Bioéthique : faible sursaut... - France Catholique
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La France à Rome
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Bioéthique : faible sursaut…

Le Sénat a voté en seconde lecture la loi de bioéthique dont on devrait connaître la teneur définitive le 15 juin. Le pire est sans doute évité, mais sans vraies garanties…
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La recherche sur l’embryon s’est révélée le point-clé des débats au Sénat. En effet, Le 1er juin, la Commission des Affaires sociales du Sénat avait réintroduit « l’autorisation encadrée de la recherche » formulation particulièrement laxiste et donc souhaitée par les lobbies qui veulent travailler sans limite sur les embryons humains…

Lors des débats du 9 juin, le rapporteur Alain Milon (UMP), qui plaidait pour ce régime, déclarait imprudemment : « Comme il s’agit d’une question scientifique, le législateur doit confier le pouvoir de décision à des scientifiques. Je crains les régimes dans lesquels la loi dicte la vérité scientifique ! »

Jean-Pierre Raffarin (UMP) avait répliqué avec justesse : « Le rapporteur craint les régimes où la loi dicte la vérité scientifique ; je crains, moi, ceux où la science serait supérieure au droit. Les chercheurs sont des êtres moraux, mais la science elle-même n’est pas toujours morale : les exemples abondent dans le passé ! […] Une interdiction avec dérogation garantit le primat du politique. »

à l’issue de près de deux heures de discussion, le Sénat a adopté l’amendement du président du groupe UMP, Jean-Claude Gaudin, visant à reprendre la position retenue par l’Assemblée nationale et soutenue par le gouvernement : l’interdiction avec dérogations élargies, sans limite de temps. L’article 23 reprenant cette disposition de compromis a été voté par 164 voix contre 161 voix.

« C’est à mon sens dramatique pour les chercheurs », a commenté à nouveau Alain Milon, en expliquant qu’il voterait contre le projet de loi. Celui-ci a tout de même été voté dans son ensemble par 173 voix contre 154.

L’étape suivante devrait se dérouler avant le 15 juin au sein de la Commission Mixte Paritaire (CMP), composée de 7 députés et 7 sénateurs : elle est chargée de trouver une rédaction commune sur les articles qui comportaient encore des différences entre les deux assemblées. En cas de désaccord, ce sont les députés qui ont le dernier mot, mais à l’issue de la seconde lecture au Sénat, ces différences pa­raissaient mineures…
Sur plusieurs points la nouvelle loi évitera donc le pire, sans offrir de vraies garanties éthiques. On notera, en ce qui concerne le dépistage prénatal, que le caractère systématique de la proposition des examens prénataux, dont l’effet eugéniste avait été souligné, est maintenu, malgré des modifications mineures. L’alinéa 4 de l’Art 9 est ainsi modifié : « Toute femme enceinte reçoit, lors d’une consultation médicale, une information loyale, claire et adaptée à sa situation sur la possibilité de recourir, à sa demande, à des examens de biologie médicale et d’imagerie permettant d’évaluer le risque que l’embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de sa grossesse. »
Pour ce qui est de l’accès à l’assistance médicale à la procréation, celui-ci reste réservé aux couples composés par un homme et une femme, et la nécessité de deux ans de vie commune pour les concubins a été réintroduite.

Enfin, le Sénat a réintroduit la clause de révision de cette loi, en prévoyant un nouvel examen d’ensemble par le Parlement dans un délai de cinq ans.
Au final, même si cer­tains symboles sont main­tenus, ce texte aggrave des atteintes à la dignité humaine en contradiction avec ce que devrait être une véritable bioéthique, protectrice de la vie humaine dès son commencement :

– Les alertes concernant une nouvelle forme d’eugénisme n’ont pas été réellement prises en compte.

– Les demandes de lever l’anonymat du don de gamète, pour les enfants nés de l’assistance médicale à la procréation avec donneur, ont été rejetées de manière injuste pour ceux que l’on prive délibérément d’un père ou d’une mère.

– Les dérogations au principe fondateur de l’interdiction de recherche sur l’embryon humain, élargies et sans limite de temps, ne respectent pas le principe de la dignité qui doit s’appliquer au commencement de la vie humaine.

Bruno Retailleau, sénateur de la Vendée, à propos des incertitudes scientifiques pesant sur la recherche sur l’embryon, a eu un mot très fort : « Le principe de pré­cau­tion est constitutionnel. Ne vaudrait-il que pour les règnes végétal ou animal, tout en excluant l’humain ? Si le doute existe, le principe de précaution doit prévaloir ».

Dernière remarque : la no­mination en tant que rap­porteur d’Alain Milon, qui a donc voté contre le projet de loi, reste bien étonnante…