17).

De cette manière est énoncé un lien étroit entre la vie éternelle et l’obéissance aux commandements de Dieu : Les commandements de Dieu montrent à l’homme le chemin de la vie et ils y conduisent. Jésus lui-même les confirme de manière définitive et nous les propose comme chemin et condition du salut.

Ces commandements nous montrent comment aimer Dieu et l’homme de manière authentique dans les décisions pratiques de la vie. »

Et Jean Paul II ajoute de manière encore plus précise :

« Les commandements représentent donc la condition de base de l’amour du prochain ; en même temps, ils en sont la vérification. »

Jean Paul II clarifie son propos en appliquant cette rencontre étonnante à chacun d’entre nous, et ajoute :


« Le dialogue entre Jésus et le jeune homme riche se poursuit, d’une certaine manière, dans toutes les périodes de l’histoire, et encore aujourd’hui. La question « Maître, que dois-je faire de bon pour obtenir la vie éternelle ? » naît dans le cœur de tout homme, et c’est toujours le Christ, et lui seul, qui donne la réponse intégrale et finale. Le Maître, qui enseigne les commandements de Dieu, qui invite à sa suite et qui accorde la grâce pour une vie nouvelle, est toujours présent et agissant au milieu de nous. »

La vérité que nous recevons provient de Jésus Christ dans son Église et c’est dans son Église que nous recevons également la grâce de répondre positivement quand se présente l’occasion d’être bon devant Dieu.
Le Saint Père nous laisse une observation cruciale :

« Aucune déchirure ne doit briser l’harmonie entre la foi et la vie : l’unité de l’Eglise est blessée non seulement par les chrétiens qui refusent ou déforment la vérité de la foi, mais encore par ceux qui méconnaissent les obligations morales auxquelles l’Evangile les appelle. (cf. 1 Co 5, 9-13) ».

Cela vous rappelle quelque chose ?


Bevil Bramwell, prêtre Oblat de Marie Immaculée, enseigne la théologie à la Catholic Distance University. Il est titulaire d’un doctorat de l’Université de Boston et travaille dans le domaine de l’ecclésiologie.

Tableau : Le Jeune homme riche s’en alla tout triste, by James Tissot, c. 1890

  1. traductions tirées de : http://www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/encyclicals/documents/hf_jp-ii_enc_06081993_veritatis-splendor_fr.html