Un tiers des femmes concernées, un évêque ose en parler : Le synode « désenlisé » - France Catholique
Edit Template
L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
Edit Template

Un tiers des femmes concernées, un évêque ose en parler : Le synode « désenlisé »

Copier le lien

Il y a une très puissante et très sûre force de désagrégation de la famille à l’œuvre dans le monde quelles que soient les cultures et un évêque a eu le courage d’en parler au synode.

Sur son blog « Chante et marche » qui reprend sa devise épiscopale inspirée de saint Augustin, l’évêque canadien de Gatineau, Mgr Paul-André Durocher – qui a achevé son mandat de président de la Conférence des évêques catholiques du Canada – publie son intervention au synode.

« J’ai choisi de parler au sujet du numéro 29 qui concerne le rôle des femmes. Comme mon texte est presque entièrement imprimé à l’Internet (je ne sais pas qui en a divulgué le contenu), je crois qu’il est bon que je vous le présente dans son intégrité », explique Mgr Durocher.

Il cite « les statistiques les plus récentes de l’Organisation mondiale de la santé » qui « révèlent ce fait troublant: encore aujourd’hui, près d’un tiers des femmes dans le monde sont victimes de violences conjugales ».

Il aborde cette question qui semble évidente à qui est engagé dans la pastorale des familles ou dans un travail social ou d’enseignant : le principal fléau des famille, après la question de la survie, de la faim, c’est la violence.
La violence des maris contre les femmes, mais aussi tout autre forme de violence qui pollue la famille : les hurlements, y compris des adolescents, et plus rares, mais non moins ignoble, contre les personnes âgées.

Cependant la cellule de départ de la violence c’est le couple et dans le couple pour la plupart des cas ce sont des violences contre la femme, voire jusqu’à la mort. Toutes les semaines les media italiens dénoncent les « femminicidi » qui envahissent les journaux télévisés, mais en chair, pas un mot.

Cette violence des maris contre leurs femmes est transversale, elle dépasse les frontières des classes sociales, elle sévit sous toutes les latitudes : tel homme de loi d’un pays du nord de l’Europe terrorise ses enfants et sa femme, tel artiste est un tyran incontrôlable… Les plus pauvres matériellement ou en culture ne sont pas ceux qui sont le moins capables de faire la paix. Mais le fait d’admirer ces hommes pour leur réussite professionnelle ou leur importance sociale rend le vice plus difficile à guérir.
Un enfant témoin de violence en famille – physique et psychologique -, terrorisé parfois avant même de naître dans le sein maternel, pendant toute son enfance, son adolescence, fait l’expérience d’une immense solitude, et la famille n’est pas une bonne nouvelle. C’est plutôt le cri d’André Gide : « Famille je vous hais! Cellule concentrationnaire… » Un cri de désespoir auquel l’Instrument de travail a donné un écho et Mgr Durocher l’a relevé avec tact et efficacité.

Les enfants témoins des violences conjugales ou renoncent au mariage ou courent le risque de les répéter, n’ayant pas eu d’autre modèle de comportement familial, qui parfois se reproduit de génération en génération. Les psychothérapeutes en parleraient mieux.

La question est, au synode : comment faire pour que la « bonne nouvelle de la famille » parvienne à tous les enfants de nos paroisses? Un seul mot : la paix. Cette paix que le pape François recommande régulièrement aux couples: faites la paix avant la fin de la journée. Une paix qu’il invite à obtenir grâce à l’exercice quotidien de trois mots : s’il te plaît, merci, pardon. Une paix qui se conquiert, comme celle des nations, à partir du Christ mais pas sans l’aide des frères. La paix et la sécurité, voilà ce qu’on attend de la famille.

A l’angélus de dimanche, 4 octobre, après la messe d’ouverture du synode, le pape a centré son message sur l’enfant. Si le synode met le bien de l’enfant au centre des problématiques, se décentre des problèmes de divorce et de remariage, qui sont des conséquences et non des causes, il trouvera peut-être une voie pour remédier aux divorces et aux séparations ou à l’avortement – combien de femmes préfèrent avorter plutôt que de faire naître un autre enfant dans la violence ? -. Et si un père ne respecte pas sa femme et ses enfants qu’il voit, comment respectera-t-il la vie que sa femme porte encore de façon invisible ? Voilà aussi le nid par excellence de la théorie du genre : la violence conjugale. Il ne suffit pas de réfuter la théorie du genre, il faut penser à remédier à la violence.

Accompagner les hommes violents vers un chemin de paix pourrait être une noble tâche des pasteurs indiquée par le synode.

Encore une fois, la question n’est pas marginale. S’il y a un sujet universel c’est bien celui-là, et on peut être heureux qu’enfin un évêque ait eu le courage d’attirer l’attention sur ce point de l’Instrument de travail. Car en chaire la question est pudiquement passée sous silence, et en confession, beaucoup de prêtres semblent croire envisageable que toutes les femmes deviennent des saintes Rita.

Le sujet est trop délicat et trop complexe pour le traiter ici. Ce simple papier voulait en tous cas souligner qu’enfin le synode semble sortir des questions qui l’obsèdent pour aborder des questions qui écrasent les familles. Il fallait saluer ce «désenlisement». Les curés du monde entier ont bien besoin de recevoir du synode des propositions pour éradiquer ce fléau.

Car la peur de se mêler des affaires des autres qui empêche les voisins de tirer le signal d’alarme auprès des autorités avant une tragédie empêche aussi les prêtres d’affronter la question clairement avec les hommes « bien » de leur paroisse. Même quand l’un d’eux hurle et terrorise un groupe de réflexion paroissial, personne ne l’arrête, personne ne le prend pas à part pour en parler. On fait semblant de rien et on continue. C’est normal, le violent fait peur. Le groupe se désagrège, on ne demande pourquoi… La famille aussi.
Lorsqu’un enfant de la première communion a le courage de confesser qu’il hait son père : c’est un signal d’alarme à écouter. On ne peut pas le renvoyer à la violence quotidienne avec de bonnes paroles exhortant au pardon et à la compréhension des adultes. Il ne s’en confessera plus et il s’enfermera dans sa haine et dès que possible, il fuira la famille. Fugues, paradis artificiels…
On pourrait souhaiter que le synode mette le bien des enfants au centre de ses préoccupation, comme le pape François y invitait dimanche, 4 octobre, à l’angélus : « Demandons au Seigneur que tous les parents et éducateurs du monde entier, la société tout entière, deviennent des instruments de cet accueil et de cet amour avec lesquels Jésus embrasse les plus petits. »
Pour sa part, Mgr Durocher fait sien l’appel de saint Jean-Paul II dans Familiaris Consortio: « Je demande à tous de s’engager dans une action pastorale spécifique plus vigoureuse et plus incisive afin que les offenses à la dignité de la femme soient définitivement éliminées. »

« Malheureusement, plus de trente ans plus tard, commente Mgr Durocher, les femmes continuent de subir discrimination et violence aux mains des hommes, y inclus de leurs époux. »

Il avance une proposition : « Devant cette triste et dramatique réalité, je propose que ce Synode affirme clairement qu’une interprétation correcte de l’Écriture sainte ne permet jamais de justifier la domination de l’homme sur la femme. En particulier, ce Synode devrait affirmer que les passages où Saint Paul parle de la soumission de la femme à son mari ne peuvent pas justifier la domination de l’homme sur la femme, encore moins la violence à son égard. »