C’est suffisamment rare pour le relever : mercredi 22 mai, France 3 diffusait un passionnant documentaire sur les Frères Musulmans. Pour les catholiques, rangés en ordre derrière le Pape, le monde musulman représente une nébuleuse complexe difficile à appréhender ; d’où l’intérêt de ce film didactique et remarquablement construit. En partant de la naissance de la Confrérie dans les années 20 en Egypte, en passant par leur interdiction, jusqu’à leur victoire électorale de 2012 en Tunisie et en Egypte, Michaël Prazan raconte une histoire et livre une analyse solidement étayée de témoignages d’historiens, de politiques et des membres de la Confrérie. Ses conclusions ne sont pas rassurantes pour le monde occidental. D’autant que terrible coïncidence, ce même 22 mai était perpétré l’horrible assassinat de Londres.
La seule réserve que j’émettrai par rapport au film est le fait d’employer le mot idéologie pour nommer une foi religieuse, même si cette dernière a une dimension politique. Si les Frères Musulmans ont réussi à croître aussi rapidement, malgré toutes les persécutions dont ils ont été l’objet, c’est parce qu’il était facile de prospérer dans un monde vide de sens et de Dieu et qu’ils ont bien assimilé les leçons d’un Gramci qui prônait la conquête de la société par le vecteur de la culture.
A contrario, le documentaire de Ken Loach « L’Esprit de 45 », qui vante et fête la victoire des Travaillistes en Angleterre juste après 45 est tant marqué d’idéologie qu’il en perd toute crédibilité. La fraternité sociale est une valeur que l’on ne peut que soutenir mais force est de reconnaitre que sur le plan économique, elle a conduit à l’échec. Il aurait été intéressant d’essayer de comprendre pourquoi.
A noter aussi sur notre histoire récente l’excellent livre écrit comme une conversation entre Pierre Schoendoerffer et Patrick Forestier, « La guerre dans les yeux » : de l’Indochine à l’Afghanistan, il s’agit bien de raconter cette même guerre insurrectionnelle, mal comprise et mal aimée de Français qui ont la chance de ne plus connaître la réalité de la guerre sur leur territoire.