Voici cinquante ans, le Concile Vatican II déclarait à propos des laïcs: « Quels qu’ils soient, ils sont appelés, membres vivants, à consacrer toute leur énergie à la croissance de l’Église et à sa perpétuelle sanctification, car cette énergie est un don du Créateur, une bénédiction du Rédempteur.» On n’attendait pas des laïcs qu’ils comptent sur le clergé pour prendre des initiatives. Les laïcs n’ont pas à attendre des demandes émanant du palais épiscopal. Leurs rôles leur sont attribués depuis le baptême.
Qu’avez-vous fait récemment pour la croissance de l’Église ?
Précisément ? « Les laïcs ont une mission spéciale pour que l’Église soit présente et opérationnelle en ces lieux et en ces temps où ce n’est que par eux qu’elle sera le sel de la terre.» Lieux et circonstances impliquent les écoles, le monde des affaires, la politique, la médecine, la science, les affaires internationales, les guerres, bref, une liste sans fin.
Mais au sein de l’Église Américaine 1, bien des catholiques attendent des directives du clergé alors qu’ils devraient agir d’eux-mêmes. Par la grâce du baptême et de la confirmation, chaque laïc est à la fois témoin et acteur de la mission de l’Église, à la mesure des dons du Christ.
Les laïcs en savent un bon rayon sur ce bas monde. Ils n’ont pas dans leur musette toute l’analyse philosophique et théologique des intellectuels, ni de certains clercs. Mais les laïcs disposent des informations crues et du savoir-faire qui manquent à bien des théologiens. Ils sont en permanence confrontés aux évènements de ce monde.
L’Église officielle détient la vérité par la tradition, l’écriture et l’œuvre du magistère. L’ennui, c’est que les gens ayant reçu une formation ecclésiastique et les gens vivant une expérience laïque ne mettent pas souvent leurs savoirs en commun, et certainement pas sur les sujets concernant les laïcs.
Problème: oublions l’interrogation historique, pourquoi en est-on arrivé là? — il y faudrait une bibliothèque entière. Mais maintenant, juste maintenant, alors que l’Église d’Amérique semble se diluer dans une sorte d’incongruité nationale, pourquoi les laïcs ne chercheraient-ils pas l’incontournable côté théologique des nombreux champs d’activité humaine ? Commençons par le domaine paroissial: Pourquoi ne pas organiser des conférences pour informer les gens sur le véritable enseignement de l’Église? La dépense ne serait-elle pas mieux employée ainsi par une analyse chrétienne de la vie quotidienne ?
Si le curé ne le fait pas, recrutez vous-mêmes des conférenciers — experts incontestables dans leur domaine — pour de tels programmes. Il y a bien assez de membres du clergé et de laïcs pour savoir que tel ou tel docteur pourrait faire l’affaire. Catholique authentique, savant, capable de transmettre le contenu de la Foi aux laïcs désireux de l’entendre.
Bien sûr, la conformité à l’orthodoxie doit être vérifiée. Il ne s’agit pas simplement d’avoir un auditoire appréciant le professeur Untel. Le niveau de vérité pour l’Église est nécessairement le plus élevé, et pour attirer un auditoire — on ne s’en rend pas assez compte — il faut un vecteur de vérité.
De même au niveau diocésain: pourquoi les diocèses ne donneraient-ils pas de formation individuelle à des laïcs? On pourrait bien trouver des laïcs pour organiser et exécuter les tâches, récolter des fonds, engager des conférenciers, louer les salles de conférence. Amenons le catholicisme à la place qu’il doit tenir — pour une connaissance opérationnelle de la foi et de la morale laïques. Les laïcs ont bien plus que beaucoup de clercs le sens de l’organisation. Attirez aussi des convertis de fraîche date. Leur implication est certaine, car ils apprécient ce qu’ils viennent de recevoir.
Naturellement, il ne faut pas faire appel à des représentants du parti Démocrate ou Républicain, ni à des adeptes des théories populaires fantaisistes sur l’amour, le mariage ou les affaires. Ils sont généralement hostiles à la culture de vie et à la grandeur des hommes pour qui le Christ s’est livré. Il faut aussi faire attention à ce que les conférenciers traitent de l’enseignement du Concile, et pas de leur interprétation. Il y a en Amérique une longue histoire de gens fabriquant du catholicisme, avec beaucoup d’adeptes. On en trouve même dans le clergé diocésain, et chez des religieux. Essentiellement chez les laïcs.
Heureusement, il y a actuellement bien assez d’hommes et femmes instruits dans la foi, capables de transmettre la véritable signification du catholicisme dans toute sa richesse. Le catholicisme est une chose trop merveilleuse pour être réservée à quelques privilégiés, à ceux qui ont reçu la formation pour vivre en plein leur foi dans l’orthodoxie.
Un dernier mot du Concile: « Le Christ aime l’Église, son épouse, Il est le modèle pour l’homme aimant son épouse comme la chair de sa chair ; l’Église, en vérité, dépend de sa Tête. En Lui réside la plénitude, Tête divine du corps divin. Il emplit l’Église, qui est Son corps, Sa plénitude, de Ses dons divins afin qu’elle puisse croître et atteindre la plénitude de Dieu.»
Viser une telle plénitude, voilà qui mérite un effort conséquent.
Dessin : Jésus enseignant dans le Temple – Guercino (Giovanni Francesco Barbieri). vers 1625





