Depuis plus d’une génération, on nous répète qu’il faut adapter la loi aux réalités et que, tenant compte de ces dernières, le législateur se doit d’intégrer les évolutions sociétales. Cet argument est abondamment utilisé à propos de l’homoparentalité pour justifier la prise en charge d’un enfant non pas par ses parents biologiques mais par deux personnes de même sexe qui ont recours à tous les artifices physiologiques et juridiques pour faire comme si elles avaient effectivement procréé ensemble.
par Jean ÉTÈVENAUX
La suite logique consistera à reconnaître la polygamie en lui donnant un statut légal. Pour le moment, elle est seulement tolérée par les organismes sociaux qui se contentent de faire remplir une « attestation de monogamie ou de polygamie ». Mais on peut raisonnablement supposer que, lorsque Mayotte deviendra officiellement un département français, ceux de ses habitants qui voudront conserver leur statut coranique bénéficieront de la reconnaissance de plusieurs épouses pour un seul conjoint.
On devrait d’ailleurs en profiter pour régulariser la situation de toutes ces femmes abandonnées par leur mari officiel ou vivant avec un autre homme. Grâce aux subventions — aide familiale, allocation de soutien familial, allocation familiale, allocation de rentrée scolaire, bons de vacances, bourses scolaires, prestation d’accueil du jeune enfant —, certaines subviennent sans trop de problèmes à leurs besoins et à ceux de leurs enfants, mais elles sont parfois contraintes à cacher l’existence d’un compagnon. Il faut donc mettre en accord la théorie avec la pratique et instaurer la polygamie.
Du coup, on pourrait peut-être aussi se servir du pacs pour faciliter la répudiation de l’épouse dont le mari ne veut plus. Les formalités de divorce ont déjà été bien simplifiées et il fut même un temps question de se contenter d’un acte devant notaire. Pourquoi donc ne pas pousser à se mettre officiellement en ménage à la carte, non seulement avec une personne de n’importe quel sexe mais aussi avec un nombre non limité de personnes ?
Ce phénomène d’adaptation aux mœurs s’observe également à propos du travail dominical. Non seulement les exceptions servent à justifier une nouvelle règle, mais une pression diffuse fait comprendre jusqu’aux agriculteurs qu’il est dépassé de rester les bras croisés le dimanche et de ne pas faire fonctionner ce qui peut rapporter. On aura alors beau jeu de tourner en modèle une pratique issue de la perte de certaines valeurs et ayant amené nos sociétés à « masquer leur angoisse derrière le bruit et l’activité perpétuels » (Michel Fauquier, Lettre ouverte du dernier des chrétiens au premier des Français, Tempora, Perpignan, 2009, p. 46). Mais il est vrai qu’on n’arrête pas le progrès : en 1685, l’article 6 du Code noir promulgué par Louis XIV pour les Antilles stipulait que seraient sanctionnés les maîtres qui feraient travailler leurs esclaves le dimanche…
Jean ÉTÈVENAUX