Signes et merveilles - France Catholique
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L'amour du travail bien fait avec saint Joseph artisan
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Signes et merveilles

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Il y a quarante ans, lors de la fête de Notre Dame de Fatima, le pape Jean-Paul II recevait un coup de pistolet à bout portant d’un assassin qualifié, sur la place saint Pierre. Notre Dame lui a sauvé la vie. Plus tard, le pape a dit : « Une main a tiré, une autre a guidé la balle. »

Au premier abord, les évènements du 13 mai 1981 prennent un reflet politique. Le jeune pape polonais lançait un défi moral aux régimes communistes athées de Pologne et d’ailleurs, comme son pèlerinage remarquable en Pologne en juin 1979 l’avait montré. Face à l’élan croissant du mouvement Solidarinosc, la Pologne a imposé la loi martiale fin 1981. Lech Walesa, chef de Solidarnosc, a reçu le prix Nobel en 1983. La suite est, comme on dit, du domaine de l’histoire : le communisme polonais s’est écroulé au cours des révolutions de 1989. L’union soviétique elle-même s’est dissoute en 1991.

Nous ne saurons probablement jamais toute l’histoire de la façon dont Mehmet Ali Agca, destiné à assassiner le pape, s’est retrouvé sur la place Saint Pierre ce jour-là. Nous ne saurons probablement jamais de façon précise quels gouvernements ou quelles organisations criminelles ont conspiré pour éliminer le successeur de saint Pierre. L’opinion la plus générale est qu’Agca travaillait avec des agents des services secrets bulgares. Et il est impensable que les bulgares aient pu agir avec une telle audace sans l’approbation – pour ne pas dire les ordres directs – de Moscou.

Quoiqu’il en soit, la tentative de meurtre est un épisode extraordinaire dans le plus grand drame historique de la fin du XXe siècle. Mais le contexte géopolitique qui entoure cette atteinte à la vie de Jean Paul II n’est qu’un sédiment de l’histoire. Un autre sédiment, plus familier aux catholiques pieux pour des raisons évidentes, s’apparente aux apparitions de Notre Dame de Fatima.

Notre Dame est apparue pour la première fois aux enfants de Fatima le 13 mai 1917 : soixante quatre ans jour pour jour avant l’attentat contre Jean Paul II. Dans ses messages aux jeunes Jacinta, Lucia et Francisco, Notre Dame suppliait que l’on prie pour la conversion de la Russie et pour la consécration de la Russie à son cœur immaculé. Le troisième secret est réputé contenir une vision d’un évêque en blanc, probablement le Saint Père, blessé par balle au pied d’une croix.

On peut appeler cela foi ou crédulité, mais pour ceux qui y sont enclins, la connexion entre Fatima et la tentative de meurtre est facile à faire. Le pape Jean Paul II l’a faite, c’est certain. Il est allé à Fatima en 1982 et encore en 1991, et chaque fois, il a attribué à la Vierge le crédit de lui avoir sauvé la vie : « J’ai senti votre présence protectrice auprès de moi. » Une des balles que l’on a extraite de son abdomen orne maintenant le couronne de Marie au sanctuaire de Fatima.

On peut voir d’autres reliques de ce jour de mai 1981 en Pologne. La fascia (la large bande de tissu que les prélats mettent en guise de ceinture) tachée de sang, est conservée dans un coffret en verre et en argent dans la chapelle de la Vierge Noire du grand sanctuaire marial de Jasna Gora – autre témoignage de gratitude envers Notre Dame. La soutane blanche que le pape Jean Paul portait ce jour-là, froissée et raide de sang bruni, est présentée dans le sanctuaire Jean Paul II de Lagiewniki, à un jet de pierre du sanctuaire de la divine miséricorde.

De telles reliques rappellent puissamment que Dieu est toujours à l’œuvre dans le monde aujourd’hui, et que les miracles et les merveilles ne sont pas consignées dans un passé distant et révolu.

Je me souviens qu’étant enfant, je me disais que ce devait être merveilleux de vivre au temps de la Bible : d’avoir vu les merveilles que Dieu avait faites pour faire sortir d’Égypte les israélites, ou d’être témoin des miracles de Jésus. Comme ce serait plus facile de croire si j’avais vu ces choses de mes propres yeux ! Comme ma foi serait plus zélée si de telles merveilles étaient arrivées de mon vivant !

Et pourtant…

Combien de fois les Israélites ont-ils trébuché dans leur foi – ceux-là mêmes, hommes et femmes qui ont été témoins des plaies d’Égypte, de la Pâque juive, et qui marchaient au milieu de la mer Rouge. Est-ce que ceux qui ont assisté aux miracles du Christ en sont tous venus à croire en Lui ? Judas a-t-il cru ? Est-ce que les informations contemporaines à propos du soleil de Fatima qui dansait, phénomène attesté par des dizaines de milliers de personnes, ont converti les sceptiques ? Croyons-nous vraiment que Marie a sauvé Jean Paul II ? Ou bien est-ce que cela n’a été qu’un coup de chance ?

Quels signes de l’action de Dieu de nos jours avons-nous ratés parce que nous sommes trop sceptiques, trop cyniques, trop avides de paraître sophistiqués ?

Nous aimons nous imaginer que des signes et des merveilles changeraient les cœurs et les esprits. Et bien sûr c’est le cas. Mais jamais autant que nous n’aimerions le croire. Peut-être est-ce une pensée consolante de savoir que notre époque scientifique, sceptique et désenchantée n’est pas la seule qui ait échoué à répondre aux signes et aux merveilles comme elle le devrait.

En des temps aussi étranges et incertains que sont les nôtres, nous pouvons être sûrs qu’il y a des signes et des merveilles tout autour de nous. Dieu parcourt le monde. Y faisons-nous attention ? Sommes-nous disposés à voir ce qui nous entoure réellement ?

En ce jour de la fête de Notre Dame de Fatima, il vaut la peine de se souvenir que le monde n’est jamais aussi ordinaire qu’il n’y parait. Ces petits enfants bergers du Portugal, comme le berger venu de Pologne, ont vu le monde par les yeux de la foi. Leur vision du monde n’était pas moins réaliste, mais plus réelle car ils percevaient à la fois ce que nous voyons et ce qui échappe trop facilement à notre vue.