Rendre l’Amérique chrétienne de nouveau - France Catholique
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Rendre l’Amérique chrétienne de nouveau

Traduit par Charlotte

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L’erreur est un grand gaspilleur de temps et d’énergie. Cela me vient de Goethe – d’une lettre qu’il a écrite à quelqu’un d’autre – mais on aurait pu le trouver facilement dit ou indiqué dans mille autres endroits. Oui, Goethe dit que la vérité devrait être répétée souvent dans un monde où l’erreur se répète souvent.

Cette maxime me revient à cause de ma très mauvaise habitude de lire les nouvelles – elle-même grande gaspilleuse de temps et d’énergie. Les nouvelles sont irritantes. Je n’ai sûrement pas besoin de donner des exemples.

Il y a de vrais sots, bien qu’ils soient difficiles à trouver actuellement ; il y a des sots insignifiants, et puis il y a les malicieux. Ces derniers sont de grands gaspilleurs, pas seulement d’eux-mêmes. Ce serait bien de pouvoir les ignorer complètement, mais ils ont aussi tendance à être ambitieux. Il faut du temps et de l’énergie pour les arrêter.

Aujourd’hui, en Amérique (en tant que canadien, je me compte comme appartenant au continent), il semblerait que l’erreur soit constitutionnellement enchâssée. Elle est exprimée comme la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Cela signifiait une chose pour ses auteurs chrétiens, et cela en signifie une autre pour leurs distants descendants païens.
En excluant de la vie publique les principes mêmes sur lesquels la société américaine a été fondée, l’erreur se voit attribuer un genre de monopole, qui doit être imposé par une myriade de ministères.

Or, nous sommes catholiques pour la plupart dans notre « espace de sécurité » ici, et les fondateurs de l’Amérique (avant et après la Révolution) étaient surtout protestants. Mais les vérités de chez nous qui étaient autrefois reconnues ont franchi les lignes confessionnelles.

La Virginie, le Massachusetts et le Québec étaient des régions bien distinctes, à la fois à l’église et à l’extérieur, pourtant pour un observateur venu de Chine ils seraient à peu près les mêmes. La notion d’homme dans un monde déchu, né dans l’esclavage du péché et le besoin de rédemption, était commune à toutes les confessions. Tant de détails ont suivi.

Parmi les quelques films que j’ai vus, il y avait Nashville, réalisé par feu Robert Altman pour le Bicentenaire des Etats-Unis. L’odyssée d’une journaliste prétentieuse de la BBC (jouée par Géraldine Chaplin) à la recherche de « la vraie Amérique », et ses erreurs constantes, sont au nombre de ses savoureuses intrigues secondaires.

Un dimanche matin, elle s’est installée dans un immense parking pour les autobus scolaires jaunes. Elle trouve qu’il y a un symbolisme profond dans ces carcasses métalliques endormies.

Mais la camera nous emmène ensuite dans les différentes églises –baptiste, méthodiste, épiscopale, etc. – où l’on trouve les personnages comiques du film. Tous chantent, prient et écoutent des sermons. On nous montre une « vraie Amérique », que le gratin d’Angleterre a complètement oubliée.
Je mentionne le film parce qu’il est tellement récent ; 1976 n’est pas si loin. Je m’en souviens moi-même, et je n’ai que soixante ans. Je peux me souvenir du fait que l’on fréquentait l’église tandis que je grandissais dans l’Ontario, et que c’était « normal » en Amérique du nord. Je n’ai pas été élevé par des chrétiens conscients, qui fréquentaient l’église, mais j’ai compris que c’était anormal.

Dans un sens, mes parents étaient des gens de gauche à l’ancienne, anticléricaux par disposition, et ma maman, en fait, était consciemment athéiste, mais je ne pense pas qu’ils aient jamais pensé que la culture religieuse de tout le continent devait être détruite. Même maman disait : «  Les gens qui croient se conduisent mieux. »

Ils considèrent normales les choses auxquelles les gens n’ont pas besoin de penser –avec toutes les erreurs qui s’ensuivent quand il faut réinventer la moralité à partir de zéro. Les croyants avaient des notions de base sur le bien et le mal, établies peu après la naissance. Même les enfants des foyers sans foi absorbaient celles-ci dans la société en général.

Hypocrites, oui, la plupart des croyants; et ils étaient athées aussi à toutes fins utiles, dans les moments où ils oubliaient que Dieu veille. Ce n’est pas la condition chrétienne, mais la condition humaine ; nous sommes fréquemment dans l’erreur.

C’est pourquoi Goethe – qui était lui-même un genre de libéral à l’ancienne – dit que nous revenons à la vérité comme à l’éveil après avoir dormi, nous sentant rafraîchis. Le dimanche, « tous les sacrés dimanches », était notre réveille-matin.

Je ne suis pas le genre de naïf idiot qui pense que l’Amérique a simplement réfléchi au sujet de la religion et a décidé, d’après notre manière démocratique que c’était incommode et qu’on pouvait s’en passer. Il a fallu beaucoup de travail ardu pour la saper dans « la longue marche à travers les institutions. » des progressifs. Il a fallu beaucoup de capitulation de la part de nos gardiens de l’autorité.

Et comme tout le monde le sait, et que tous les progressifs aiment le répéter, l’histoire ne revient pas en arrière. Il n’y a rien dans la vieille Amérique qui se réassemblera spontanément. Elle ne s’est jamais assemblée en premier lieu, mais a été le produit d’une aspiration et d’un travail humains, remontant à bien avant sa découverte et sa colonisation.

Beaucoup a été renversé en quelques générations. Nous ne parlons pas de transition générationnelle, mais d’une transition de civilisation. Quand nous abandonnons le christianisme, notre passé chrétien devient incompréhensible pour nous. Nos ancêtres deviennent incroyablement étranges. Leur présence à l’église devient un facteur d’aliénation. Les chrétiens qui survivent deviennent un culte minoritaire exotique, nécessitant une surveillance et une réglementation minutieuses du gouvernement.

Le slogan « Rendez sa grandeur à l’Amérique » a peut-être marché pendant la dernière élection présidentielle, mais il est vide de sens. Il suppose qu’il y avait une fois une Amérique qui était grande. C’est peut-être vrai, mais ce n’est plus l’Amérique. « Nous ne sommes plus au Kansas. »

La grandeur devient également un concept vide à moins que le sens du terme puisse être spécifié. Voulons-nous dire « grand » dans le sens d’important ?

Mais nous sommes déjà importants. Voulons-nous dire grand dans le sens de dynamique économiquement ? Mais nous sommes déjà sans précédent dans notre production de marchandises clinquantes. Ou comprenons-nous dans notre spécification un sens du noble et du digne ?

Evidemment, cette dernière définition est entendue, même à travers la confusion. Mais sans une conception claire du noble et du digne nous sommes toujours perdus. Et cela ne viendra pas de rien.

C’est pourquoi je propose le slogan alternatif : « Rendre l’Amérique chrétienne de nouveau. » Et puisque l’histoire ne revient pas en arrière, concentrons-nous à la rendre catholique cette fois-ci. Car autrement nous gaspillerons du temps et de l’énergie.

Vendredi 24 novembre 2017

https://www.thecatholicthing.org/2017/11/24/make-america-christian-again/


Image : Goethe dans la campagne romaine par J.H.W. Tischbein, 1787 [Städel Museum, Francfort]