«L’environnement», ça commence à bien faire ! » Prononcée au salon de l’Agriculture, la petite phrase du président de la République a marqué un revirement. Trois ans après la campagne présidentielle qui avait vu le candidat Sarkozy signer la charte édictée par Nicolas Hulot, l’écologie serait passée de mode à droite. Joignant le geste à la parole, le Président vient d’ailleurs d’enterrer sa taxe carbone, devenue boulet politique avec une image d’incompréhensible d’usine… à gaz à la française, injuste à l’intérieur et pénalisante à l’international.
Alors que l’écologie est plutôt classée à gauche, c’est la victoire régionale des socialistes alliés aux verts qui a précipité ce coup d’arrêt. Il s’agit de reconquérir les électeurs habituels de la droite qui se sont abstenus, déboussolés par l’ouverture. Il faut aussi rassurer les parlementaires UMP tentés par la fronde. Le député Patrick Ollier a déposé des amendements à la loi Grenelle 2 pour durcir les conditions d’implantation des éoliennes. Objectif affiché : « éviter un développement anarchique ». L’idée qu’on défigure l’environnement pour sauver la planète ne passe plus. C’est peut-être la revanche d’une écologie de proximité contre celle des gourous planétaires. Après Al Gore, les grands prêtres de la catastrophe écologique sont contestés. Nicolas Hulot, Yann Arthus-Bertrand et Jean-Louis Étienne continuent de se concurrencer dans l’ultra-médiatisation, mais leurs prophéties sont de plus en plus « déconstruites ».
Claude Allègre se dit déterminé à pourfendre « l’imposture climatique » malgré la pétition de scientifiques qui contredit ses thèses. La terre n’est aucunement en danger, surenchérit Henri Atlan, dans une tribune du Monde du 28 mars. Selon le biologiste, les approximations du rapport de synthèse du GIEC (groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) peuvent faire douter de « la religion du ‘sauver la planète’ ». Au pays de la laïcité, la pire insulte qu’on puisse faire à l’écologie, c’est d’être une religion. Dans une confrontation avec la verte Cécile Duflot, publié dans Libération, Jean-François Kahn compare l’écologie au… catholicisme (celui des bûchers) ! Il conteste l’idéologie politique du « tout écologique », c’est-à-dire « l’idée que l’écologie serait le nouvel avenir de l’humanité ». La candidate d’Europe Écologie a beau défendre « une vision pragmatique qui intègre, dans ses racines, une dimension libertaire qui est une prévention aux dérives autocratiques », Jean-François Kahn rétorque que les Verts soutiennent un nouveau « marxisme-léninisme ». Selon lui les écologistes ressemblent à Malthus quand il prédisait que la terre n’arriverait plus à nourrir tous ses habitants, croyant l’humanité incapable de progresser. On s’invective de part et d’autre en se traitant de « scientiste ».
Avec la disgrâce – relative – de l’écologie, la religion du progrès va-t-elle faire son retour ? Le débat bioéthique annoncé à l’Assemblée nationale pour le début de l’été s’en trouverait modifié. Les parlementaires qui se rebiffent aujourd’hui contre la technocratie écologique seraient tentés par le laisser-faire libéral. Une aubaine pour les chercheurs qui accusent les lois de bioéthique de brider la recherche française sur l’embryon.
Mais il ne faudrait pas confondre le principe de précaution, dont le caractère absolu est discutable en matière d’environnement, avec l’impératif de protection de l’être humain, qui, lui, n’est pas négociable.