Trois visages du Mauvais - France Catholique
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Trois visages du Mauvais

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Dans son récit des tentations du Seigneur, saint Matthieu use de trois mots différents pour le Mauvais (Matthieu 4:1-11). En plus de diable, il utilise également les mots le tentateur et Satan. Chaque titre ou nom révèle quelque chose de différent sur la façon dont le Mauvais nous attaque et – plus important – sur la façon dont il nous conduit à pécher.

Le mot grec diabolos (diable) signifie faux accusateur ou calomniateur. Il dérive de diaballein qui signifie jeter dehors, rejeter. Après tout, un calomniateur est quelqu’un qui embrouille les choses, les jette dans la confusion et conduit à de fausses accusations. Un diabolos est quelqu’un qui apporte le désordre et la division – ce qui est une description appropriée de l’oeuvre du Diable. De fait, c’est un excellent résumé, non de tout ce qu’il fait mais de tout ce qu’il est capable de faire.

Le Diable rejette les choses. Sa carte de visite est la division. Là où il trouve unité et harmonie, il sème la désunion et le désaccord. Son premier mouvement est d’introduire la division du doute. Il murmure à la femme : « Dieu a-t-il réellement dit… ? » Ce doute mène au premier péché, le péché qui contient en germe toutes les autres divisions et hostilités : l’homme contre Dieu, l’homme et la femme l’un contre l’autre, et l’individu contre son propre corps.

Il cherche à introduire la même division du doute dans nos esprits : Dieu t’a-t-il réellement dit… ? Peut-on Lui faire confiance ? Cette division initiale est le système d’exploitation de toutes les autres. Ceux qui doutent se détachent de Dieu et se trouvent rapidement coupés des autres et même de leur propre être. La division conduit à la médisance, aux ragots, aux insultes, à la luxure, à l’envie, à la violence, comme nous le voyons dans le récit de la Genèse.

Deuxièmement, Matthieu se réfère au Diable comme étant le Tentateur. Tenter, c’est un autre moyen de créer la division. Cela signifie appâter ou attirer quelqu’un loin du bien. Noter comment le tentateur commence : « si tu es le Fils de Dieu… » Il met à l’épreuve cette identité, pour en écarter Jésus. Comme il a autrefois éloigné la femme de sa confiance en Dieu, il cherche maintenant à éloigner Jésus de sa filiation divine. Avec chaque tentation, il suggère à Jésus d’accepter un plan qui ne soit pas celui du Père ; qu’il fasse confiance à autre que le Père.

C’est ce que le tentateur fait également à notre égard. Pour le dire sans ménagement, il demande : Dieu est-il réellement ton Père ? Désire-t-il vraiment ce qui est bon pour toi ? Toute tentation que nous expérimentons est un test de notre confiance dans le Père. Le tentateur suggère que nous fassions confiance en autre chose que le Père : le plaisir, la richesse, le pouvoir. Il jette une ombre sur la bonté du Père pour suggérer qu’Il n’est pas de notre côté mais en compétition avec nous, que nous ne sommes pas vraiment ses enfants mais ses sujets.

C’est Notre Seigneur lui-même qui fait usage du dernier mot : « arrière Satan ! » Le mot hébreu Satan est plus qu’une description ou un titre. C’est le nom propre du Diable. Il définit ce qu’il est : l’Accusateur. C’est sous cette appellation qu’il est connu dans le Livre de Job. De même dans Zacharie, où le mot accusateur est parfois traduit par adversaire. Satan est l’avocat adverse, le procureur, portant des accusations contre nous devant Dieu. (Voir Zacharie 3:1-2)

De quoi nous accuse-t-il ? Quelle est la matière de l’acte d’accusation de ce procureur ? Ce peut être un péché que nous avons commis ou quelque vice tenace qui nous afflige. Peut-être n’est-ce même pas quelque chose que nous avons fait mais quelque chose que nous avons subi. Quel que soit le cas, l’accusateur cherche toujours à aggraver notre honte. Nous voyons cela immédiatement avec Adam et Eve. La mirifique promesse qu’il vient de leur faire tourne rapidement en accusations. Leur honte les pousse à se cacher de Dieu. L’accusateur a gagné.

De la même façon, il nous accuse d’infliger la sorte de honte qui nous fait nous cacher de Dieu. « Tu ne mérites pas son amour » murmure-t-il. « Tes péchés sont trop grands, tes blessures trop profondes… Si d’autres le savaient, ils te rejetteraient… tu n’en vaux pas la peine… » Il essaie d’inculquer un nouveau récit pour nous faire oublier que nous avons été créés par amour, que nous valons la peine que le Fils de Dieu donne sa vie pour nous et que Jésus pardonne nos péchés et guérit nos blessures. Peu importe à quel point nous nous sentons honteux, nous n’avons pas besoin de nous cacher. De fait, nous recevons le salut seulement quand nous permettons à Jésus de nous trouver.

Il est significatif que notre Seigneur use de ce nom lorsqu’Il rejette la tentation d’adorer le Diable. L’accusateur aime nous rappeler les moments où nous l’avons fait – quand nous avons préféré ce monde déchu au Ciel, les choses créées au Créateur et que nous nous sommes rendus esclaves du péché. Jérémie fait référence au dieu cananéen Baal comme étant « la chose honteuse » ou « le dieu honteux » parce que ce démon a aggravé leur honte et les a conduits à faire des choses honteuses (voir Jérémie 3:24). Ronald Knox traduit cela avec pertinence comme « le culte de la honte », car c’est précisément ce que nous faisons quand nous acceptons les mensonges que le démon dit sur nous.

Notre Seigneur démasque ces trois visages du mal. Il nous libère du doute, de la méfiance et de la honte. En s’offrant Lui-même au Père, Il guérit notre plus profonde division, cette séparation d’avec le Père. Il nous réconcilie avec le Père et les uns avec les autres. Par son abandon au Père – « non pas ce que je veux mais ce que tu veux » – Il obtient pour nous la grâce de la confiance filiale même dans les circonstances les plus éprouvantes. Par Sa mort humiliante, il révèle notre véritable valeur et nous libère de la honte.