Des ballons à l’origine d’une avalanche de bulletins d’information
par Kristina Johannes
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Quand vous lisez l’histoire de l’Eglise, ou tout autre fait historique d’ailleurs, il est facile d’oublier que des personnes réelle ont vécu ces événements exceptionnels, probablement sans avoir en tête que leurs exploits puissent être enregistrés pour la postérité.
En même temps, la plus grande partie des faits historiques n’a pas été notée, et ne le sera jamais – les événements tout simples de la vie de millions d’inconnus qui ont contribué à la culture et à la civilisation par des voies dont l’importance ne sera jugée que par Dieu Lui-même.
Appelons cela la petite histoire de l’Eglise. Je peux vous en raconter un exemple. En 1968, j’ai été abusée. Non, pas cette sorte d’abus. J’ai souffert d’un abus doctrinal de la part des religieuses qui dirigeaient le prestigieux lycée de jeunes filles pour lequel j’avais obtenu une bourse d’études. Je n’étais pas la seule. Toutes les élèves de ma classe étaient concernées, en fait le lycée tout entier était concerné, mais il semble que j’étais la seule élève assez chanceuse pour avoir des parents tels que les miens.
Ils ont découvert cet abus très tôt au cours du premier semestre, quand j’ai ramené mon livre de théologie à la maison. Remarquant les ballons sur la couverture, mon père s’est étonné, « que diable est-ce là ? » et il a décidé d’y mettre le nez.
Il est ensuite allé directement au bureau de la directrice. La conversation qu’il a eu avec la soeur n’a fait que conforter son inquiétude. Le résultat, c’est que j’ai passé le reste des cours de théologie de l’année dans la bibliothèque, à étudier par moi-même le manuel en vigueur l’année précédente. L’année suivante, j’étais à l’école publique.
Très rapidement, mes parents se sont mis en réseau avec d’autres catholiques concernés et ont réalisé l’ampleur du problème, qui dépassait de loin ma seule école. De là est né le CREDO, Catholiques pour la Restauration dans l’Education de l’Orthodoxie Doctrinale.
Un membre extraordinaire de ce groupe était Edith Myers, qui devait plus tard écrire The Wanderer (Le vagadond). Mon père m’a souvent dit que Mme Myers, une convertie, en savait plus sur la Foi que toute autre personne au monde.
La raison d’être de l’organisation était de faire un examen critique de tous les textes catéchétiques en usage à cette époque et de le mettre à disposition des évêques et de toute personne en faisant la demande. CREDO a été la première organisation à dénoncer The Dutch Catéchism (Le cathéchisme hollandais). Christ Among Us (le Christ parmi nous) a également écopé d’une critique négative. Il m’arrive encore d’en trouver un exemplaire dans un magasin de livres d’occasion et je l’achète toujours – afin de le ramener à la maison et de le détruire en hommage à mes parents.
Mon père était président du CREDO et signait les bulletins d’information mensuels envoyés aux membres dans le monde entier. Durant les quelque cinquante années d’existence du CREDO, il a été envoyé des milliers de ces bulletins. Mon père m’a dit un jour qu’il était « un tigre de papier » car, selon lui, Edith Myers écrivait l’essentiel du contenu des lettres qu’il signait (Ma mère m’a affirmé que c’était davantage un travail en collaboration qu’il ne l’avouait.)
Plusieurs des commentaires catéchétiques critiques réalisés par le groupe, entre autres celui sur The Dutch Catechism, furent envoyés au Saint-Siège. Les membres du CREDO ignoraient si leur travail porterait du fruit : c’était un véritable travail de foi, d’espérance et d’amour.
Je sais que l’organisation à apporté du réconfort à de nombreuses personnes bouleversées de par le monde, qui se demandaient si leur Eglise bien-aimée avait complètement perdu la tête. J’ai vu certaines de leurs lettres.
Ma mère, sous la direction de son pasteur, a un jour effectué un pélerinage en Europe qui incluait une excursion à Rome. Elle a soigneusement préparé un dossier avec les documents du CREDO sur la situation catéchétique, pour le donner à Paul VI si elle avait l’occasion de l’approcher suffisamment pour le lui remettre en main propre. Cela montre à quel point elle était prête à tout en raison de la situation.
Quand le pasteur découvrit son projet, il fut horrifié et lui dit de n’en rien faire. Il craignait que les gardes suisses pensent à un courrier piégé, qu’ils arrêtent ma mère ou même lui tirent dessus. Il avait raison d’une certaine façon, le dossier contenait bien quelque chose d’explosif, mais pas de l’espèce qui détruit les corps. Ma mère fut interloquée et emporta quand même le dossier, mais elle n’eut pas l’occasion de le remettre au pape.
Quelques années après de décès de mon père, en 1982, the Institute for Religious Life (l’institut pour la vie religieuse) obtint l’autorisation de compiler certains des bulletins du CREDO pour réaliser un livre intitulé On Teaching the Faith (Enseigner la foi), par Thomas P. Dolan. On en trouve des exemplaires d’occasion sur Amazon.
Vers 1995, rendant visite à ma mère, je tombais sur une information sur une nouvelle commission des évêques américains, qui avait découvert que la plupart des catéchismes en usage à cette époque ne respectaient pas la doctrine.
« Pourquoi diable n’ont-ils pas cru le CREDO quand il a révélé ce problème il y a 27 ans ? » ai-je demandé à ma mère. Elle n’avait pas de réponse à me proposer.
J’imagine que vous pouvez comprendre pourquoi les événements actuels concernant la LCWR 1 et Soeur Margaret Farley 2 me provoquent des flashbacks. Certains s’étonnent : qu’est-ce que le Vatican est donc en train de faire ? Moi je m’étonne plutôt : pourquoi cela leur a-t-il pris si longtemps ? Pour l’amour du ciel, j’ai eu le temps de devenir une grand-mère !
Kristina Johannes est infirmière diplômée et professeur agréée au planning familial naturel. Elle a été porte-parole de la coalition familiale d’Alaska, qui a travaillé avec succès à l’amendement sur le mariage de la constitution d’Alaska.
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/balloons-that-launched-1000-newsletters.html
NDT : La LCRW, Leadership Conference of Women Religious, est une association regroupant des supérieures de congrégations féminines catholiques. Le Vatican lui a récemment demandé de revenir à l’orthodoxie de la doctrine chrétienne, en raison de dérives importantes
NDT : religieuse américaine qui a écrit un livre dont les principes moraux s’opposent aux enseignements de l’Eglise Catholique
