Un nihilisme satisfait - France Catholique
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Van Eyck, l'art de la dévotion. Renouveau de la foi au XVe siècle
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Un nihilisme satisfait

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L’éditorialiste du Monde est catégorique : « C’est le genre de référendum qui vous réconcilie avec les référendums ». Il s’agit, bien sûr, du référendum irlandais, dont nous parlions hier. Et Libération est au même diapason : « Une victoire pour les femmes, une victoire pour la société. C’est la fin d’un système inhumain. » Que voulez-vous objecter à pareil triomphalisme, sauf à passer pour un affreux réactionnaire ? L’avortement fait désormais partie des droits de la femme, et qui s’oppose à ce droit est passible des rigueurs de la loi. C’est à un point tel qu’il est question pour beaucoup de supprimer le droit à l’objection de conscience pour les médecins, ce qui constitue tout de même une atteinte caractérisée à la démocratie. Mais dans le climat qui prévaut en ce moment, toute objection est mal venue.

Le Premier ministre irlandais a tenu à s’adresser à ceux et celles qui ne participent pas à l’euphorie : « Je veux les rassurer, l’Irlande d’aujourd’hui est la même que celle qu’elle était la semaine dernière, mais juste un peu plus tolérante, un peu plus ouverte et plus respectueuse. » Que répondre à tant de sollicitude et de bien-pensance ? Ne sommes-nous pas passés à une nouvelle ère de l’histoire, sur laquelle on ne reviendra pas ? L’éditorialiste du Monde nous assène le refrain d’une modernisation d’une société longtemps dominée par l’Église catholique. Et l’on peut pressentir que dans pareille logique, la modernisation entraînera la pratique du suicide assisté, tel qu’on nous l’a vantée il y a quelques jours avec le cas d’un Australien de 104 ans parti en Suisse pour se faire euthanasier. Seule l’Église catholique a eu le front de protester face à un tel étalage impudique, une cinquantaine de journalistes s’étant déplacés pour donner le plus large écho à pareil haut fait.

Il faut être un mauvais coucheur pour refuser de se prêter à ce genre de macabre mise en scène. C’est le cas de notre Michel Houellebecq, qui n’a peur de rien et n’a pas craint, dans un de ses romans de dénoncer les pratiques de certaines officines de la mort. Il faut relire ces quelques pages de La carte et le territoire (prix Goncourt 2010). Elles sont au diapason du nihilisme qui pèse sur nos sociétés satisfaites et que Le Monde et Libération tentent de nous présenter aux couleurs d’un optimisme obscène.

Il faudrait tout de même que ces beaux esprits nous expliquent pourquoi ils n’ont pas le courage de percer le rideau qui cache les coulisses de leur scène de liesse. Oui, car à l’arrière-scène, il se passe quand même des choses qu’il faut avoir le courage de nommer. Nos champions de l’émancipation seraient-ils volontaires pour tenir le bistouri destiné à trancher une jeune vie pleine de promesse ? Nos joyeux triomphateurs ne sont-ils pas de fameux hypocrites, incapables d’oser dire que le droit à l’avortement c’est la capacité de tuer une vie ?

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 29 mai 2018.